Le Blogs de : abdoulaye taye

Il est venu, il est parti ! Embarqué dans une fusée supersonique, il laisse derrière lui des traces indélébiles dans le ciel nuageux de la politique sénégalaise. Il entreprend un voyage sans retour. Honorés unanimement par des témoignages éloquents, signes de reconnaissance de sa mission accomplie, il mérite un accueil et un repos paradisiaque. Il était pétri de la Densité de son engagement et de sa fidélité aux idéaux de liberté, de démocratie et de progrès social. Ivre de son Amour pour l’être humain, il était lumière dans la Nuit qui abrite la peur et l’angoisse.  Il était la Simplicité qui dégage une Odeur parfumée et attirante. Coiffé du Képi qui rehausse la dignité de la nation et flatte l’honneur de la patrie, il cultivait et aiguisait le goût du contact qui sublime l’Humilité et l’Ouverture. DANSOKHO est la partie qui contient le tout. Il est l’unité qui rassemble, le médiateur qui rapproche, la générosité qui donne, le courage qui défie et le cœur qui pardonne. Il voulait être pour ne pas paraitre. Il était la liberté qui délivre des contraintes et du stress. Il flottait dans les airs comme un ballon attaché à un support qui le retient en lui rappelant sa conscience, sa responsabilité et son origine. Il se laissait impressionner par l’intelligence qu’il reconnaissait et admirait en chacun de nous. Il était doué d’une intelligence émotionnelle qui lui permettait de humer et de sentir la vérité. Il n’avait pas besoin du détour des mots et de la logique pour accéder et percevoir la vérité.

Les analyses pertinentes à travers ses éditoriaux dans le journal DAN DOOLE étaient de véritables leçons de sciences politiques. Il nous renvoyait chaque fois la photographie de l’état et des tendances des rapports de forces politiques et sociales dans le pays.

Il nous disait en 1983 (chez le camarade Mamadou Diop à Castors) que l’on ne peut pas faire la révolution sans les masses et les masses sont dans le PDS. Il a compris très tôt, conceptualisé et construit depuis 1983 l’alliance politique qui devait conduire à l’alternance de 2000. Cette rupture idéologique apparente a créé un désarroi idéologique chez certains camarades et exposé les étudiants de l’UNDES, affilié au parti, aux attaques des radicaux  de gauche les plus acerbes et les plus malveillantes. Nous avons été accusés de renégats et de révisionnistes ! Assumer cette nouvelle position politique du parti à l’université était une véritable gageure.

En vacances au Sénégal, après la chute du mur de Berlin, je lui posais la question : comment se porte le mouvement démocratique et social au Sénégal ? Il me répondait : nous avons des problèmes politiques ! L’évènement le surprenait, surtout qu’il écrivait dans le journal DAN DOOLE un article intitulé « la Pologne, reste et restera socialiste ». Il ne l’a pas vu venir. Toutes ses certitudes idéologiques et politiques s’effondraient. Tout son argumentaire idéologique et politique s’écroulait sous ses pieds. Il lui fallait une nouvelle orientation et nouveau contenu à son action politique dans le contexte géopolitique mondial marqué par la fin de la guerre froide.

Il s’identifiait profondément à ses principes qui se laissaient transparaitre plus ou moins dans ses actions et ses comportements. Il distinguait et séparait l’idéologie de la politique qui la réalise. Les différentes formes de l’action politique peuvent apparaitre contradictoires avec l’idéologie au premier degré de lecture. La deuxième économie du système capitaliste mondial est l’œuvre du parti communiste chinois. Paradoxe ?! C’est ainsi qu’il a fait tous les régimes du président  Abdou Diouf au président Macky en passant par le président Abdoulaye Wade dont il admirait la prestance intellectuelle et détestait la suffisance. Il n’a pas hésité à traiter le président  Abdou Diouf «  de président ou roi fainéant » dans un article de DAN DOOLE dont la vente m’a valu des insultes et des frustrations venant des partisans du président Diouf. Toutefois, cela ne l’a pas empêché de rejoindre le président Abdou DIOUF et de battre campagne avec lui. Il a compris qu’à défaut de renverser le système, il fallait l’intégrer pour l’améliorer de l’intérieur. Le travail qu’il a abattu lors de son passage au ministère de l’habitat administre la preuve de la pertinence de son attitude politique.

Le camarade Amath Dansokho est définitivement rentré dans l’histoire du Sénégal, immortalisé à jamais ! Il a réuni toutes les qualités d’un leader politique : la vision, le management, la perspicacité, le courage jusqu’à la témérité. Il nous a légué un modèle d’engagement, de foi et de fidélité aux principes et idéaux. Il nous a laissé un modèle de renoncement, d’esprit de sacrifice mais aussi de rassembleur. Son œuvre politique doit nous servir de boussole, d’orientation et d’inspiration. Il est singulier dans son art.

Dr. Abdoulaye Taye

Enseignant-chercheur à l’Université Alioune Diop de Bambey

Président de TGL (voir Tôt, voir Grand, voir Loin)