Où l’on découvre ce que la démocratie n’est pas

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Où l’on découvre ce que la démocratie n’est pas

Trente-cinq (35) ans de guerre en Casamance, et nous nous en accommodons, imperturbablement, quoique nous nous voulions des démocrates, dans un îlot de démocratie « apaisée ». Ceci est un premier acte, tandis qu’un second acte, quant à lui, veut que les challengers politiques réputés sérieux, dangereux pour le pouvoir, soient systématiquement disqualifiés par l’arbitraire. Et tout cela de s’avérer une banalité au Sénégal, où il apparait, du reste, que le « crime » en la matière ne profite pas toujours, ni seulement, au bourreau, mais quelque fois même aux concurrents intimes, dans l’opposition, des personnes embastillées. Et tout cela, donc, de sembler aller de soi sous nos cieux. Sinon comment comprendre… ?

Comment comprendre, en effet, que l’opposition accepte de participer aux élections législatives du 30 juillet 2017, alors même que l’une de ses têtes de file, le Maire de Dakar Ababacar Khalifa Sall, croupit en prison par la seule volonté du pouvoir ? Le rêve de « cohabitation » d’avec celui-ci, à l’issue de ces Législatives, peut-il valoir le maintien arbitraire en prison du Maire de Dakar ? Sauf à faire de ce dernier la tête de liste de toute l’opposition, toutes obédiences confondues, lors desdites Législatives, l’éthique en politique ne commande-t-elle pas ici de défier le pouvoir, notamment par le boycott général (qui emporte ici notre préférence), les manifestations et autres actions et moyens légaux ? Et ce, jusqu’à la capitulation du pouvoir ?

Imaginons, en effet, un scrutin qui ne convoque que les seuls candidats du pouvoir ! Oui imaginons cela, mais le penser, en son temps, eût certainement été, déjà, agir, ou, à tout le moins, agir à bon escient. C’eût été assurément une formidable occasion de sublimer ce que l’esprit produit de plus élevé et de plus achevé : La Liberté.

Or, nonobstant la mauvaise organisation des Législatives du 30 juillet 2017 et les manquements constatés lors du scrutin, l’opposition dans sa globalité les a littéralement perdues. Du fait précisément et principalement de son refus d’unité et de sa désorganisation voire de son caractère éminemment déstructuré. Qui plus est, l’opposition a opté pour la pratique géométrique de la démocratie, étant entendu qu’avec une telle option l’on n’est déjà plus dans la démocratie, et le pouvoir pour sa part nous a appris, in fine, qu’il savait pratiquer comme jamais les mathématiques, arguant au passage, avec une habileté rare, et à dessein, qu’il ne serait plus possible de manipuler le moindre résultat électoral au Sénégal.

Gageons, tout à propos, avec toutefois le doux espoir de nous tromper (pour partie tout au moins, car nous exigeons, dès le premier jour, la libération inconditionnelle de Monsieur Ababacar Khalifa Sall), qu’il en sera de même lors de la prochaine élection présidentielle prévue en 2019, si l’on sait, cependant, que le Président Macky Sall n’hésitera plus, au regard de la nouvelle donne, à élargir le Maire de Dakar, non pas par pure magnanimité, mais bien au contraire pour achever l’opposition, qui n’aura guère manqué d’aligner, pour ladite Présidentielle, autant de candidats que de leaders émergés.

La démocratie sénégalaise, tout le monde en convient, est chahutée, dangereusement chahutée ; et la dernière compétition électorale littéralement faussée, non pas par la mauvaise qualité du fichier électoral, ni par les nombreux couacs notés dans la distribution des cartes d’électeurs, mais avec l’arrestation arbitraire et l’embastillement du Maire de Dakar Ababacar Khalifa Sall.

Au lieu donc de s’intéresser de manière sincère à cette vérité de fait, c'est-à-dire à cette vérité incontestable, pour devoir agir en conséquence, l’opposition s’est plutôt évertuée à s’occuper inutilement des conséquences possibles ou probables de cette dernière, qu’elle entrevoyait d’ailleurs ingénument comme nécessairement défavorables au pouvoir. Ce faisant, elle se tirait une balle dans le pied, à moins que ce ne fût dans la tête.

Abdiquer la liberté de l’autre, fût-il notre concurrent le plus intime, quelles que soient par ailleurs nos motivations, c’est déjà abdiquer, non seulement notre propre liberté, mais tout ce qui en dépend. C’est en l’espèce, et à l’évidence, ce que l’opposition a fait, pour son grand malheur, dans sa gestion calamiteuse de « l’affaire Ababacar Khalifa Sall ».

Dakar, le 6 août 2017.

Jean-Marie François BIAGUI

Président du Parti Social-Fédéraliste (PSF)


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