Trafic de visas à l'Assemblée nationale : Boubacar Sadio écrit au Président de la République

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Trafic de visas à l'Assemblée nationale : Boubacar Sadio écrit au Président de la République

            MONSIEUR LE PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE

 L’Assemblée nationale, jadis composée et animée par d’honorables et respectables députés, serait-elle devenue, sous votre magistère, un sordide repaire de malfrats de tout acabit ? 

Monsieur le Président de la République, il serait tout à fait normal et légitime de se demander pourquoi je mets permets de vous interpeller sur des sujets concernant l’Assemblée nationale. En effet, nous sommes censés vivre dans une république démocratique ou est consacrée la séparation des pouvoirs entre l’exécutif, le législatif et le judiciaire. Une séparation qui devrait garantir la liberté et le droit de chacun de ces rois pouvoirs de s’administrer et de fonctionner selon des règles et des principes propres définis au préalable par notre Constitution. Malheureusement, et c’est vraiment de le constater, nous ne sommes pas, au Sénégal, dans le schéma d’une véritable démocratie répondant aux standards et normes classiques. D’aucuns diraient même que notre démocratie est cosmétique et que notre république pourrait être qualifiée de bananière. C’est, peut-être, un peu trop tirer par les cheveux, mais toujours est-il que tous les observateurs sérieux et objectifs admettent que dans notre pays il n’y a qu’un seul pouvoir, celui de l’exécutif, du Président de la république, en somme le vôtre.

Monsieur le Président de la république, c’est amère de la constater et regrettable de le dire, notre république n’existe, ne vit et ne fonctionne qu’à travers vos seuls pouvoirs institutionnels et personnels. Les pouvoirs législatif et judiciaire n’existent que de nom et sont totalement  sous votre autorité, sous votre emprise et sous votre contrôle ; les plus méchants diront sous votre férule, ce qui n’est point loin de la réalité. Le pouvoir judiciaire que d’éminents penseurs considèrent comme le dernier rempart contre la dictature, l’arbitraire et les abus de pouvoir, est totalement à votre service. La justice est instrumentalisée, à la limite de la réification, avec un certain nombre de magistrats, notamment ceux de la haute hiérarchie, à la dévotion totale de l’exécutif et prompts à exécuter sans état d’âme vos desiderata. Cette soumission est obtenue à travers la pratique d’une forme de corruption consistant à l’octroi d’avantages, de privilèges et de faveurs indes de toutes sortes. La justice, au Sénégal, a dévié, à plusieurs occasions et en plusieurs circonstances, de sa trajectoire et de se principes d’égalité et d’équité symbolisés par la balance.

Monsieur le Président de la République, quant à notre inutile et tristement célèbre assemblée nationale, elle ne répond plus, depuis longtemps, aux attentes des Sénégalais très déçus par ses prestations, particulièrement par rapport à la présente législature considérée comme la plus nulle, la plus inutile et la plus catastrophique de l’histoire de l’institution parlementaire de notre pays. Le premier handicap et facteur à son émancipation est la présence à sa tête d’un vieillard grabataire, sénile et impotent qui a réussi l’extraordinaire prouesse d’avoir eu une vie politique transversale unique qui a débuté avec le Président Léopold Sédar Senghor, en passant par Abdou Diouf et Abdoulaye Wade pour se poursuivre avec son petit fils, le Président Macky Sall.  Le Président de l’assemblée nationale qui donne l’impression de vouloir défier la marche inexorable du temps, refuse d’admettre qu’il est au crépuscule de sa vie biologique et politique, qu’il est en fin de cycle. L’actuel Président de l’assemblée nationale qui aurait dû et pu être une référence historique et une véritable icône de l’histoire de notre pays, s’est rabaissé en vendant son âme au diable, en se donnant totalement et entièrement à vous et en livrant l’institution parlementaire à la merci de l’exécutif qui, de manière éhontée et dégradante, s’en sert en l’utilisant comme une instance de faire valoir et cautionnement de ses loi scélérates. Le Président de l’assemblée nationale est toujours en posture de reptation permanente et de soumission devant vous ; son attitude ne s’explique que par son gout immodéré des délices et lambris du pouvoir. Il y a aussi le fait qu’il n’a pas été élu par ses pairs, c’est vous qui l’avez nommé et imposé, il vous est donc redevable en tout et pour tout ; et pour vous manifester sa reconnaissance, il s’est juré de ne jamais être en travers de votre volonté, de vos désirs. « Dafa djebelou »

Monsieur le Président de la République, il y a que le mode de scrutin pour les  élections législatives ne permet une bonne et correcte représentation des différentes forces politiques. Les députés élus ne sont pas l’émanation du choix des populations, ils sont désignés par les appareils politiques qui, le plus souvent, ne font que traduire les choix du chef. Alors que vous sollicitiez les suffrages des Sénégalais, vous avez dénoncé dans plusieurs de vos discours le mode d’élection des députés en critiquant le système de la liste majoritaire qui fausse le jeu. Bientôt dix ans que vous êtes à la tête du pays, pas une seule fois vous n’avez cherché à modifier ce mode de scrutin que vous dénonciez avec  tant de conviction et de véhémence, encore une de vos incohérences. La parité a fait siéger beaucoup de femmes qui, en toute objectivité, n’ont pas leur place dans l’hémicycle. Tous les députés de la majorité vous doivent leur présence à l’assemblée nationale. Pour rappel, faisant preuve de ponce pillatisme et de lâcheté, les instances de votre coalition vous avaient donné carte blanche pour établir les listes nationale et départementale. Aussi est-il fort aisé de comprendre pourquoi, ces députés, sans gêne ni honte, se réclament « députés de Mcky Sall ». Ce sont des béni oui-oui qui appartiennent à un troupeau dont le propriétaire n’est personne d’autre que vous. Nous n’avons pas des représentants du peuple, mais de vils, serviles et dociles lascars à votre dévotion totale, des parangons achevés de « ndoungourous ».Il n’a jamais été enregistré chez les députés de la majorité un seul geste, un seul acte ou un seul sursaut patriotique pour défendre le peuple ; ils ont de tout temps versé et se sont toujours complus dans la pusillanimité et la veulerie.

Monsieur le Président de la République, votre responsabilité personnelle morale et politique est fortement engagée dans ce qui passe présentement au niveau de l’assemblée nationale, notamment par rapport aux comportements  indignes, déshonorants, honteux et insultants des députés de votre coalition. C’est vous, en personne, qui les avez choisis et installés dans l’hémicycle sans aucune enquête sur leur moralité, les seuls critères étant leur supposée représentativité ou l’estime personnel que vous éprouvez pour les uns et les autres. C’est désastreux et catastrophique ce qui se passe présentement à l’assemblée nationale du Sénégal ; on y note des comportements relevant de la haute délinquance et du grand banditisme. Notre assemblée nationale, jadis composée et animée par d’honorables et respectables députés, civilisés et imbus de culture démocratique et politique, est devenue un lieu mal famé, un sordide repaire ou grouille une faune exécrable de malotrus de toutes sortes. Et, vous en êtes le principal responsable tant du point de vue moral que politique ; chacun des députés de la majorité ayant été choisi par vous-même sur la base de la carte blanche qui vous a été donnée.

Monsieur le Président de la Republie, c’est sous votre magistère qu’un député a été appréhendé en flagrant délit pour falsification de monnaies et de devises en cours légal. La flagrance ne faisait aucun doute, les faits étant constants. A l’époque, certainement sur instructions de l’exécutif, il a pu bénéficier d’une libération immédiate qui lui avait permis de dissiper le matériel utilisé, de faire disparaitre des éléments de preuve et d’entrer en contact avec d’éventuels complices. Après quelques semaines de détention, le fameux député, sous le fallacieux et très commode prétexte d’une maladie imaginaire ou à tout le moins d’une pathologie exagérée, a pu bénéficier d’une liberté provisoire qui, s’il s’agit d’un partisan du pouvoir, équivaut à une liberté définitive. Quant aux opposants, ils sont toujours placés sous contrôle judiciaire, une épée de Damoclès toujours suspendue sur leur tête en guise de chantage.  Ce député qui vous est très proche, a été le chantre et le héraut zélé de votre troisième mandat. Ce même député, sachant et conscient que votre régime promeut les contre valeurs et les antis valeurs, a eu l’outrecuidance de vouloir présider aux destinées d’une mairie de la banlieue.

Monsieur le Président de la République, un autre député de votre écurie, réputé être votre proche ami, a menacé de tuer avec sa machette, toute personne qui s’aviserait de s’opposer à votre troisième candidature ; des propos comminatoires extrêmement graves qui avaient suscité l’émoi et l’effroi au sein de la population. Malheureusement, à la très grande déception des Sénégalais qui s’attendaient à une réaction vigoureuse de votre part, vous ne vous êtes même pas désolés de tels propos, refusant de les condamner en votre qualité de gardien de la constitution. Ne dit-on pas que ne dit mot consent ? Au contraire, à l’occasion d’une réunion du secrétariat exécutif national, vous et votre ami député vous êtes permis de vous en gausser. Vous avez poussé l’insouciance, l’inconscience et la désinvolture jusqu’à persifler sur la religion. N’a-t-il pas dit que si vous lui demandez d’apostasier, il le fera sans état d’âme ; une façon de dire que s’il avait à choisir entre vous et le prophète(PSL), il vous choisirait sans hésiter. Voilà le type d’individus que vous avez désignés pour siéger à l’assemblée nationale. Sur de votre soutien, à caractère purement ethnique, il a osé, en pleine séance parlementaire, menacer de trucider à la machette un collègue de l’opposition. Par votre silence, votre manque total de réaction devant de telles dérives ethniques et attentatoires à la cohésion sociale et à l’unité nationale, vous encouragez les manifestations identitaires et sectaires, toutes choses nuisibles à la bonne marche d’une république.

Monsieur le Président de la République, voilà que nous tombe en pleine figure ce scandale portant sur un réseau de trafic de faux passeports diplomatiques impliquant des députés de la majorité présidentielle, des députés que vous avez personnellement choisi de manière discrétionnaire pour qu’ils siègent au sein de l’hémicycle. Ce scandale, le plus grand jamais connu dans l’histoire de notre représentation nationale, éclate à point nommé pour confirmer mes propos selon lesquels notre Assemblée nationale un terreau fertile, un lieu de prédilection pour une faune exécrable de faussaires, de malotrus et d’hommes de corde et de sac qui s’y adonnent à toutes les formes de délinquance. Vous auriez pu limiter le bénéfice des passeports diplomatiques aux seuls députés. Pourquoi en avoir élargi l’obtention aux  épouses et aux progénitures ?  Aujourd’hui la très mauvaise réputation de notre Assemblée nationale a fortement entamé notre crédibilité à l’internationale ; et ce sera difficile d’y remédier avec une diplomatie atone et aphone. Hélas ! Comme toutes affaires impliquant des affidés du pouvoir, il n’y aura aucune suite judiciaire sérieuse. On fera du formalisme judicaire pour calmer les esprits pour après procéder à un enterrement de première classe du dossier.

Monsieur le Président de la République, la peur nous envahit, l’angoisse nous étreint, vos compatriotes regardent, dans la plus totale l’impuissance, leur pays aller à la dérive, sombrer vers un avenir et des lendemains incertains. Nos dirigeants oppriment et répriment sans état d’âme, se nourrissent de notre chair, sucent notre sang et s’abreuvent de notre sueur. Des dirigeants incapables de faire face à la flambée des prix et à la montée des périls. L’Assemblée nationale, à travers une représentation dévaluée, a totalement démissionné de ses responsabilités constitutionnelles, s’abstenant volontairement d’exercer son rôle de contrôle et d’évaluation de l’exécutif. Quant à la justice, pourtant composée d’éminents et très compétents magistrats, elle a globalement choisi de se complaire dans le déni de justice.

Monsieur le Président de la République, s’il y’a un domaine où vous avez été très brillant et excellent, où vos talents extraordinaires et exceptionnels ont été reconnus unanimement par tous vos compatriotes, c’est dans le ‘’Njucc- Njacc’’ que vous avez reconnu publiquement avoir pratiqué. Dieu seul sait que vous vous verriez décerner le Prix Nobel du ‘’Njucc- Njacc’’ à l’unanimité du Jury. Il me plait, ici, de citer mon ami Khalifa SALL qui disait « Le Président Macky SALL doit comprendre qu’on ne dirige pas un pays par la ruse ». Je fais mienne cette réflexion pleine de sens et de profondeur. Quel minable bilan à présenter aux populations ! Quel legs appauvri à offrir aux générations futures de la part d’un Président né après les indépendances et qui avait séduit les Sénégalais avec les fameux slogans : « La patrie avant le parti », « Une gouvernance sobre et vertueuse ». Des jeux de mots et des fantaisies lexicales qui se sont révélés comme une vraie arnaque politique, une supercherie et des boniments. Vos propos figuraient dans le registre d’un discours populiste captieux et spécieux destinés à surprendre la vigilance des populations et à abuser de leur confiance et de leur naïveté, pour un seul objectif, accéder aux pouvoirs pour jouir de ses lambris et de ses délices, en connivence et en partage avec vos proches, amis, parents et partisans.

Doit-on s’étonner que dans notre pays dont vous avez en charge les destinées, explosent et prolifèrent autant de scandales portant sur de faux billets, de faux passeports diplomatiques, de faux diplômes, de faux actes d’état civil, de faux certificats de résidence etc. ? Nous vivons présentement dans une république de la ‘’falsocratie’’. Pouvait-il en être autrement quand c’est le Chef lui-même qui donne et rythme le tempo du ‘’Njucc- Njacc’’?

Monsieur le Président de la République, le constat est amer et douloureux, vous avez lamentablement échoué dans la gestion du pays. De 2012 à aujourd’hui, vous n’avez pas posé un seul acte, pris une seule initiative et mené une seule action qui aura marqué la vie de notre pays dont les populations pourront se souvenir. Du point de vue économique le pays s’est appauvri ; une récente étude a révélé qu’il y a six millions de pauvres au Sénégal. Du point de la vie politique, le pays a connu une très grande régression démocratique au point de recevoir des leçons de pays comme la Mauritanie et le Niger qui n’ont connu que des régimes militaires. Votre magistère est caractérisé par une parole instable, des promesses non tenues, des engagements non respectés, des parjures, des reniements et des abjurations publiques. On serait en droit de considérer votre passage à la tête de notre pays comme une douloureuse parenthèse qui, cependant, aura eu la vertu de dessiller les yeux des Sénégalais pour mieux les orienter dans leurs choix futurs.

                 Le pouvoir au Peuple. TERMINUS 2024.

Dakar le 15 Septembre 2021.                              Boubacar  SADIO

                                                            Commissaire divisionnaire de police de classe

                                                    Exceptionnelle à la retraite.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


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