Les orientations d’un philosophe

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  • Article ajouté le : 23 Samedi, 2013 à 15h28
  • Author: babacar diop

Les orientations d’un philosophe

 

   Aujourd’hui, le rédacteur de ces lignes sort quelque peu de l’ornière et s’écarte volontiers des sentiers battus en ne commençant pas son pamphlet par des éloges chantés à la gloire de Souleymane Bachir Diagne, penseur et philosophe émérite qui a su élever très haut la barre, pour terminer mon analyse avec des observations critiques. Les éloges Bachir lui-même n’a en cure et n’en a d’ailleurs pas besoin. Ce ne sont pas les paroles élogieuses et laudatives qui bâtissent la gloire d’une personne et surtout celle d’un philosophe qui, à l’instar de Bachir, a pu s’imposer et imposer sa pensée non seulement dans l’espace cognitif et culturel de son pays, le Sénégal, et celui de son continent, l’Afrique, mais aussi celui du monde entier. Ses prouesses analytiques sont l’œuvre de sa capacité réflexive, mais notamment de sa sincérité dans la pensée et la réflexion.

 

   Ces caractéristiques de son discours l’ont certainement conduit à tâter tous les terrains, à scruter tous les horizons de la pensée pour saisir la vérité et la rendre accessible, grâce à la puissance de ses formules magiques, à ceux qui n’ont pas les mêmes dispositions qu’il possède. Il ne peut être autrement, car le rôle du philosophe, comme l'a vu François Châtelet, philosophe français, est de rendre intelligible ce qui est.

 

     C’es dans cette dynamique que Bacir a élargi ses perspectives et interrogé la pensée de l’Orient après s’être profondément impliqué par celle de l’Occident, qui est d’ailleurs le domaine cognitif où il a fait ses preuves au prime abord. Bachir a opéré un choix judicieux en tournant le dos à la pensée occidentale et à ses spéculations abstraites. Mais l’écueil déplorable dans la méthodologie bachirienne, c’est de réorienter ses efforts de réflexion vers L’Orient lointain et vers ses idéologies aliénantes, paternalistes. La pensée orientale est devenue désormais le champ d’investigation privilégié du philosophe sénégalais. Et l’on ne sait pas jusqu’alors les raisons profondes de cette volte-face. La seule hypothèse que l’on peut avancer pour expliquer ce changement de cap est la volonté discrète chez Bachir de suivre la mode. Suite à l’apparition de divers facteurs, le discours sur l’islamologie est très fleurissant dans le temps présent. Les intellectuels les plus admirés restent encore ceux qui tiennent un tel discours.

 

    Néanmoins, dans l’épistémologie des sciences humaines, il est inacceptable de se débarrasser d’une aliénation pour s’engouffrer dans une autre plus contraignante, plus compacte et plus dense. Celui qui a l’heureuse habitude de lire les œuvres Bachir sait en effet de quoi je parle et à quoi je fais allusion.   

 

    Dans la perspective qui lui est propre en tant que philosophe, Bachir ne peut pas ne pas s’intéresser à la condition humaine de manière globale. Mais les généralités restent toujours floues et ambiguës et sans ancrage réel dans un environnent donné. Pour être en phase avec la réalité environnante, il est nécessaire de suivre une méthodologie plus concrète, plus réaliste. On ne peut pas toujours prêcher dans le désert. La pensée abstraite risque toujours de conduire son homme dans les labyrinthes de la spéculation. C’est l’idée même de Youssouf Ali qui, dans un autre contexte, écrit: « There is no philosophy, no way of life and no religion in the world which expound, from the beginning to the end, everything in the abstract without making any reference to particular cases or concrete examples, for it is simply impossible to build a pattern of life merely in the abstract”. (Il n’y a  ni philosophie, ni style de vie, ni religion dans le monde, qui, du début à la fin, parle de tout dans l’abstraction, sans référence à des cas particuliers ou à des exemples concrets, car il est simplement impossible de construire un modèle de vie dans l’abstraction.)

 

   Bachir devrait se poser préalablement la question de savoir quel est l’impact réel que pourra produire, comme valeur ajoutée, son entreprise pour plus de compréhension de la condition humane en Afrique, avant d’entamer ses investigations sur la pensée de Mohamed Iqbal ou avant d'évoquer à nouveau la tempête soulevée par la publication de « L’avenir de la culture en Egypte », ouvrage à tonalité polémique de Moustafa Abdourraziq. Il faut ajouter que la société égyptienne a connu depuis lors une évolution fulgurante qui fait que le débat en question est largement dépassé par les circonstances et les hommes. Même pour un intellectuel du Proche Orient d’aujourd’hui, l’intérêt réel que peut susciter la relecture de la pensée de Iqbal et celle de « L’avenir de la culture en Egypte » ne va pas au-delà d’une simple curiosité historique. L'homme africain ne porte pour ce sujet qu'un intérêt accidentel. Les arabes eux-mêmes ne se passionnent plus de l'évocation des débats houleux provoqués par la publication de l'ouvrage de Mustapha Abdourraziq.

 

   Nos liens avec l'intelligentsia du Proche Orient sont des liens purement affectifs. Les conditions de vie dans les deux zones sont différentes. On ne se partage pas les mêmes conceptions de la vie. Les uns se horrifient parfois des coutumes des autres. Les uns ne comprennent pas les réactions des autres aux stimuli de l'environnement extérieur. De surcroît, il n'est guère évident que les investigations d'un philosophe de chez nous sur la pensée et la philosophie du Proche Orient, puissent susciter un intérêt réel de part et d'autre.

 

   Aujourd'hui plus que jamais, chaque nation, chaque époque, comme l'a précisé encore Châtelet, se pense comme centrale. L'Afrique noire, il ne faut pas avoir la fausse modestie pour ne pas le dire, a le droit de se considérer comme centre dont le reste du monde constitue la périphérie. Ce n'est pas une donnée évidente que, en parlant du Moyen Orient et de ses idéologies, L'Afrique noire, même islamisée, puisse être concernée de près ou de loin.      

 

   En effet, des penseurs comme Iqbal ont construit une conception du monde, un système d’idées où seul l’homme oriental peut se trouver et trouver son image. Bachir ferait mieux de réorienter exclusivement sa pensée dans cette direction précise: celle du décryptage des signes dans l'espace africain. Tout autre type d'activité verserait dans l'académisme pur.

 

                                            Babacar Diop

 


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Babacar Diop - #1

Les Rédacteurs Du Journal Le Quotidien Doivent Faire Attention. Ceux Qui Envoient Des Contributions Font Du Plagiat. A La Fin De L'article, Il Y A Cette Phrase: "car Son Génie Réflexif, Ses Prouesses Analytique, Sa Sincérité Dans La Réflexion Et La Pensée.." Qu'il A Plagiée De Moi-même Dans Un Article Que J'ai Envoyé à Votre Journal Et Que Vous N'avez Pas Publié, Mais Que Le Site Seneweb A Publié Soleymane B Diagne. Voila Ce Que J'ai écrit Dans Le Dit Article: "ses Prouesses Analytiques Sont L'oeuvre De Sa Capacité Réflexive, Mais Notamment De Sa Sincérité Dans La Pensée Et La Réflexion." Voir: Les Orientations D'un Philosophe, Par Babacar Diop. Seneweb

le Jeudi 26 Décembre, 2013 à 22:58:24RépondreAlerter

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