VOULONS-NOUS UNE ELECTION APAISÉE ? QUE CHACUN JOUE ALORS SA PARTITION

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VOULONS-NOUS UNE ELECTION APAISÉE ? QUE CHACUN JOUE ALORS SA PARTITION

Les périodes pré ou post électorales des années 88, 93 et 2012 symbolisent la capacité regrettable et insoupçonnée des Sénégalais à régurgiter la violence cachée l’on ne sait où dans leur subconscient.  Saccage, pillage, vols, routes barrées et enflammées, édifices publics détruits, archives brulées, et  le comble, l’irréparable et impardonnable, la perte des  vies pour raison de meurtres, d’accidents ou de sacrifices humains,  ont jalonné le chemin vers le fauteuil présidentiel.

A PROPOS DES JOURNALISTES ET DES MÉDIAS

Les mêmes causes donnant les mêmes effets, le peuple sénégalais retient son souffle, hanté par son passé électoral  sombre. L’atmosphère est à la fois électrique et froide à la veille du 24 février 2019. Quand des voix s’élèvent  et menacent  d’agir en réaction face à ce qu’elles appellent des  stratégies d’élimination systématique  de leurs candidats par emprisonnement, exil ou parrainage selon les cas, d’autres appellent à l’apaisement et à la retenue. Nous nous joignons à ces derniers tout en ne partageant pas l’attitude de certains d’entre eux,  qui hier,  soit avaient cautionné et encouragé ces violences, soit étaient les auteurs des écrits et de la parole véridiques et qui aujourd'hui ont brisé leur plume ou préféré le mutisme s’ils ne se sont pas simplement rangés dans le camp des  louangeurs.

Un esprit saint ne peut, pour aucune raison, appeler à la violence qui quand elle s’ébranle, ne l’épargnera pas ou, en tout cas n’épargnera pas ceux qui lui sont chers, surtout pour celui qui se réclame patriote et défenseur de la Nation. Ce qui se passe aujourd’hui chez nous au Sénégal, mérite d’être analysé avec le moins de subjectivisme possible et le maximum d’objectivisme  pour éviter de plonger notre pays dans le chaos, comme c’est le cas un peu partout en Afrique et en Asie.

 Nos journalistes qui sont les tampons naturels entre le peuple et le pouvoir, qui sont aussi les détenteurs et les relais de l’information, figurent à la base des réussites et des échecs démocratiques selon la façon dont ils la traitent et la transmettent aux uns et aux autres. Tout le monde reconnait que si le Sénégal a réussi deux alternances en douze ans, c’est en grande partie grâce à l’abnégation et au professionnalisme des acteurs de la presse écrite et audiovisuelle.

Malheureusement, après l’alternance de 2012, beaucoup d’entre eux ont fait sienne cette victoire du peuple  pour  rejoindre le gouvernement, laissant vierge ou érodé  le siège qu’ils occupaient. Le scénario serait  moins dramatique s’il ne s’agissait que  d’individus qui ont choisi  de troquer  leur robe de journaliste en costume politique. Ils en ont  parfaitement  le droit. Mais ils ont pour la plupart, influencé ou freiné l’élan de la communication démocratique et populaire pour l’orienter au service d’un camp.

La RTS et le journal le Soleil étaient du temps de Senghor, d’Abdou Diouf  et même de Wade  les symboles  de masses-médias partisanes, entièrement dévouées aux services de ceux qui gouvernent. Aujourd’hui, ils semblent  avoir plus de retenue dans le traitement et la diffusion de l’information que beaucoup de structures de la presse privée écrite ou audiovisuelle. Si cette mouvance ne cesse et que les acteurs de la communication qui ont tendance à dévier ou à manipuler l’information  ne revêtent  leurs habits de journalistes professionnels, la campagne électorale risque d’être biaisée.


LES MAÎTRES DU JEU POLITIQUE

Au-delà des journalistes, il y a les vrais maîtres du jeu politique : les cinq candidats retenus, les recalés et les grands électeurs qui ont une influence indéniable sur l’échiquier politique.

Le président de la République Macky Sall, accusé à tort ou à raison par les candidats déchus, joue sa dernière chance pour sortir la tête haute de ces élections, vaincu ou vainqueur. Il n'a certainement pas oublié que s'il est vainqueur des élections de 2012, il le doit à son comportement modèle exempt d’invectives. Les autres candidats opposants doivent aussi se rappeler que si leur résistance d’alors teintée de violences était parvenue à faire basculer le pouvoir, au finish ils n’y avaient pas accédé au profit de du Président Macky au moment où beaucoup parmi eux  étaient favoris devant ce dernier.

Le pouvoir d’alors a appris à ses dépends que la force et l’entêtement n’ont pas empêché sa chute.

Aujourd’hui que nous sommes sur la dernière ligne droite, le Président de la République qui a entre ses mains l'appareil d’Etat, doit le mettre avec transparence au service de la démocratie pour que non pas forcément  le meilleur gagne mais, que celui que la majorité des sénégalais aura choisi, s’installe sans embûches aux commandes du pays.

Un patriote ne dit jamais c’est moi ou rien. La peur de perdre et le désir fou de s’accrocher au pouvoir ouvrent souvent la voie  aux plus folles stratégies qui sont paradoxalement les plus courts chemins pour une fin de règne. L’histoire est là pour le prouver. Celui qui veut gagner avec brio et mériter sa victoire, doit dégager de l’arène tous les partisans et courtisans  susceptibles de brouiller les cartes et faire face à son adversaire avec bien entendu les armes de combat règlementaires. Sinon, il perd sans gloire ou gagne sans convaincre.
Idrissa Seck que les sceptiques  avaient vite exclu,  est  en train de rallumer le flambeau de son destin. Son hibernation  a servi.  Cependant il doit éviter, lui et les chef de partis qui l’ont rejoint en masse, de mener une campagne guerrière  au risque de verser leur  résultat dans le compte de candidats plus modérés comme ce fut le cas en 2012.

Ousmane Sonko l’inattendu et coqueluche des jeunes, va-t-il  réaliser le record de Macky en 2012 c'est-à-dire « dernier venu, premier élu » ? Il  doit s’il veut  y arriver, savoir  raison garder.  Ses modèles dont les discours ont convaincu toute l’Afrique ne sont pas parvenus à leur fin.  La plupart y ont laissé leur vie ou subi la foudre de l’ennemi qui a fini par installer leur pays dans le chaos.  Krumah, Sankara et Cheikhou Touré suffisent  comme exemples. L'Afrique a besoin de leaders patriotes et intègres de la trempe de ceux-là mais qui intègrent  en plus la dimension et la capacité à contourner sans coup férir, les forces du mal que la géographie et la géopolitique imposent à la marche des nations. Ceux qui ont vendu leurs peuples aux colons et ceux qui les ont installés dans la pauvreté pour avoir engagé un combat certes juste mais prématuré ou inégal, ont obtenu le même résultat d’un désastre économique, à la différence que  les derniers cités ont le privilège de garder leur dignité. 

L’avenir nous dira ce que pèsent réellement les candidats-surprises que sont Maître Madické Niang et le professeur Issa Sall.
Aujourd'hui tous les regards scrutent l'attitude que prendra Wade face à cette élection présidentielle, l'unique dont il ne participera pas en tant qu'acteur direct depuis quarante ans. Mais tout le monde est conscient qu'il va peser lourd sur l'issue des joutes même étant sur les gradins. On peut lui reprocher de vouloir exercer un troisième mandat, légitime ou pas mais on ne peut pas lui en vouloir d’avoir dédié un demi-siècle de sa vie  à la cause politique de sa nation jusqu’à s’approcher de l’horizon des cent ans.

  Son Fils Karim définitivement écarté,  beaucoup s'attendent à ce qu'il (Wade)  jette du sable dans le couscous comme disent les Wolof « Xëpp suuf ci cere ji ». 
Non je ne le crois pas.  Même si certains rapportent  qu’il a eu à soutenir la thèse de la résistance ou du sabotage de cette présente élection je ne le voie pas détruire ce qu’il a mis du temps à construire : la démocratie sénégalaise. Qu'on le veuille ou pas Wade est une icône de l'histoire politique du Sénégal et de l'Afrique. En tant que tel, j'imagine mal l’ex-président et symbole de l'opposition sénégalaise, descendre au bas de l'échelle quelles que  soient les manigances et affres subies.

Wade  victime de la loi 80-20.

Cette loi dite de Pareto qui s’applique dans plusieurs domaines, veut que 80 % des effets soient le produit de 20 % des causes. Appliquée à la gestion, elle prouve que les articles qui ne constituent en nombre que 20% du stock d’une usine, représentent en valeur 80%  de ce même stock.

Nous constatons tous que 20%  des habitants détiennent partout  80% des richesses au détriment de 80% de la population qui se partagent les 20% de richesses.

Par contre, ce que nous remarquons rarement, c’est quand les hommes et les femmes réalisent 80% de leurs objectifs et ratent les 20%, ce qui est du reste logique car la perfection n’est pas humaine, le peuple le plus souvent ne retient que les 20% d’échec. Ce fait  explique que nous sommes rarement reconnaissants envers ceux qui nous ont bien  servis. Wade n’a pas échappé à cette règle.

 Cependant, le temps est le meilleur baromètre pour remettre les pendules à l’heure. Il a marqué son époque, forgé ses héritiers politiques et servi son peuple. Nous l’exhortons désormais à laisser Karim se battre seul dans la cour des grands dont  Wade lui-même demeure le maitre incontesté de 80% d’entre-deux.

                                                                                                             RETROUVAILLE ET PARDON

Il est établi que le fauteuil présidentiel est fait pour une seule personne mais rien n’empêche la retrouvaille entre frères qui ont failli s’entretuer ou qui ont causé l’emprisonnement d’un des leurs comme ce fut le cas du prophète Youssouf dit joseph avec ses frangins. A défaut, que chacun respecte la position de l’autre dans le pardon.

Karim peut bien s’abstenir de rentrer durant ces élections pour jouer sa partition de la paix sociale et ne pas ajouter dans la confusion. Cette attitude à notre avis relève de la sagesse. S’il débarque malgré tout, qu’il garde alors le silence et que le pouvoir s’abstienne de l’arrêter.

Le Président Abdoulaye Wade quant à lui, recevra tôt ou tard de la Nation les honneurs qu’il mérite en dépit de ses erreurs qui relèvent de l’imperfection de la nature humaine. Ailleurs, d’autres leaders ont réalisé  cette loi à l’inverse c'est-à-dire 20% de réussite pour 80% d’échecs et  pourtant ils ont été plébiscités.

La paix avant, pendant et après les élections passe immanquablement par le respect rigoureux par  tous les acteurs, candidats, alliés, électeurs ou citoyens de tout bord,  de la chose publique, des affaires privées mais aussi de l’opinion et du  choix des autres  tant qu’ils n’entravent pas l’intérêt national. Que chacun déroule sa campagne sans entraver celles des autres et que des urnes sortent des résultats fiables acceptés par tous. Exprimons nos sentiments et nos suffrages tout en gardant à l’esprit que c’est Dieu qui donne le pouvoir à qui il veut  et le retire quand il le veut.      

                                                                                                                                                                                Cheikh Bamba Dioum

                                                                                                                                                                [email protected]


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