PLACE DU SECTEUR PRIVÉ DANS LA COUVERTURE DU RISQUE MALADIE

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  • Article ajouté le : 24 Lundi, 2021 à 14h05
  • Author: Nioxor TINE

PLACE DU SECTEUR PRIVÉ DANS LA COUVERTURE DU RISQUE MALADIE

Dans notre pays et plus généralement en Afrique noire, la gestion de la santé des populations relevait, dans le passé, de la médecine traditionnelle. 

Durant la période coloniale, on assista à l’introduction progressive de la médecine moderne par le biais de structures militaires ou confessionnelles avec pour objectifs essentiels la lutte contre les maladies transmissibles, incluant le contrôle des endémies, ainsi que la protection maternelle et infantile. 

Depuis l’accession de nos pays à l’indépendance et devant les énormes difficultés rencontrées par les autorités des pays à faibles revenus à prendre en charge correctement les problèmes sanitaires de l’ensemble de population, il y eut un souci constant de renforcement de l’équité par l’implication des communautés telle que préconisée par la conférence d’Alma-Ata sur les soins de santé primaires de 1978. 

Au début des années 80, les secteurs sociaux, dont celui de la santé, allaient pâtir, de la contre-offensive ultra-libérale, à un moment où les officines financières internationales (FMI, BM), encourageaient les gouvernements africains, à promouvoir le développement de la médecine libérale.

Les mutations au sein du secteur de la Santé induites par le développement de la médecine privée allaient se traduire par des difficultés croissantes d’accès aux soins. 

Il faut reconnaître que, dans nos pays, le secteur public doit demeurer la locomotive du système sanitaire, ayant à ses côtés, un secteur privé venant en appoint dans la mise en œuvre d’une politique sanitaire globale définie par les autorités gouvernementales.

PRÉALABLES

Pour que cette exigence ne reste pas un vœu pieux, il faudrait que certains préalables soient satisfaits :

- Le système public de soins doit être fort et bénéficier de la confiance des citoyens, ce qui suppose des ressources humaines, financières et matérielles de qualité,

- L’État doit jour son rôle de régulation pour empêcher l’intrusion de logiques mercantilistes au sein des hôpitaux, centres de santé et postes de santé publics,

- L’État doit garantir l’équité en rendant les soins de santé géographiquement et financièrement accessibles,

- Les structures privées doivent faire l’objet de procédures d’accréditation pour la satisfaction de normes de qualité minimales et bénéficier de supervisions régulières

RATIONALISATION DES SOINS

Il faudrait également procéder à la rationalisation de la prise en charge sanitaire.

Elle est indispensable à cause de l’impossibilité pour notre système sanitaire déjà très mal en point de sortir victorieux de la bataille contre la maladie. Notre statut de pays à faibles revenus devrait nous imposer d’adhérer aux stratégies préventives et promotionnelles.

Il devient, en effet, de plus en plus évident que les professionnels de santé font face à une recrudescence des complications des maladies non transmissibles, communément désignées sous le vocable de « maladies à soins coûteux ». 

On peut notamment citer l'insuffisance rénale chronique, la maladie coronarienne pouvant aller jusqu’à l’infarctus du myocarde, les accidents vasculaires cérébraux, les cancers ...

Pour faire face à cette transition épidémiologique où les infections transmissibles sont de plus en plus éclipsées par les maladies chroniques, il est impératif, que sur toute l’étendue du territoire national, les populations puissent avoir accès à des services de prévention, de dépistage et de prise en charge précoce des pathologies les plus fréquentes pour réduire significativement le nombre de cas nécessitant une prise en charge de niveau tertiaire.

 La carte sanitaire établie par les autorités gouvernementales, en rapport avec les collectivités territoriales, devrait définir l’organisation de l’offre de soins aussi bien publique que privée.

Dans le même sens, l’acquisition d’équipements notamment ceux dits "lourds", devrait être soumise à une procédure renforcée d’autorisation, en vue d’un maillage pertinent et cohérent du territoire national, qui aille au-delà de logiques purement commerciales.

C’est ainsi que les autorités sanitaires devraient inciter les structures (para)médicales privées à ne pas se cantonner aux seules activités curatives mais à s’impliquer dans la mise en œuvre des autres programmes de santé nationaux à visée préventive et promotionnelle.

RÉFORMES NÉCESSAIRES

Il y a également lieu de procéder à des réformes du système de protection sociale

La protection sociale, en plus d’atténuer les inégalités d’accès aux soins, peut permettre aux ménages d’accéder plus facilement aux soins de santé primaires surtout ceux promotionnels et préventifs moins coûteux, notamment les suivants :

-   nutrition, pesées, vaccinations chez les enfants

-   prévention des grossesses non désirées ou précoces, des IST..., chez les adolescents,

- suivi pré- et postnatal, espacement des naissances, lutte contre la stérilité, gestion de la ménopause, dépistage de cancers... chez les femmes,

- prévention des maladies chroniques chez les personnes âgées, qui paradoxalement semblent être les exclus du système, surtout ceux relevant de l’IPRES. 

QUELQUES PROPOSITIONS

C’est pourquoi, nous faisons les quelques propositions suivantes, loin d’être exhaustives :

-  Revaloriser la prime annuelle de la CMU pour une meilleure qualité des soins,

-  Promouvoir la signature de conventions entre mutuelles de santé et structures médicales privées,

- Favoriser la mise en place d’une tarification forfaitaire au profit des couches vulnérables (enfants, femmes enceintes, personnes âgées) 

- Favoriser l’accessibilité financière dans les structures médicales privées au profit des personnes non prises en compte par l’assurance médicale obligatoire (ascendants du 1er degré jeunes adolescents majeurs mais encore dépendants),

- Promouvoir le système des mutuelles complémentaires,

- Mettre en place un système de certification et de contrôle des structures médicales privées,

- Promouvoir la collaboration entre cadres médicaux et paramédicaux et œuvrer progressivement à la fusion de structures médicales et paramédicales

- Respecter le droit des travailleurs à l’assurance médicale, en veillant à la mise en place des institutions de prévoyance maladie dans les entreprises, 

- Respecter les normes de couverture (IPM obligatoire pour toute entreprise comportant au moins 100 travailleurs ou obligation d’adhérer à une IPM déjà existante ou de se regrouper au sein d’une IPM interentreprises),

- Corriger, le cas échéant, les problèmes de gouvernance et de gestion des IPM, (implication des membres adhérents, transparence, contrôle effectif...)

-  Instaurer une compétition loyale et éviter les pratiques de rabattage de clientèles,

- Combattre les fraudes à l’assurance (bénéficiaires clandestins, revente des médicaments, fausses prescriptions) 

- Plaider pour la signature de conventions entre l’IPRES et les cabinets, cliniques, structures d’aide au diagnostic privés se trouvant dans les quartiers

CONCLUSION

L’évolution de la demande de soins, qui devient de plus en plus complexe, exige une meilleure coordination non seulement entre les santés humaine et animale, mais aussi entre les secteurs public et privé au profit du plus grand nombre.

C’est dans ce sens qu’il devient impératif de concilier l’aspect lucratif de la médecine privée avec l’exigence du service public.

Dr Mohamed Lamine LY

Cabinet médical Sancombao

Grand-mbao

[email protected]



Source: 

https://www.nioxor.com/2021/05/l-apport-du-secteur-prive-a-la-couverture-du-risque-maladie.html

 


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