Senghor, Wade et la laïcité

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Senghor, Wade et la laïcité

Senghor, Wade et la laïcité

Dans le dictionnaire on peut noter que l’adjectif laïc désigne, ce qui n’est pas ecclésiastique, ce qui n’est pas religieux. Cette définition montre que le mot a évolué. En effet dans le vocabulaire de l’Eglise catholique par exemple, laïc s’oppose à clerc dans le cadre d’une même religion.

Le modèle de laïcité du Sénégal doit beaucoup à Léopold Sédar Senghor. Académicien, théoricien (avec Césaire) de la Négritude et surtout premier président du pays. Dès l’indépendance, Senghor, pourtant nourri aux mamelles du républicanisme à la française (ministre et ancien député en France), s’en écarte. À l’inauguration de la mosquée de Touba en 1962, (dans d’autres sources 7 juin 1963), il dénonce « une confusion entre la laïcité donc le respect des croyances, de toutes les croyances, telle que stipulé dans la constitution Sénégalaise et le laïcisme qui n’est plus qu’un moyen de propagande électorale déjà usé, même dans la métropole ».

L’État participe à la vie religieuse, en finançant ses activités avec un constant souci d’équilibre entre les différentes communautés. Ancien séminariste à la tête d’un pays essentiellement musulman, Senghor est soutenu par les guides religieux. Ils seront son rempart le plus sûr contre tous les extrémismes. La volonté politique du président n’explique pas tout. Le modèle sénégalais trouve ses racines dans l’histoire du pays.

Chez certains musulmans,  le fait de prendre conscience que l’islam tel qu’on le pratiquait au Moyen-Orient ne pouvait être transposé tel quel, explique Étienne Smith, chercheur. Ceux là  ont pris en compte les valeurs de sociabilité préislamiques. Ce qui est frappant, c’est ce sentiment de légitimité : “Notre islam à nous n’est pas moins légitime que celui de la Mecque. Nous ne sommes pas moins musulmans que les autres”. »

Cet islam laïc est l’un des fondements de la « cohabitation heureuse », selon la célèbre formule du premier archevêque du pays, feu Monseigneur Hyacinth Thiandoum. Il est courant de voir chrétiens et musulmans dans une même famille. La religion est vécue en commun. De plus, le calendrier républicain consacre toutes les fêtes religieuses.

Il n’est pas rare de voir au Sénégal un musulman qui accompagne ses petits-fils catholiques à la messe, un musulman amener en véhicule sa femme catholique à l’église. L’église est pour tout le monde avait une fois rappelé l’abbé Moïse Diatta sortant de sa messe dominicale. Le clergé catholique a toujours été proche des marabouts. L’abbé Jacques Seck incarne cette proximité. Étonnant personnage, il est une figure morale du pays allant même jusqu’à prêcher avec des versets du Coran. « Il faut connaître l’autre pour mieux l’accepter ». Il se définit d’ailleurs comme « prêtre musulman, imam catholique ». Et il est loin d’être une exception. Au grand séminaire de Sébikhotane, les futurs prêtres étudient le Coran.

Défendant son monument de la renaissance, Abdoulaye Wade en 2009 déclaraient "qu'ils (les chrétiens) adorent Jésus-Christ, qui n'est pas dieu". Ce qui d'ailleurs l'avait poussé à s'excuser par la suite. Mais vous convenez avec moi que Senghor ne l’aurait guère fait à l’endroit des musulmans. Eléments d'ouverture du peuple, des musulmans sénégalais ont apporté leur soutient à la communauté chrétienne.

Du point de vue étatique, la classe politique, et surtout par la personne d'Abdoulaye Wade, a des liens forts avec les marabouts sénégalais, qu'il soutient financièrement et qui sont un préalable à sa présidentiabilité. De ce fait, peut-on parler de laïcité quand le soutient à une partie de la communauté religieuse est un pré requis au pouvoir ? En Janvier dernier, pour répondre à ceux qui le mettaient en garde contre les révolutions tunisiennes et égyptiennes, il tenait les propos suivants : «ceux qui pensent que cela peut m’arriver rêvent. Ils sont des méchants et des jaloux. Mais qu’ils sachent que mes marabouts sont plus forts que les leurs».

L’œuvre politique de Senghor, retrace son admirable itinéraire et commente ses multiples réalisations. Ses qualités, ses vertus et son génie politique, seul, livré à lui même, il n’aurait pu réaliser ce qu’il a accompli s’il n’avait pas eu un soubassement mystique puissant, un levier hors du commun sur lequel il a pu s’appuyer à tout moment. Ce soubassement mystique puissant, ce levier hors du commun, c’était El Hadj Falilou MBACKE.

Parler de Léopold Sédar Senghor sans parler d’El Hadj Falilou MBACKE c’est escamoter l’histoire ; c’est vouloir décrire l’arbre sans parler des racines. Pour rappel, la Mosquée de TOUBA, fut construite pierre par pierre, par la sueur et le labeur des mourides, avec Senghor à leur coté, fut inaugurée le 7 juin 1963 par El Hadj Falilou MBACKE, en présence de ce dernier. Le plus grand mérite de Senghor, sa chance exceptionnelle, c’était quelque part d’avoir décelé très tôt, avant les autres hommes politiques de son temps, la puissance spirituelle inouïe d’El Hadj Falilou MBACKE et s’être dès lors blotti sous son aile protectrice.

Au lendemain de sa, première élection à la présidence de la république, El Hadj Falilou MBACKE avait dit à Senghor, textuellement :"Vous resterez au pouvoir tant que vous voudrez ; vous le quitterez quand vous voudrez ; vous le remettrez à qui vous voudrez. Et durant tout votre magistère, vous ne serez victime ni de coup d’état, ni d’assassinat, ni de destitution".

Senghor a été le premier chef d’état africain à quitter le pouvoir de son propre gré. Certains de ses pairs l’ont ensuite imité, mais tous n’ont pas eu la même fin heureuse.

Wade notre président, Senghor avait choisi un remplaçant remplacé, il vous appartient vous de gérer la suite du match entamé et coatché pas lui.


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