De ce que la victoire en sport est un état d\'esprit : Toujours battus, mais toujours satisfaits !

Blogs

De ce que la victoire en sport est un état d\'esprit : Toujours battus, mais toujours satisfaits !

 

Pourquoi les équipes sud-américaines sont mentalement plus solides que les nôtres ?

Le sport est un fait culturel, il est cependant tributaire d’un état d’esprit comme toute activité humaine. Les séquelles mentales de la colonisation sont parfois tellement robustes qu’elles entraînent un complexe d’infériorité. Nos joueurs sont toujours moins performants que les joueurs sud-américains dans les matches de la coupe du monde. Tout le monde dira que c’est normal car les infrastructures sportives ainsi que la vision et la politique sportives ne sont pas les mêmes. En effet, les moyens financiers et infrastructurels des pays sud-américains sont incommensurables à ceux des pays africains. Mais cet argument pourrait être invalidé par la comparaison entre les pays nord-américains et ceux du sud : le CANADA et les États-Unis ont des moyens et des infrastructures, mais en football ils ne pèsent rien devant les pays sud-américains. C’est la culture sportive qui fait la différence ici. Le retard économique n’explique pas toujours la contre-performance de nos pays dans les compétitions internationales. Et si l’on scrutait du côté psychologique ou mental pour dénicher les raisons de nos contre-performances ?

 

Il faut dire que les pays latinos sont ordinairement d’obédience révolutionnaire, des pays qui ont toujours contesté la suprématie occidentale.  A l’inverse nos pays ont malheureusement connu une succession de Présidents dociles, toujours à la recherche anxieuse de la reconnaissance de leur homologues occidentaux. Nos politiques économiques, nos institutions politiques, notre culture démocratique et nos projets sportifs sont les pâles copies de ceux proposés par l’ancienne puissance coloniale. Il y a un ascendant psychologique des chefs d’État occidentaux sur nos présidents : or puisque les dirigeants charrient souvent leurs  âme sur le peuple, il y a de fortes chances que cet ascendant psychologique soit contagieux. Cela pose encore le problème de la nécessité pour nos sportifs d’être encadrés par des psychologues et des anthropologues de métier et non pas seulement par des techniciens du sport ayant appris ces sciences humaines.

 

L’équipe de Guinée des années postindépendance était conquérante parce qu’elle était surmotivée sur le plan mental. L’idéologie révolutionnaire de Sékou Touré avait imprégné tous les secteurs de la vie sociale du pays. Malheureusement, la motivation psychologique ne suffit pas dans le sport et notamment dans celui de masse : les moyens doivent suivre, mais la liberté aussi. Le sport ne peut pas se développer pleinement dans une société totalitariste : on a connu une équipe nationale soviétique très conquérante, très difficile à battre, mais dont la technicité était affaiblie par l’absence de liberté. En effet, dans tous les domaines, la créativité et la liberté de penser sont fondamentales : c’est le débat qui fait avancer la science et la démocratie. Si le football est si universel, c'est d'bord parce qu'il est rationnel. L'irrationnel ne peut opérer durablement dans ce sport. Les pays qui ont réussi à allier démocratie et ferveur patriotique sont des pays où le sport est une affaire d’honneur pour la patrie. Il ne s’agit pas d’en faire une affaire d’État, ce qui, bien évidemment, étouffe toute forme de discussion et d’initiative originale. Il s’agit plutôt de cultiver le patriotisme dans le sport : il faut apprendre aux jeunes sportifs le culte de la victoire non pas seulement pour soi, mais pour ses parents, ses amis et, au-delà de tout cela, pour la patrie.

 

Même dans le sport UASSU, la culture de la gagne doit être un dogme, une chose sacrée.  Sous ce rapport, le sport, la citoyenneté, l’économique et le politique sont indissociables. Tant que nos jeunes ne seront pas formés pour ne pas redoubler en classe, pour ne pas perdre et faire perdre la classe, l’école, la région et le pays, ils continueront à faire du sport un simple loisir ou, plus grave encore, un gagne-pain. Nombreux sont nos compatriotes qui n’ont de souci que pour l’émergence personnelle : le destin de la communauté ne les préoccupe guère. Il faut qu’on travaille à faire du civisme et du patriotisme les moteurs de notre développement individuel et collectif.

 

Le sport est levier, un levain de moralité, un excellent moyen d’inculquer aux jeunes le civisme et le patriotisme, car la meilleure façon de fixer les forces psychiques et mentales d’un jeune, c’est de passer par ce qui les fait vibrer. Il y a des sensations, des émotions, une symbiose que seul le sport permet. C’est donc une occasion à saisir pour forger le caractère des jeunes : la ferveur sportive est, encore une fois, un excellent stimulant d’engagement patriotique. Le sport se nourrit de motivation et de passion positive, il ne doit donc pas être considéré comme un simple loisir, il ne peut être laissé à la contingence de la politique politicienne et à l’amateurisme.

 

Nous sommes dans des pays très pauvres, c’est vrai, mais ce n’est pas une raison pour se morfondre dans le misérabilisme du résultat : il faut éviter d’inculquer aux jeunes la culture de la défaite et du fatalisme. Chaque fois que nos équipes nationales se font éliminer prématurément dans les compétitions internationales, on embouche la trompette du défaitisme : « la prochaine fois sera la bonne », « c’est la loi du sport », « nous étions partis pour apprendre ». C’est exactement ce que l’on appelle la morale des faibles : on ne va pas dans les grandes compétions pours apprendre. Les phases éliminatoires sont suffisantes pour apprendre. La Grèce a remporté la coupe d’Europe alors qu’elle était l’invitée surprise !

 

Alassane K. KITANE

Professeur au Lycée Serigne Ahmadou Ndack Seck de Thiès

Président du Mouvement citoyen LABEL-Sénégal

Membre de la commission Programme et stratégies de l’IPC/FIPPU


Cette entrée a été publiée dans Politique. Vous pouvez la mettre en favoris avec ce permalien. Alerter

Vous pouvez lire aussi

Commentez cet article

Pseudo *

Votre commentaire :

Pseudo *

Mon commentaire *