Ma Profonde Souffrance : des Sénégalais contre le Sénégal !

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Ma Profonde Souffrance : des Sénégalais contre le Sénégal !

 


« Les citoyens mêmes qui ont bien mérité de la patrie doivent être récompensés par des honneurs et jamais par des privilèges : car la république est à la veille de sa ruine, sitôt que quelqu’un peut penser qu’il est beau de ne pas obéir aux lois. Mais si jamais la noblesse ou le militaire, ou quelque autre ordre de l’Etat, adoptait une pareille maxime, tout serait perdu sans ressource. »

 

                                              ROUSSEAU                                    

                   

                                    J’accuse tous ces sénégalais qui ont voté pour Macky Sall. J’accuse tous ces sénégalais qui l’ont défendu. J’accuse tous ces sénégalais qui le défendent encore. Je suis un Sénégalais et je n’appartiens à aucun parti politique, à aucun cercle ou sphère idéo-politico-religieuse. Ce pays nous appartient. Nous n’avons pas des villas ou appartements ni des comptes bancaires à l’étranger. Nous sommes sénégalais et n’avons que le Sénégal. Nous n’aimons que le Sénégal. Nous n’avons pour souci que le Sénégal.

Là, mes frères, le pays va trop mal. Nos ressources sont dilapidées, les richesses sont exploitées à des fins partisanes et politiciennes, nos libertés négligées. Nos conditions de subsistance, nos moyens de vie, nos chances ou possibilités sont embarquées dans des schémas que nous ne comprenons pas, ne maîtrisons pas. Tout est confus ! Nous sommes étouffés, non par la religion, mais par des esprits qui se réclament d’elle. L’Etat manque du caractère et se perd dans des calculs qui font honte à la dignité, au respect, à la raison politiques. L’Etat, la religion et l’éducation, la conscience citoyenne, voilà le problème !

L’Etat, quoique qui puisse arriver, reste le chef et doit agir comme tel. Il dispose de toutes les ressources, humaines, financières, techno-matérielles, juridico-politiques et a une mission hautement noble, celle-là même d’assurer à chacun et à tous la quiétude. Ce que nous voyons, là mes frères, nous confisque « sommeil et appétit » et nous glisse dans une peur paralysante. Nous sommes un peuple relativement jeune, mais plein de potentialités, intelligent, mais guidé, abusé par des arrivistes, des hommes qui fréquentent la politique sans vergogne ni retenue, sans science ni morale.

La politique est un art noble qui appartient à des élus, à une race d’esprits, bons ou mauvais, mais brillants, compétents, qui ont le sens de la lecture, de la responsabilité, de la mesure, de la décision, des esprits capables d’accoucher des solutions magiques à des problèmes qui bouleversent les consciences et hantent le sommeil, des inquiétudes, des angoisses déchirantes. Je me pose la question : sommes-nous maudits ou manquons-nous, simplement, de chance ? Nous ne méritons pas que ces esprits inféconds aient les commandes et nous soumettent à un régime qui donne la nausée lorsque nous jetons un regard sur l’art politique.

Les dirigeants, de tout ordre, doivent être des génies, des exceptions, de singulières intelligences, avec des oreilles fines, un courage sans faille. Il faut être plus que normal pour diriger un peuple. Mais, voilà ce que cela produit lorsque les fautes de l’histoire nous conduisent dans des chemins tortueux, lorsque les accidents socio-politiques nous précipitent dans des contées où l’intelligence, la justice, l’amour de ce qui est bon et bien, la décence sont dérobés et jetés dans les « poubelles de l’histoire ».

Voilà ce qui se passe lorsque les incompétents sont à la commande. Voilà ce qui se passe lorsque les ignorants décident. Voilà ce qui se passe lorsque l’hypocrisie triomphe. Nous sommes tombés dans une aliénation injustifiée et nourrie par des consciences incultes, dépourvues du sens de l’histoire, de la mesure et des priorités. Voilà ce qui se passe lorsque ceux qui nous dirigent ne nous aiment pas et foulent aux pieds notre bien-être quotidien.

Dites-moi qu’est-ce qui marche dans ce pays ? Dites-moi comment les gens vous voient quand vous leur tenez un langage de vérité ?  Nous sommes malades, nous sommes tous malades de ce que nous vivons et de que ne nous sommes pas. Pour paraphraser l’autre, je dirais : « le criminel des criminels est cet homme qui fréquente la politique sans être un politique.» A un tel homme, il manque beaucoup trop de choses. Il y a trop de comédie au sommet de l’Etat, au cœur de la Cité.

On dirige un pays avec une vision, un programme dont la téléologie est d’installer le peuple dans une aisance totale : sécurité, éducation, santé, libertés, droits, justice, respect, équité, épanouissement. Il convient d’avoir l’idée et la volonté sérieuses et rigoureuses de bâtir une Nation forte, épanouie, solide où les libertés sont des acquis élémentaires.  Je ne parle pas de liberté au sens d’un pouvoir d’action, de liberté au sens social et politique du terme. Je parle de liberté au sens d’être et de rester humain.

Qui peut se déclarer libre quand nous voyons que notre passé est caché, notre présent se conjugue aux vicissitudes et notre avenir est déjà un passé. L’Etat est né pour résoudre les problèmes de la société : la question de la propriété, des transports, de la santé, de l’éducation, du développement, de la sécurité, des communications. Tel un père de famille, l’Etat doit être protecteur. L’esprit de justice et d’équité doit être ses béquilles. Sa seule légitimité, c’est qu’il est une solution aux maux de la communauté. Tout Etat qui sort de cette ligne s’écarte de sa condition naturelle et légitime.

Un tel Etat rappelle cette « troupe de brigands » dont parle Saint Augustin. Confisquer le pouvoir, les ressources et forces de la Nation suffit largement comme raison pour le faire disparaitre. Nos hommes qui fréquentent la politique ont nécessairement besoin de cure, de formation, d’instruction, d’orientation. Il leur faut, tel un impératif, une rééducation. Je me permets de dire qu’ils comprennent le contraire de ce qu’ils doivent comprendre. Pourquoi ? Parce que justement, ils agissent à contre-courant. Ils sont dans la boue et ne la sentent même pas. Ils sentent mal et n’en ont aucune perception. Ils sont devant, mais c’est eux les derniers de la République. Je n’aime pas cette race d’hommes impertinents, incohérents, suffisants, arrogants, ingrats, kleptomanes, mythomanes, sans vergogne, narcissiques, constipés et vides d’éthique et de morale. Je n’aime pas ce père qui se nourrit de ses enfants, tel un Chronos.

Quand on a trop séjourné dans la pauvreté, quand la galère a trop duré, alors quand le pouvoir et la richesse arrivent d’un coup, folie nous possède, cette passion accompagnée de la peur du passé nourrie par les images de la galère et de la pauvreté. De tels hommes sont les mamelles de nos souffrances. Ils ne font que mentir, tricher, voler, manipuler. Voyez-vous, les respecter, c’est insulter la condition humaine, piétiner la dignité, le respect-même, la liberté, l’amour-propre du peuple.

Une telle situation me déchire le cœur. Honte, peur et nausée, voilà ce qui me saisit dans cette situation où des Sénégalais luttent contre le Sénégal. J’aurais aimé rencontrer des esprits éclairés, nobles, dignes de respect, justes, intègres pour leur confier notre traversée. J’aurais aimé que notre pays soit guidé par des intelligences, des esprits visionnaires, justes avec un sens hautement élevé du respect de la condition humaine. J’aurais aimé voir ce pays guidé par des esprits qui l’aiment et le protègent. Nous ne méritons pas d’être avec « ces singes » dont parle Nietzsche.

Les plus brillants sont toujours les moins intéressés, les plus passionnés sont souvent les plus exploités, considérés comme des « idiots », des consciences vides. Il est temps que nous comprenions, dans l’histoire actuelle, dans la marche d’aujourd’hui du monde, que nous devons, plus que jamais, nous unir encore une fois pour réaliser ce corps politique parlant d’une seule, agissant ensemble, opérant dans le même sens.

Que les choses soient claires : l’Etat ne parle aucune langue, n’entre dans aucun lieu de culte ou de culture particulière et ne porte aucun nom. L’Etat, c’est le peuple. Le peuple, c’est chacun et tous. Je suis le peuple, car tu es le peuple : nous sommes le peuple. Nous formons un corps. Notre vie est commune. C’est là, la Nation : nous sommes nés ensemble, nous avons grandi ensemble, nous avons longtemps marché ensemble. Notre destin est à jamais uni. Nous avons traversé les mêmes difficultés, les mêmes obstacles, nous avons relevé les mêmes défis. Il faut rendre l’Etat au peuple, à la République. Que chacun et tous s’approprient l’Etat. Voilà l’image des hommes politiques que je présente sous la posture « des mauvais maris ». La trahison, la démagogie, voilà leurs arts, cette race de traîtres dont la compétence est de feindre.

Vous me direz que je suis trop sévère. Soit ! Je suis simplement passionné. J’ai le cœur lourd quand je vois ce qu’il faut faire alors qu’il n’est pas encore fait et pire quand je vois que tout ce qu’ils font, c’est de considérer le peuple comme un « troupeau », de faire du trésor public leur compte bancaire. Comment ne pas souffrir lorsque nos hôpitaux manquent de personnels, de matériels, de moyens de tous ordres. Comment ne pas être en colère quand je vois que les enseignants sont diabolisés ? Comment ne pas crier lorsque nous constatons que ceux qui nous dirigent se fichent éperdument de nous ? Comment ne pas hurler quand notre président, dans une voiture, assiste à une scène de violence et d’injures et sort pour se déambuler célébrant je ne sais quel esprit ? Le doyen Sanoussy Ba a raison : le problème, ce n’est pas Macky Sall ; le problème, notre problème, ce sont ces sénégalais qui défendent ceux qui sont contre le Sénégal. Comment ne pas craquer quand certains défendent ceux qui font verser le sang de leurs frères ? Comment ne pas vomir quand les autorités dansent la danse des singes et empruntent aux rats leur nature ? Voyez-vous, je souffre quand je vois qu’ils sont entrain de sucer le sang de mon peuple ! Oh mes frères, nos dirigeants sont les descendants de Méphistophélès.

Senghor est parti. Diouf est parti. Wade est parti. Complétez la liste ! Est-ce que, véritablement, être leurs mains armées ou leurs complices dans leurs immondices contre le peuple auquel on appartient est intelligent ? Frères, réfléchissez à ce vous faites ! Aussi longue que soit la nuit, le soleil finira par se lever. Aussi lourd que soit le mensonge, la vérité éclatera. C’est à nous de nous faire respecter. La souveraineté nous appartient exclusivement.  Là, je nous invite à revoir nos choix politiques. Rien ne justifie ce que Sall fait subir à ce peuple qui l’a défendu contre Wade et lui a fait l’excellent honneur de lui confier l’exercice du pouvoir. L’histoire s’est répétée : douze ans après son élection, Wade avait amené le peuple à se révolter ; en moins de deux ans, après sa réélection, nous demandons le départ de Sall. Leurs actes sont impardonnables. Mais, reconnaissons que nous avons notre part de responsabilité dans ce mauvais traitement que nous réservent toujours ces bas esprits inféconds à qui nous confions notre quotidien.

Tôt ou tard, cette situation va s’arrêter. Là, il faudra nécessairement revoir les conditions et modalités des choix des dirigeants. 


Amidou Diop

professeur de philosophie 


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