Dialogue de soudure

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  • Article ajouté le : 02 Mardi, 2023 à 23h05
  • Author: Birame Ndiaye

Dialogue de soudure

En tout état de cause, Macky Sall a appelé au dialogue pour ses propres intérêts. De la même manière, l’opposition, notamment les composantes de Yewwi Askan Wi, manifestent de la réticence, par souci de préservation de leur image de toute souillure d’ici à l’élection présidentielle. Autant dire que les prises de position s’inspirent substantiellement de calculs et de projections politiques, le plus souvent, millimétrés sur la perception qu’en aurait l’opinion publique. Pourtant, c’est ce choc permanent des intérêts partisans dans un système démocratique qui favorise et garantie la poursuite de l’intérêt général, accommodement des uns aux autres autour du minimum socialement vital.

Le jeu politique semble désespérément figé au Sénégal. La polarisation est telle que la paix civile et les conditions sociales favorables au bon fonctionnement des institutions en sont menacées. Dans ce contexte, la concertation entre les principales formations politiques s’impose en comité de salut public. Les forces vives de la nation, disent les voix autorisées pour masquer le caractère exclusivement politique des risques d’implosion. En vérité, tout est dans les sources de légitimation des positions et des stratégies des camps les plus représentatifs. A bout de souffle, ces derniers en arrivent à ne considérer n’importe lequel des moyens, souvent prestidigitateurs, que pour mettre en mal leur vis-à-vis avec l’opinion.

Faute de débat public sain dans l’espace public, le dialogue s’avère à présent comme le seul moyen de se prémunir contre l’instabilité, voire le chaos. Par ailleurs, le rejet de la liste nationale de la principale formation de l’opposition lors des dernières législatives, qui a occasionné l’absence d’Ousmane Sonko à l’Assemblée nationale, a également vidé l’hémicycle d’une vitalité contributive et potentiellement adoucissante de mœurs politiques. Enfin, les inéligibilités de Karim Wade et de Khalifa Sall, animateurs politiques, ne favorisent pas non plus des rapports pouvoir-opposition faits de gentlemen's agreement.

Comme quoi, le Sénégal est plus que jamais dans l’impasse. Ceux qui comparent la situation actuelle à celles de 1963 et de 1988, pour minorer les risques nouveaux, font abstraction du niveau d’engagement des populations, du caractère hétéroclite de leurs origines, âges ou autres et de la détermination durable qui les animent.

« On fait la guerre quand on veut, on la termine quand on peut. » Il est tout à fait compréhensible qu’Ousmane Sonko ne soit pas emballé par l’appel au dialogue du chef de l’Etat. Et pour cause, il aurait bazardé tout son potentiel à faire fléchir le pouvoir le cas échéant. Son seul gage demeure sa capacité de crissement et d’embrasement. En s’engageant dans des pourparlers, la désintégration de son bouclier humain est le plus grand risque encouru sans aucune garantie de recouvrer la contrepartie attendue. Par contre, son allié de Taxawu Sénégal pourra, sans risque de porter le coup fatal à leur coalition, s’autoriser un dialogue ouvert et transparent avec le régime. Mais, faudrait-il que la bénédiction probablement tacite de Pastef ou, à tout le moins, son indifférence l’accompagne.

La mouvance présidentielle use d’interpellations et de caractérisations délictuelles, judiciarisant ainsi les dires et les faits d’adversaires politiques outrés. L’opposition, quant à elle, n’a plus rien à faire des petits soins, des rectitudes et des mises en garde. Masqués en permanence, les uns cassent, les autres matraquent, puis tout le monde plaide la légitime défense. Des deux côtés, les avocats et autres partisans, despotes de la démocratie, disent à l’opinion-juge que leur client n’a pas commencé le premier.

Birame Waltako Ndiaye

Mouvement Populaire d’Emancipation Citoyenne (MPEC)
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