Le Blogs de : alassane kitane

Dans une publication prémonitoire datée du mois de Janvier intitulée "Sommes-nous dans une société bloquée", je m'inspirais déjà de l'éminent Sociologue français Michel Crozier en s'interrogeant sur les vraies raisons d'une "société bloquée" tellement la haine, le rejet, le repli identitaire, l'intolérance, l'ignorance, l'instrumentalisation du religieux et de l'ethnicisme, l'effritement des valeurs de la république et la déliquescence de l'union sacrée ont hélas pris des proportions dangereuses. Naturellement et incontestablement :"Quand la mesure est dépassée il n'ya plus de limites" (Marc Aurèle).

J'avais l'intime conviction et je le pense toujours que notre chère république s'est hélas enlisée profondément dans les méandres de la haine aveugle, de la violence gratuite, de l'incivisme chronique et de l'indiscipline notoire. Voilà pourquoi je demeure fondamentalement convaincu comme Henri Bergson qu'il faut : "insuffler un supplément d'âme" à cette société devenue hideusement méconnaissable où l'on se délecte quotidiennement de vulgaires insultes et de propos choquants et avilissants dans un langage ordurier volant très bas au ras des pâquerettes.

Je crois qu'il serait long et très fastidieux de revenir sur tout ce que notre pays a traversé comme épreuve dans ses pages les plus sombres qui par ricochet a provoqué : "un véritable déraisonnement de l'être" (pour reprendre Martin Heidegger) tout en réveillant aussi : "les démons aux éruptions tapageuses et infernales" (Alexis de Tocqueville).

Comme beaucoup de sénégalais, je partage entièrement l'amer constat fait par Théodore Ndiaye dans son livre intitulé "Quel Sénégal pour demain" que :  "Notre démocratie est malade de ses dérives et son avenir dépendra de notre capacité à rejeter sans complaisance toutes les démarches ou idées voulant remettre en cause la République".

Jadis bâtie sur des socles solides, notre république est aujourd'hui en train de s'affaisser et de s'effriter lentement sous notre regard impuissant et complice.

Voilà pourquoi j'appelle tous les républicains épris de justice sociale, de paix, d'harmonie et du vivre ensemble à un véritable sursaut patriotique car "Ce n'est pas parce qu'on est convaincu les choses sont sans espoir qu'il faut renoncer à vouloir les changer" dixit Scott Fitzgerald.

C'est surtout dans cette même dynamique que j'appelle la jeunesse avenir de ce pays qu'elle doit éviter de tomber dans la culture de la médiocrité, de la dissipation et de la violence (physique ou verbale). La jeunesse sénégalaise doit être consciente que c'est la somme de leur ambition qui fera l'essor d'un Sénégal prospère et rayonnant. Elle doit refuser de raisonner comme certains fatalistes à souhait qui se prennent déjà pour une génération sacrifiée et pensent victimes d'un "faux départ" et ce "défaut de ligne droite" (Gustave Flaubert dans son livre intitulé L'éducation sentimentale).

En guise de clausule, je tiens à appeler les autorités politiques (le pouvoir tout comme l'opposition) à un sursaut patriotique pour panser ce désamour et cette impopularité, au culte du travail et à l'exemplarité pour enfin hisser notre pays au sommet. C'est un exercice quotidien et continu qui exige un rafistolage des soubassements de la république telles que l'union sacrée le civisme, la fidélité à la patrie et surtout l'adhésion à cet important projet de société où chaque vie compte, où la misère et l'exclusion seront définitivement éradiquées car "les gens sont sensibles au discours de la violence quand ils ne mangent pas à leur faim" (John Brennan ancien conseiller de Barack Obama en contre-terrorisme).

Mouhamed Diop

Professeur de français