Le Blogs de : amadou Bakhao Diaw

Le président de la République, Abdoulaye Wade, a indiqué samedi qu’il envisage de ’’convoquer’’ l’Assemblée nationale du Sénégal ’’en réunion d’urgence’’ au sujet de la situation en Haïti, victime mardi dernier d’un séisme qui a fait de nombreuses victimes et causé d’importants dégâts matériels. Cette décision  politique est à la hauteur des liens historiques inextricables qui lient, notre pays et l’Afrique à cette partie d’Amérique qui est la plus africaine du nouveau monde et participe au mouvement de la renaissance africaine.

Cette semaine toutes les chaînes de télévision du monde occidental reviennent en prime time et  en boucle   sur le  terrible tremblement de terre survenu en Haïti avec  le terme de "malédiction"  qui est omniprésent dans les discours de leurs commentateurs. Ces propos ne sont pas innocents, pour rappel  les négriers européens avaient pendant toute la traite des esclaves utilisé la bible  en excipant de la malédiction de  Cham (ancêtre des noirs) pour justifier leur commerce indigne. Pour l’Occident,   exterminateur de  Juifs  et d’amérindiens  la république d’Haïti  est maudite. En nous rappelant de façon récurrente que c’est l’un des pays les plus pauvres de l’hémisphère Nord mais sans nous en expliquer les causes ,on nous laisse croire qu’en Haïti  (chez les noirs ) il y a une fatalité  de la pauvreté et de la misère : « c’est la malédiction  ». Et comme toujours, sous le couvert d’informations  de ses commentateurs, surgissent les clichés les plus éculés vis-à-vis  du peuple haïtien  et des noirs en général : pauvreté ; misère,  violence bestiale, machettes etc.…. Haïti  n’est  pas maudite, elle est victime, elle n’est pas pauvre mais appauvrie, elle n’est pas sous l’emprise de la violence atavique  mais celle entretenue en Haïti il est ainsi combien artificielle la coupure entre le passé et le présent, qui vivent ainsi l'un dans l'autre, le passé devenant un présent, plus présent que le présent Les  témoignages que nous offre  l'Histoire nous éclaire sur la situation socioéconomique de l’ile

. Apres avoir commis un génocide en exterminant toute la population amérindienne de l'île qui s’appelait  Saint-Domingue   l’Occident blanc et chrétien, surtout la France  y déporta pendant deux siècles des millions d’africains  venant principalement du Sénégal, du Bénin et du Nigeria pour les réduire en esclavage dans leurs plantations de cannes à sucre.

En 1793  éclata dans l’île  la  plus important la révolte des esclaves qui aboutit en à l'abolition de l'esclavage . A son avènement l’empereur  Napoléon Bonaparte, sous l'influence de sa femme créole Joséphine envoya son beau-frère le général Leclerc à la tête d’une expédition de 30 000 hommes pour rétablir l’esclavage. Mais, malgré, l'arrestation et la déportation de Toussaint Louverture, les troupes françaises sont  vaincues .A l’issue de cette guerre de libération au nom de la liberté ,l'indépendance du pays qui prit le nom de Haïti  fut proclamée le 1er janvier 1804. L'ancienne colonie française devient le premier État noir des Temps modernes et le deuxième État indépendant des Amériques après les États-Unis.

Ce fut un coup de tonnerre, nulle part ailleurs dans le monde l’étendard de la libération, de l’émancipation et de l’indépendance  du peuple noir n’avait  été porté aussi haut qu’en Haïti. Cette révolution antiesclavagiste et anticoloniale qui révulsait   l’Occident blanc qui pour la première fois  avait été vaincu militairement par des troupes de couleur, cent ans avant la victoire japonaise sur les russes en 1904.

Les généraux haïtiens Toussaint  Louverture et Jacques Dessalines furent les precurseurs des combattants anticolonialiste comme  le  viet namien GIAP le mozambicain  Samora Machel et le bissao guinéen Cabral

Il fallait punir, isoler stigmatiser la nouvelle république d’Haïti qui eut aussi le triste  privilège d’être  la première à être traitée par l’Occident « d’état voyou ». Haiti qui est l’ile des caraibes la plus riche fut boycotté et isolé

La France revancharde qui n'a jamais digéré la défaite de l'armée napoléonienne  de Leclerc ni surtout le massacre des colons blancs par Jacques Dessalines va se mettre en première ligne  pour ne laisser au  peuple Haïtien aucun répit ni le temps de savourer pleinement leur indépendance.

La révolution noire qui a abouti à l’expulsion du colon, l’indépendance haïtienne sera finalement été monnayée par le colon français ; Haïti aachètera sa liberté au prix d'une dette colossale .Le 11 juillet 1825, les dirigeants haïtiens sous la menace d'un corps expéditionnaire de 14 vaisseaux et 500 canons furent contraints  à signer un traité avec le roi de France Charles X. qui par ordonnance royale décida  que « Les habitants actuels de la partie française de Saint-Domingue verseront à la caisse fédérale des dépôts et consignations de France, en cinq termes égaux, d’année en année, le premier échéant au 31 décembre 1825, la somme de cent cinquante millions de francs, destinée à dédommager les anciens colons qui réclameront une indemnité. Nous concédons, à ces conditions, par la présente ordonnance, aux habitants actuels de la partie française de Saint-Domingue, l’indépendance pleine et entière de leur gouvernement. » La  France n’ a donc reconnu l'indépendance de sa colonie haïtienne qu’ en échange d'une rançon de 150 millions de franc-or qui sera plus tard ramenée à 90 millions une réduction de 50 % des droits de douane. Les Haïtiens vont l'acquitter par échéances jusqu'en 1888 ! Cela équivaut à environ 21 milliards de dollars d’aujourd’hui. Cette dette de l'indépendance payée par Haïti à la France fut l’élément fondateur  structurel de l’instabilité sociale et économique de cette ile.

Haïti qui était l’ile caribéenne la plus riche sombra dans la misère. Il ne fallait pas que des négres puissent construire une nation une économie prospère dans le nouveau  continent .Ceci risquait de donner des idées des envies d’émancipation des autres peuples afro-américains asservis.

A travers une concurrence entretenue entre mulâtres et noirs l’Occident réussit à faire de Haïti un état de non droit de violence de corruption du symbole de l’incapacité congénitale du négre, ce grand enfant de s’auto gouverner.

Au-delà de l’émotion  forte et de la compassion à travers le monde, il faudra penser à la reconstruction d’Haïti.

Lors de la conférence internationale pour la reconstruction tout d’abord il faudra exiger de la France qu’elle rembourse à Haïti la rançon  de 21 milliards de dollars qu’elle a reçue.

La  France ne s’est pas gênée suite aux dommages de guerre causés pendant la première guerre mondiale dans le Nord de la France d’exiger de, l'Allemagne vaincue de payer de fortes réparations s'élève à 132 milliards de marks-or. Le montant à payer est fixé par une commission en 1921  s'élevant à 132 milliards de marks-or

En 2003 Haïti a réclamé à cor et à cri la « restitution » par la France la « dette de l’Indépendance », L’ancien président Aristide avait fait des mots restitution « restitusyon » et réparation « réparasyon » le pivot de sa politique de développement : « Pensez à tous ces enfants qu’on pourrait envoyer à l’école avec cet argent. Aux hôpitaux qu’on pourrait bâtir, aux routes qu’on pourrait construire, aux tracteurs, aux engrais, à l’eau qu’on pourrait fournir aux paysans, à la nourriture qui deviendrait abondante pour tous... »

Haiti a besoin de l’appui diplomatique de l’Union Africaine afin d’exiger de la France la restitution de ses rapines. Le président de la République, Abdoulaye Wade, a indiqué samedi qu’il envisage de ’’convoquer’’ l’Assemblée nationale du Sénégal ’’en réunion d’urgence’’ au sujet de la situation en Haïti. Ca devrait l’occasion pour notre pays à travers sa représentation nationale d’exprimer solennellement son appui à Haïti pour sa demande de réparation. Cette décision  politique sera à la hauteur des liens historiques inextricables qui lient, notre pays et l’Afrique à cette partie d’Amérique qui est la plus africaine du nouveau monde et participera surement au mouvement de la renaissance africaine.