Triste est la mort, cynique est la politique

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  • Article ajouté le : 20 Jeudi, 2017 à 01h07
  • Author: Birame Ndiaye

Triste est la mort, cynique est la politique

Des tribunes du stade Demba Diop, des citoyens sont morts, certainement à la fleur de l’âge. Au firmament de la politique politicienne sévit actuellement, entre Manko watu Senegaal et Benno Bokk Yaakar, une sorte d’enchère sur la brutalité. Tout ceci nous expose à une série de violences inédites. Le plus important n’est pas de suspendre la campagne pour les regrettés disparus lors de la finale de la ligue. Il y a lieu de revenir à la raison en enterrant promptement les haches de guerre brandies en menaces actuelles et en représailles éventuelles. À Grand Yoff, l’attaque de la caravane de Youssou Ndour aurait également pu déboucher sur un carnage. Que dire du camp présidentiel qui promet rebondissement et répliques tout en déplorant l’innocence des victimes ?

Pas question d’interdire les animations politiques, pas la peine d’empêcher la tenue des meetings, si tant est que le Sénégal est encore une vitrine de la démocratie en Afrique. Le pays et son administration et ses forces de sécurité doivent être en mesure de prévenir et d’écraser tout acte provocateur. Qu’importe si les uns se targuent de ne réagir qu’à l’insolence enlevante des libertés de leur leader. Peu importe si les mascarades maniérées des décideurs vont jusqu’à leur faire enfiler la camisole clownesque des pleureuses funèbres. Voilà où nous mènent l’arrivisme et le cynisme d’une bonne partie de la classe politique, échec patent de l’institutionnalisation. Il est temps de dépasser enfin ces insoutenables rapports de l’âne enragé et de l’ânier embarrassé.

La politique est essentiellement violente. Mais, là encore, il ne doit s’agir que d’une agressivité de la séduction qui doit se manifester, au mieux, en idées et en ruse, au pire. En vérité, la marginalisation de la violence physique est une condition essentielle de fonctionnement des sociétés démocratiques. La responsabilité dans la manifestation de la barbarie en politique sénégalaise incombe totalement aux personnalités politiques qui sollicitent, au besoin et à vil prix, la horde des véritables oisifs-errants. Cette violence physique n’est même pas colérique ; c’est pire. Elle est instrumentale, destinée à affirmer une représentativité sur le terrain en démontrant une capacité d’entraver.

Malheureusement, les décideurs sénégalais, et notamment les chefs d’État, ont tellement usé et abusé de leurs pouvoirs à des fins de neutralisation qu’ils peinent à exercer légitimement leur devoir suprême de mise au pas. Le risque est trop grand pour l’autorité ; c’est encore une fois de plus se voir accusé de mauvaise fois, de mélange des genres dans une sorte de république. Voilà un état des lieux qui révèle la faillite de l’État de droit en ceci que les pouvoirs publics ne parviennent toujours pas à dissocier, ne serait-ce qu’en apparence, leur vocation pour l’ordre et la loi et leur parti-pris en faveur de la nomenklatura.

Ne suspendez pas vos campagnes électorales à des fins de séduction et de soumission aux sensibilités des citoyens soumis. Soyez beaucoup plus scintillants de sagesse. Suspendez donc vos propensions à justifier vos moyens par vos cyniques visées revanchardes. Ces mots sont destinés à l’establishment établi depuis déjà longtemps à coup d’astuces et de sinistres subterfuges. Ce qui nous a valu les morts de jeunes au stade Demba Diop, ce qui explique l’emballement des brigands contre la caravane des nababs à Grand Yoff, ce qui fait craindre de violents soubresauts postélectoraux ont les mêmes dénominateurs : fracture sociale puis rupture de confiance.

Birame Waltako Ndiaye

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