Le politicien sénégalais : un croque-mort ?

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Le politicien sénégalais : un croque-mort ?

 

Finalement le métier de politicien et celui de croque-mort ne sont pas très différents dans notre pays. Combien de fois devra-t-on utiliser deux fois la vie d'autrui pour le pouvoir ? Compte, Décompte et contes sur nos martyres. Nos hommes politiques sont les premiers à tirer profit de toutes ces morts violentes. On me rétorquera que la violence est inhérente à la politique, mais quelle violence ? A quelle proportion et sous quelles conditions ? Pour quels résultats ? La politique au Sénégal est devenue le dieu Kronos qui dévore ses enfants après les avoir engendrés. Trop de morts pour encore un débat malsain sur le 3e mandat (quel gâchis!) ! Trop morts pour encore une affaire de marche interdite ! Trop de morts pour une affaire d'accusation de viol qui vise un opposant ! Trop de morts pour encore une contestation de Décisions du conseil constitutionnel ! On ne fait jamais les choses entièrement parce qu'on n'est rarement motivé par les grandes causes. Le résultat est un éternel recommencement !

 

En analysant l'hystérie avec laquelle Mimi Touré parlait (avec beaucoup de cruauté et de plaisir) du procès de Karim Wade, je l'avais comparée au personnage du film "Sam le croque-mort ». Personnage funeste, avide et sans scrupules, qui volait les morts (argent montres et autres parures) Sam a vu son entreprise de pompes funèbres fleurir un certain temps. Mais comme le hasard n'est jamais un bon allié en affaires, il arriva que les morts se fassent rares. Mais Sam étant un personnage sans vergogne décida que la mort ne vient jamais seule : pour donner un petit coup de pouce à son entreprise agonisante, il décida de se déguiser la nuit en bandit de grand chemin pour tuer et, pas n'importe quelle victime. Il y a des victimes plus fécondes pour ses pompes funèbres que d'autres.

 

Mais Sam ne tarda pas à comprendre toute la teneur de l'adage qui veut que le bien mal acquis ne profite jamais : son manège fut découvert et sa faillite fut désormais personnelle, car il passa à Canossa. Nos hommes politiques aiment la surenchère, la violence. Même quand un homme politique ment, il est plus persuasif qu'un prophète : ce sont de véritables comédiens. Un bon politicien pourrait être un bon catcheur professionnel : un catcheur professionnel mime sa colère, sa haine, ses blessures. Même quand la blessure du catcheur est réelle, son honneur doit consister en sa capacité à la mettre en scène. Tout le monde, y compris les spectateurs, sait que le catch est un sport-spectacle et que donc certains combats sont des montages. Mais comme il y a un mélange de combats ouverts et de combats factices (dont le résultat, les prises sont fixés d'avance) le spectateur est perdu dans ce mélange de réel et d'illusion, de vrai et de faux.

 

Nos hommes politiques développent la même habileté : un peu de vérité dans un océan de mensonges et les jeux sont faits ! A la différence des catcheurs dont le fair-play est surtout envers le public (ils acceptent des prises dangereuses pour le plaisir du public) les hommes politiques par contre sont rarement imbus de fair-play. Ils ne se trompent jamais ; s'opposer à eux relèvent de la haine ou de la jalousie ; nier leur bilan ou leur aura, c'est être un aigri, etc. Même dans les joutes, ils manquent de fair-play : un catcheur est parfois content de perdre le titre, car il sait qu'il va le reconquérir et que son palmarès pourrait être cinq, dix ou seize fois champion du monde. Un homme politique par contre, quand il a une parcelle de pouvoir il s'y agrippe comme un singe sur les branches d’un arbre à fruits doux (?ôy en wolof). Le chanteur a dit "nit ku ?ul dafa bëgg nguur" (on peut dire aujourd'hui qu'il en est l'illustration parfaite).

 

Il y a tellement de mensonges en politique que finalement celui qui s'aventurerait à les extirper de grand enchevêtrement apparaîtrait comme un illuminé venu de Mars pour sauver une communauté d'hommes qui n'ont nullement envie d'être sauvés.

 

Alassane K KITANE 


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