Lettre ouverte à Monsieur Macky SALL.

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  • Article ajouté le : 06 Mercredi, 2019 à 18h02
  • Author: Abdou DIENE

Lettre ouverte à Monsieur Macky SALL.

Cher concitoyen,

Je n’ai pas trouvé plus illustre que le titre de citoyen pour me désigner. Par conséquent, c’est en cette qualité que j’envisage cette communication avec vous, avec le respect et la considération que je vous dois. Mes motivations sont essentiellement pour le bien de notre Patrie commune et j’ose croire qu’en tant  que "patriotes" peu de choses ne devraient pouvoir cristalliser notre dévouement autant que le Sénégal.

Monsieur SALL, voulez-vous bien arrêter de danser juste pour l’instant de notre entretien? Parler du Sénégal en ce mercredi, sixième jour du mois de février de l’année deux-mille dix-neuf, revient à parler de fait sociaux, de faits divers et surtout de politique avec la campagne électorale qui est en son quatrième jour. Il faut le dire, parler du Sénégal c’est aussi peindre un tableau tout gris, parsemé de mille et un points sombres. Je me permettrai, pour être pointu, de me focaliser sur un certain nombre de faits marquants, inducteurs d’un certain comportement et révélateurs d’une certaine situation, d’un certain état d’esprit.

Vous noterez, certainement, cette petite excitation qui me précipite dans le vif de mon sujet. Cette curiosité qui me fait brûler les étapes dans mon processus d’élaboration me brûle aussi les lèvres. Elle ne doit pas vous être méconnue, Monsieur SALL ! Elle est à la mesure de ma passion pour mon pays à l’instar de la vôtre pour une réélection.

Je m’intéresse aux faits politiques et apparemment vous en êtes un "génie". Cela devrait m’émerveiller. Mais à vrai dire je suis plutôt accroché par votre "je-nie". L’art de nier, tout bonnement, des engagements dont l’éventuelle réalisation nécessite courage et honneur ; vous en faites vôtre.  C’est vrai que c’en est un art, cette capacité de réfuter avec tellement de sérénité et sans scrupule des évidences sur la face du monde. C’est un talent  tout de même qui fait des fresques et des frasques sur la place publique. Je ne vous interpellerai pas, cette fois, sur la réduction de votre mandat (il est épuisé), sur la taille de votre gouvernement, sur la gestion clanique du pouvoir, les détournements de deniers publics, votre mépris de vos concitoyens sénégalais, votre « meussou mako wax » relatif à votre demande récusation du ministre de l’intérieur d’alors, lorsque vous étiez encore dans les prairies maigres, pour l’organisation de la présidentielle de 2012 etc. ….

Vous venez de passer sept ans à la tête du pays et naturellement vous pouvez nous lister, sans hésiter,  tous les maux que vivent les populations. Vous avez l’opportunité durant ce septennat d’être à la commande des affaires publiques, nos besoins de nourriture saine, d’eau potable, d’habitat, de médicaments, de soins de santé, de sécurité, de formation, d’embauche, d’entreprendre, de rêves, de perspectives, de défis, vous les avez placé où dans vos priorités ? Le fait le plus marquant de votre mandat, c’est vos assauts non conventionnels à l’endroit de vos opposants politiques.

Durant votre mandat, vous avez fait combien de conseils des ministres décentralisés ? Combien de tournées économiques ? Qu’est-ce qui a été fait des mille et une choses et de milliards que vous aviez promis? Votre mandat est fini, tous les secteurs clés du pays se courbent sous le poids des difficultés. Seriez-vous, tout simplement, sous le diktat d’une double contrainte : vos limites personnelles et votre propre agenda ?

Êtes-vous préoccupé Monsieur SALL ? Au cœur des urgences de l’Etat le bien-être des sénégalais paraît être en marge. Votre obsession de deuxième mandat fait trembler nos Institution ; le droit en a perdu de son pouvoir, de toute sa splendeur. Le Sénégal n’a jamais autant entendu Dame Justice hurler de son intérieur.

L’intérêt général souffre de vos calculs et de vos manœuvres. Vos propres convictions même semblent trembler devant votre ambition. Vous vomissez sur une chose aujourd’hui et demain vous la ravalez aisément. Vous êtes tombé littéralement amoureux de la transhumance politique, vous lui taillez une robe d’immaculée en perspective d’une belle chorégraphie. Faites de sorte que ça ne soit pas votre dernière danse, la danse de la « mort ». Votre appât accroche un à un de "gros poissons", comme vous l’insinuez. La liste est longue certainement, mais assurez-vous aussi qu’il ne s’agisse pas de poissons déjà pourris.

Vous manœuvrez toujours quand même. Vous grignotez par-ci et par-là des parcelles de pouvoir, comme si l’étendu de vos pouvoirs constitutionnellement conférés ne vous suffisait pas. Vos glissements réguliers sur le Judiciaire et le législatif en témoignent de votre boulimie.

Le sens de la mesure, savoir avoir des limites, c’est aussi une vertu. Vous brillez par votre absence de limite ; par votre obsession, par votre faiblesse devant le pouvoir et devant tout détenteur, ne serait-ce,  d’un bout de celui-ci. C’est pourquoi vous vous faites entouré, et parfois trop même, malheur est que vous ne vous souciez pas de la qualité et des convictions de ceux qui vous entourent.

Il y’a beaucoup trop de polémiques, trop de calomnies, trop d’injures… Dites-vous bien que ça nous met mal à l’aise lorsque vous tentez de séduire, par tous les moyens, sur l’esplanade des religieux avec vos talents de valseur et de manipulateur. Les Hommes de Dieu, il faut les vénérer ou les laisser avec Dieu. Les hommes de Dieu ne peuvent pas devenir les hommes de l’homme du palais. Leur image ne doit point souffrir par contagion.

Pour votre information, Monsieur SALL, nous avons touché le fond ; vous avez atteint vos limites. Si vous êtes d’avis contraire, si vous êtes toujours convaincu de la confiance des sénégalais à votre endroit, à quoi bon toute cette peine ?

Votre manque de confiance en vous-même justifie vos forfaitures durant tout le long du processus électoral. Tout porte à croire, maintenant, qu’il ne vous reste que violence, complot, forcing comme argument. C’est ainsi qu’il faut appréhender vos menaces à l’endroit d’une certaine société civile (voir le dossier du retrait de l’agrément de l’ONG LEADS AFRICA) ; la confiscation du droit de vote de beaucoup de sénégalais par la détention ou le sabotage de leurs  CNI , la violation de notre droit de regard par la rétention du fichier électoral, la menace sur notre liberté d’expression avec une nouvelle loi « liberticide etc. Voilà les contours de votre  grand projet de « RERAIT » de nos acquis démocratiques.

 Hélas tout tremble devant votre bon vouloir, votre projet personnel !

Vous n’entendez pas, certainement, ce brouhaha, né de l’indignation collective et simultanée du Peuple à la suite de chacun de vos actes. C’est un chœur qui exprime notre ras-le-bol, nos espoirs battus en brèche par un horizon assombri par chacun de vos pas qui témoignent de votre déphasage avec les aspirations des sénégalais ; des aspirations de démocratie, de liberté, de justice, de Peuple évolué. Notre mal être est profond, Monsieur SALL. Nous sommes dos au mur et vous êtes le seul qui semblez  ne pas en être conscient. Etes-vous coupé de la réalité ?

Excusez-moi ! Vous ne pourrez pas répondre à cette question, vous ne savez pas ! Quand on est coupé de la réalité, puisque la nature a horreur du vide, elle nous en crée une autre plutôt artificielle, imaginaire, des chimères traduites en chiffre et lettre et rendues vivantes à travers des bouches malintentionnées. C’est une fiction qui contraste avec la réalité économique, que vous nous servez, les chiffres parlent d’eux-mêmes. Notre tissu économique se compose, de 80 à 90%, de PME et malheureusement 60% d’entre elles sont mort-nées à cause d’un environnement défavorable (concurrence irrationnelle des multinationales et préférence étrangère). Notre économie se courbe sur le poids d’une dette pharaonique (environ 7000 milliards F CFA) représentant près de 50% du PIB et dont les 70% correspondent à la dette extérieure. Le taux de chômage passe de 10,8% à 15,7%.  La pauvreté galope avec un taux ahurissant de 46,7% et un nombre de pauvres qui évolue de 6,3 à 6,8 millions, faisant figurer le Sénégal parmi les 25 pays les plus pauvres du monde (170e pays sur 196 les plus pauvres du monde). Concernant l’IDH (Indice de Développement Humain) en 2012, le Sénégal était à la 154e position, aujourd’hui il est à la 185e place sur 211 pays. Si vous dites que tous les signaux sont verts ; nous comprendrons que tout se rue vers un précipice.

Si vous n’étiez  pas, vraiment, coupé de la réalité vous passerez votre temps à sautiller de désarrois lorsque vous entendez les membres de votre famille politique parlez de la situation de notre Patrie. Quand vos acolytes décrivent le Sénégal de 2019, personnellement je suis tenté, à chaque fois, de prendre une carte de la terre pour vérifier s’il n’existait pas ailleurs un autre pays du même nom que le nôtre.

Monsieur SALL, pour vous dire vrai, nous sommes choqués. Vous êtes en campagne électorale, comme sept ans avant. Nous nous rappelons que vous  dénonciez avec abnégation tout ce qui est en train de se passer actuellement… Nos mallettes de billets de banque constitués par la sueur cristallisée de nos fronts de « gorgorlou », continuent à servir de sucette pour recruter des gens qui n’ont plus encore un débris de dignité à sauvegarder. Vous avez bien dit, gouvernance sobre et vertueuse… La sobriété, vous l’avez, certainement, exclusivement dédié, à cette partie de la population laissée pour compte dont les problèmes ne trouvent oreille attentive qu’à travers les rubriques faits divers de certains média. Ceux-là qui manquent de tout, qui remuent ciel et terre, juste, pour trouver de quoi acheter un ticket de consultation médicale. De la pauvreté galopante, du manque de perspective des jeunes, des difficultés des entreprises nationales, des problèmes des hôpitaux, des maux de l’école et des universités, de la problématique de l’insécurité etc. aucune réponse concrète n’a été apportée.

Hélas, malgré tous nos maux, Monsieur SALL, vous avez le cœur à chanter, à danser, à faire vos propres éloges, à bomber la torse, "egotriper" au vu et au su de cette situation. Pas plus tard qu’avant-hier vous avez récidivé lors de votre passage à Saint-Louis. Deux choses sont possibles, soit vous êtes coupé de la réalité pour de bon, soit vous êtes un bon acteur de cinéma, une star de la comédie.

Ce qui se passe dans ce pays, c’est une comédie et le Peuple y est souvent figurant, à défaut de jouer le rôle de parent pauvre.

Quoi de  neuf allez-vous promettre encore aux sénégalais ? Des aéroports, des stades, des pyramides…. ?

Vous comprenez bien, Monsieur SALL, mon amertume, ce fardeau que j’essaie de partager avec vous. Dites-vous bien que le Peuple ne peut pas être complice de son propre bourreau ! On peut le tromper mais il ne peut pas vouloir son mal, dirait l’autre. Et apparemment, la tromperie,  c’est le seul domaine dans lequel vous excellez. Je réitère mes propos : c’était une tromperie le référendum passé, c’était une mascarade les législatives passées, c’était un forcing le « Parrainage », pour le scrutin du 24 février tout ce qui est fait jusqu’à présent, c’est du "one-man-show". Votre grand complot est en marche pour l’instant au détriment de la démocratie.

Qu’en est-il de l’Etat de droit ? Qu’en est-il de nos Institutions ? Qu’en est-il de notre administration ? Qu’en est-il de notre système de valeurs ? C’est lamentable !

L’étendu des choses à débattre est incommensurable. Pour être raisonnable, je vais devoir écourter mes propos, tout en vous rappelant que Patriotisme, Clairvoyance et Dignité sont trois choses indispensables pour bâtir une Nation forte. Vous devez savoir, aussi, que le destin de notre Patrie n’est pas entre vos seules mains. Par conséquent je vous demande de reconsidérer votre logique de « on gagne ou on gagne » afin d’accepter éventuellement la volonté populaire, qui s’exprimera au jour du 24 février,  pour votre bien et celui de toute la Patrie.

Veuillez recevoir, Monsieur Macky SALL, l’expression de mes meilleurs sentiments.

 

Abdou DIENE

MEA / Grand Mbao

[email protected]

 


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