Ndoumbélane, banal pays branché

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  • Article ajouté le : 16 Jeudi, 2020 à 16h04
  • Author: Birame Ndiaye

Ndoumbélane, banal pays branché

Ce pays n’est pas un pays, c’est le repaire d’explosions et d’emportements, c’est le terre fertile des réflexes de subordination, Qibla des missionnaires, des moines et des mollahs. Y est fou celui qui s’instruit sans recul, y est fou celui qui s’accommode des convenances prisées, y est fou celui qui s’y érige anticonformiste. Tout le monde y est en intelligence, avec tout le monde, avec soi-même ou contre tous les autres. Ce pays est encrassé de restes, de ruines, de rabâchages et de quelques résistances.

Sur les traces d’un oisif errant, fou de la vie de paumé, fou des contradictions nées de la condition de quidam sollicité culturellement de partout. Il se dit musulman, expérimente sans cesse le langage bestial des boursicoteurs, prie frénétiquement Dieu, mais porté à repousser raisonnablement les plus vulnérables de ses semblables. Alpha se cherche ; Il a tenté l’idéal d’assimilé, il a ensuite accepté la réalité d’obligé, le voilà tout révolté contre l’oppresseur mutant et intraitable à chaque fois. Il est fou, non pas de solitude et de chagrin, mais des rivalités et enchères sur les valeurs qu’il héberge en âme et inconscience.

Délirant, il trouve dans la proximité avec les esprits et autres génies une collaboration fantastique, lénifiante contre ses troubles. Il bascule entre le procès des mauvais sorts jetés par jalousie et l’intrusion des « djinns amoureux », cougar pour les uns et amant pour les autres. Cependant, ce surnaturel ne tient pas lieu de mobile, même pas d’excuse, quand vient le temps de se faire passer pour être brillant et branché.

Le vendredi matin, sur le chemin du bureau, Alpha fait offrande, représentation païenne. À son travail, il s’improvise planificateur rationnel, maitre de son destin jusqu’à midi tapant. À l’appel du muezzin, il arbore son caftan arabisant pour mieux s’illustrer frère fidèle en la foi. Après quoi, avec sa femme aux allures de bourgeoise provinciale, perruque bien ajustée, teint blanchi, drapée de sa belle camisole de force, ils envisagent un de ces week-ends tendance, style wasp.

Alpha est tout le temps en représentation jusque dans son lit, acculé par les aspirations nouvelles à se renouveler de saveurs et de sentiments truqués. Sa dulcinée lui reproche son égoïsme d’homme périmé, malgré tout. En outre, Alpha apprend à être père alors que cela devait couler de source. Dorénavant, cette tâche, normalement de reproduction du modèle de l’éducation reçue, exige des efforts soignés d’assimilation. Il faut, à présent, suivre le tempo des modèles provisoires jusqu’aux accents et mimiques à transmettre.

Maintenant que la barrière identitaire a sauté, la crise d’adolescence est à l’ordre du jour. Elle a toujours été présente, sauf que dorénavant les parents, à l’image du ceux du nord, en prennent plein la gueule. Alpha, en son temps, n’avait pas le choix que de s’en prendre à des causes communes. C’est ce qui explique en partie que les espaces publics des pays du tiers-monde soient jusque-là très politisés. L’autorité étatique se substituait à l’autorité familiale quand venait le temps d’exprimer le besoin d’affirmation et de rébellion. Il faut croire que le cadre familial d’avant ne consacrait pas d’espace de manifestation thérapeutique des tensions dans le processus de réalisation des jeunes.

Birame Waltako Ndiaye


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