Pour un régime sous tutelle en Gambie

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Pour un régime sous tutelle en Gambie

Après l’intervention militaire de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) en Gambie, nous préconisons fortement sa « mise sous tutelle », autre synonyme possible de « SAV » (pour « service après vente »), en ces moments de toutes les incertitudes, dans une zone de forte turbulence, la Gambie post-Jammeh, où il plaira aux uns d’établir une litanie de crimes, de vices, de fautes et de lâchetés imputables à Yayha Jammeh, et aux autres de témoigner au contraire de sa probité, de sa générosité, de son courage, de son patriotisme et de son (pan)africanisme.

En tous les cas, dans les faits, nous y sommes, ou presque, depuis ce vendredi 20 janvier 2017, date du départ annoncé du président Yahya Jammeh du pouvoir. Même si tout cela se passe dans un milieu, le nôtre, où, manifestement, nous croyons devoir laisser la pensée, la réflexion, c'est-à-dire la raison, aux autres, pour nous laisser guider seulement par l’émotion tout au long de la gestion de la crise postélectorale en Gambie. Aucun segment de notre société n’y échappe.

Cependant, quoique gagnés, submergés même par cette émotion que le président Senghor aurait peut-être qualifiée de « nègre », n’ayons guère pitié du désormais président de la République gambienne, Adama Barrow, mais plaignons-le, abondamment.

C’est que le nouveau chef de l’Etat, en tant que chef de l’armée, va très rapidement et immanquablement se rendre compte que la Gambie n’a pas d’armée, mais une milice, ou une couvée de milices ; et que celui qui passait pour le chef d’Etat-major de l’armée, Ousman Badjie, dont Adama Barrow à peine élu disait qu’il lui avait fait allégeance (tout le monde a dû voir la suite), n’était en réalité que le chef désigné de l’une d’elles.

La Gambie ne dispose pas non plus d’une police nationale, du moins dans son acception la plus noble.

Aussi, à la lumière de ce qui précède, peut-être faudrait-il, ici, que nous nous efforcions de nous affranchir de nos émotions primaires. Nous comprendrions alors, certainement, que la Gambie a besoin, plus que jamais, d’être assistée sur tous les plans ; et que le « SAV » de la CEDEAO en Gambie – si elle était conséquente avec elle-même suite à son extraordinaire démonstration de forces ayant contraint le désormais ex-homme fort de Banjul à capituler – ne peut en l’occurrence que consister en une « mise sous tutelle » sous-régionale (ou régionale voire internationale) de la Gambie. Et ce, aussi longtemps que nécessaire. Au moins durant la période de transition (3 ans) que le nouveau président de la République s’est lui-même impartie.

Et tant pis, si la fibre nationaliste primaire venait à refaire surface là-bas, notamment pour accuser le Sénégal de velléités colonialistes.

Il s’y ajoute, c’est un euphémisme, que la Gambie n’est pas une démocratie, tandis que ses institutions, celles qui existent à tout le moins, sont toutes exsangues.

Alors, pas de scrupules, Mesdames et Messieurs les chefs d’Etat de la CEDEAO ! Raccompagnez jusqu’à Banjul le nouveau président de la République gambienne ; installez-le à State House ; mais maintenez-y vos forces armées et de sécurité le plus longtemps possible, non seulement pour assurer sa sécurité, mais également pour y préserver la paix et la stabilité, tout en contraignant le nouveau pouvoir et la nouvelle opposition à l’apprentissage, certes éprouvant mais nécessaire, de la politique et surtout de la démocratie ; tâchez d’y trouver en même temps, nous vous en conjurons, le formidable prétexte de vous souvenir et de vous familiariser avec le ‘‘problème sénégalo-bissauguinéo-gambien en Casamance’’.

Oui, appropriez-vous ce douloureux problème plus que tri-décennal (plus de 34 ans de conflit en Casamance). La paix dans la Sous-région en vaut la chandelle.

Dakar, le 22 janvier 2017.

Jean-Marie François BIAGUI

Président du Parti Social-Fédéraliste (PSF)


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