Faut-il interdire le port du voile intégral ?

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Faut-il interdire le port du voile intégral ?

Selon le professeur émérite, Robert Misrahi, ‘‘Exister, pour un être humain, c’est par essence être libre (dans la dépendance ou l’indépendance) et pouvoir agir pour un « monde meilleur », c’est-à-dire pour une liberté heureuse et un désir accompli.’’[La liberté ou le pouvoir de créer, éd. Autrement, Paris, 2015, P.15.]

C’est tout l’enjeu de la question du port du voile intégral pour nos sœurs de culture musulmane. Or, l’expérience du port du voile intégral est pour certaines d’entre elles historiquement et culturellement authentique, éminemment sérieuse pour d’autres et douloureuse voire terriblement douloureuse pour d’autres encore.

Il s’agit en réalité d’une expérience de dépendance à un système, ou plutôt à une culture, la culture musulmane. D’aucuns préféreront certainement le terme de religion à celui de culture. Soit ! Il conviendrait cependant de nous entendre sur cette notion d’expérience de dépendance, qui est, ici, celle de femmes manifestement libres dans leur rapport à leur culture ou religion. Ce qui fait que des femmes voilées, intégralement ou non, peuvent se révéler des pionnières dans la défense, contre vents et marrées, de la liberté du port du voile intégral.

Aussi est-ce précisément pour cela, et notamment par égard pour les femmes qui ont fait ce choix et par respect pour leur liberté (présumée ou réelle), que nous sommes unanimes pour nous interdire d’assimiler – soit par le verbe, soit par quelque discours à la sémantique approximative – le voile intégral à la cagoule, quoique tous deux aient une même finalité factuelle : dissimuler intégralement, le corps de la tête aux pieds pour le premier, et seulement la tête pour la seconde.

Cette fonction de l’un et de l’autre, du point de vue de sa finalité, a ceci de particulièrement préoccupant de nos jours, en ce que, hélas, des groupes terroristes font littéralement passer le voile intégral pour une cagoule dans leurs opérations de terreur.

Pouvoir ou devoir y faire face, sans faiblesse mais dans le respect des libertés, de toutes les libertés. Voilà donc une redoutable gageure.

J’ai écouté, et peut-être entendu, avec émotion, le point de vue du président Macky Sall sur la problématique du port du voile intégral, lors du 2ème Forum international sur la paix et la sécurité tenu à Dakar du 9 au 10 novembre 2015 ; lequel point de vue fut immédiatement traduit par certaine opinion comme un décret tendant à interdire le port du voile intégral au nom de la sécurité publique. Je l’ai écouté et peut-être entendu, dis-je, mais je me suis dit aussitôt que j’ai dû louper un épisode relatif à cette affaire. Sinon comment comprendre que ce qui passe pour un cri de détresse de la part du président Macky Sall n’ait pas été précédé, par exemple, par un conseil « présidentiel » consacré à cette question du port du voile intégral ? Un conseil « présidentiel » qui eût été en l’occurrence l’occasion heureuse pour le chef de l’Etat de rassembler toutes les voix autorisées du pays.

Quoi qu’il en soit, gageons qu’il n’est pas trop tard pour « bien » faire, c’est-à-dire, ici, pour croire au génie sénégalais et, en l’espèce, au génie des autorités sénégalaises en Islam et à celui non moins génial des Eglises sénégalaises. Oui, la conjugaison fécondante de ces génies, au Sénégal, pourrait sûrement aider à trouver une bonne réponse, certainement la meilleure du moment, à la légitime préoccupation du président Macky Sall.

Dakar, le 11 novembre 2015.

Jean-Marie François BIAGUI

Président du Mouvement pour le Fédéralisme

et la Démocratie Constitutionnels (MFDC-fédéraliste)


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