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Mardi 27 Août, 2019
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Tout récemment le Président de la République Maître Abdoulaye WADE a instruit au conseil des ministres le gouvernement « d’étudier le modalités de rapatriement de certains des dépouilles des dignes fils du pays et de l’entrée symbolique des autres au panthéon ». Forts de cette directive, nous voulons lever un coin de voile sur une des plus illustres figures de notre pays, mais largement méconnue des sénégalais : Yoro Boly Dyâo.
Yoro Boly Dyâo est né à Khouma, une des capitales de l’ancien royaume du Waalo en 1847 et c'est dans même dans cette localité qu'il sera mort et enterré le Jeudi 03 avril 1919.
De par son patronyme (guénio) Dyâo, il appartenait d’après Siré Abas Sow (auteur des célèbres chroniques du Foutasénégalais,) à la plus vieille famille de chef de la vallée du fleuve Sénégal, celle des Dya Ogo, qui y ont introduit la métallurgie du fer et la culture du mil sorgho.
Son père le Tagne Fara Penda Madyao Khor Dyâo , appartenait à l’une des trois lignées matrilinéaires qui permettaient d’accéder au trône du Waalo, celle des Loggar.
De par sa mère Boly Mbodj (Peinda Dieng), Yoro Dyâo appartenait à la famille matrilinéaire Boul et était descendant d’un des plus grands Brack du Waalo, le Brack Ndiack Aram Bakar Mbodj (qui conquit tout le pays wolof au milieu du 18éme siècle). Apres la défaite des troupes de la Linguére Ndatté Yalla devant Nder ,le 25 Février 1855, le gouverneur Faidherbe annexa le Waalo comme possession française et nomma son père Fara Peinda Madyao Khor Dyâo comme chef supérieur du Waalo.
Ce dernier en gage de fidélité à la France, envoya son fils YoroBoly Dyâo à Saint-Louis fréquenter l'Ecole des Otages de 1856 et 1860, faisant partie de la deuxième promotion. Cette école fondée par Faidherbe en 1855 avait pour fonction d’accueillir les fils de rois sénégalais, « des fils de chef » , de les prendre en otage et de leur dispenser une éducation devant faire d’eux des auxiliaires dociles de la colonisation française.
Brillant élève, Yoro Boly Dyâo fut chargé de lire le discours de la sortie de sa promotion.
Promu chef de canton en 1860, il exerça à Khoumaet à Foos. Francophile, il fut un agent zélé de l’administration coloniale et participa activement à la répression de la résistance armée du Prince du Waalo Sidya Ndatté Yalla Diop en 1876.
Après une carrière très mouvementée,faite de révocations, suivies de nominations de Yoro Dyâo finit par obtenir de la France une pension de retraite de mille deux cents francs (1.200) en 1914.
Patriarche, il eut 33 enfants. Il donna en mariage la plus part de ses filles à des princes sénégalais. Beau père du Bourba Alboury Ndiaye ,du Ganket Amadou Makhourédia Diop, des Princes Samba Yomba Mbodj, Diombo Souna Mbodj, Bouna Alboury Ndiaye , Sydy Ngagnesiry Ndiaye, on trouve actuellement beaucoup de ses descendants dans les grandes familles maraboutiques de Touba et de Tivaouane .
Au delà de son parcours politique de collaborateur fidèle et convaincu du système colonial, Yoro Boly Dyâo mérite surtout d’être considéré comme une figure historique sénégalaise des lettres, de par sa contribution inestimable à la connaissance de l’histoire du peuple sénégalais Pour l’Université Cheikh Anta Diop, il demeure la source principale de la tradition écrite historique du peuple wolof.
Des sa sortie de l'Ecole des Otages, Yoro Dyâo fut chargé par l’administration coloniale de rédiger une monographie sur l’histoire des peuples de la Sénégambie. Allié et apparenté de la plus part des cours royales de l’époque ,Yoro Dyâo était bien placé pour recueillir des familles princières et des grands griots de cour de par la tradition orale ,l’histoire des royaumes sénégalais.
Dés 1860 il rédigea un certain nombre de cahiers relatant l’histoire des migrations et des coutumes des royaumes du Cayor, du Baol, du Djoloff et du Waalo. En 1864 Il publia l’histoire de Damels du Cayor dans le journal le Moniteur du Sénégal .Ces cahiers seront commentés et publiés en 1912 par Henri Gaden, dans « légendes et coutumes sénégalaises ».
Un professeur français du Lycée Faidherbe de Saint-Louis Raymond Rousseau publiera et commentera une autre partie des cahiers en 1922 dans « Le Sénégal d’autrefois .Etude sur le Oualo ».
Ces cahiers constituent une part importante du patrimoine historique et culturel du peuple wolof et du Sénégal.
D’après Jean Boulegue , Maître de Conférence à l’université de Paris1 « Yoro Boly Dyâo fut le premier de ces chroniqueurs sénégalais qui ont recueilli, traduit compilé, interprété, aussi les traditions orales de leur peuple » .
Mais l’une des contributions les plus importantes de Yoro Dyâo et qui restent méconnues du grand public reste la thèse de Yoro Dyâo sur l'origine égyptienne des populations sénégambiennes Il déclarait «... vu que l'opinion générale en toute la Sénégambie est que notre contrée doit son peuplement à des migrations de l'Egypte, desquelles descendent toutes ses populations. »
Ces populations seraient parties d’Egypte (Kemet ) par six grandes migrations successives( les Jaa-Oogo ; les Manna ;les Tondions ;les Laam Tourmiss ;les Laam-Termes;les Touri-Singou Laam-Toro).
Yoro Boly Dyâo donna même les noms des Pharaons (qu’il appelle Fari en wolof) sous le règne desquels chacune de ces migrations auraient eu lieu.
Dans une contribution « les migrations entre le Nil et le Sénégal : les jalons de Yoro Dyâo » paru dans les annales de la faculté des lettres et sciences humaines en 1991 Aboubacry Moussa LAM Maître de conférences, Département d’Histoire
Faculté des Lettres & Sciences Humaines de Dakar indiquait que « Dès le début du siècle un sénégalais, du nom de Yoro Dyâo, avait donné sur la question des relations entre l'Egypte ancienne et l'Afrique Noire un éclairage capital, malheureusement resté jusqu'ici inconnu des principaux protagonistes. »
Etant un des premiers hommes de lettre sénégalais d’écriture française, Yoro Boly Dyâo mérite d’être mieux connu des nouvelles générations sénégalaises. Un demi-siècle avant les premières publications de Cheikh Anta Diop, sur l’Egypte pharaonique, Yoro Dyâo avait rédigé ses « cahiers » montrant les liens organiques entre les peuples sénégambiens et de l’Egypte antique.
En attendant que l’homme et son œuvre soient mieux connus des africains et des sénégalais les pouvoirs publics sénégalais devrait lui rendre un hommage en lui donnant des noms d’amphithéâtre d’université, de lycée et d’avenue à Dakar et à Saint -Louis sa capitale régionale .
Amadou Bakhaw DIAW
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