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Afrique

Dialogue en RDC : pourquoi l’accord bloque (encore) sur le sort de Moïse Katumbi

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Moïse Katumbi, ancien gouverneurdu Katanga, en mars 2015, à Lubumbashi.

Si les pourparlers entre les signataires de l'accord du 18 octobre et le Rassemblement de l'opposition avancent, quelques points divisent encore les protagonistes, notamment le sort de l'opposant Moïse Katumbi. Décryptage à cinq jours de la signature annoncée de l'accord.

De l’avis même de la médiation, « l’accord est à la portée de main ». Le consensus serait déjà trouvé sur « 95% du draft » [le brouillon de l’accord], avance, optimiste, la Conférence épiscopale nationale du Congo (Cenco). Selon toute vraisemblance, il ne resterait donc que quelques réglages et une bonne dose de volonté politique pour parvenir à un accord le 30 décembre, date annoncée de sa signature.

Quelques points de blocages persistent pourtant sur la voie de ce compromis politique. Il s’agit avant tout du sort de l’opposant Moïse Katumbi, candidat déclaré à la présidentielle, aujourd’hui contraint à l’exil après avoir été successivement inculpé d’atteinte à la sûreté de l’État et condamné à trois ans de prison dans une affaire de spoliation d’immeuble. La restructuration, ou non, de la Commission électorale nationale indépendante (Ceni) est un autre élément problématique, de même que la dénomination de l’organe de suivi de l’accord à venir et le poste de Premier ministre.

1. Le sort de Moïse Katumbi

« On ne doit pas se voiler la face : lorsque nous discutons de mesures de décrispation politique, il s’agit avant tout du sort de Moïse Katumbi. » Les propos de ce cadre de la Majorité présidentielle (MP) ont le mérite d’être clairs. Le Rassemblement de l’opposition a en effet présenté une liste de sept prisonniers et exilés politiques dont Moïse Katumbi, lesquels devaient bénéficier, en priorité, de ces mesures de décrispation politique. Mais qu’est-ce qui bloque encore ?

« Tout doit se faire conformément à la Constitution », répond Adam Chalwe, coordonnateur de la jeunesse de la MP, qui participe aux « réunions informelles de briefing et débriefing » des pourparlers en cours sous la médiation des évêques catholiques.

« Pour nous, les politiciens ne doivent pas se substituer aux juges en décidant de l’abandon des poursuites contre des individus », explique-t-il, défendant l’option de la mise en place d’une commission ad hoc de magistrats chargée d’examiner au cas par cas les affaires des sept prisonniers ou exilés politiques emblématiques : Moïse Moni Della, Eugene Diomi Ndongala, Floribert Anzuluni, Jean-Claude Muyambo, Antipas Mbusa Nyamwisi, Roger Lumbala et Moïse Katumbi.

Une position que défendrait également Vital Kamerhe, selon ses détracteurs. « Au centre inter-diocésain, avec José Makila et Jean-Lucien Bussa, le leader de l’Union pour la nation congolaise (UNC) compte en effet parmi les fervents défenseurs du camp de Kabila », affirme Raph Kabengele qui participe aux négociations en tant qu’expert du Rassemblement.

Pour ce proche collaborateur d’Étienne Tshisekedi, « exiger une commission ad hoc pour ces 7 cas emblématiques, c’est tenter de gagner du temps ». À l’en croire, « les évêques abondent dans le même sens que le Rassemblement : le pouvoir doit donner des signaux forts de décrispation politique en libérant ces sept prisonniers et exilés ».

« Personne n’a intérêt à ce que Katumbi revienne »

« Bruno Tshibala [le porte-parole de l’UDPS, ndlr] a été libéré sans passer par une commission ad hoc. Que reproche-t-on par exemple à l’opposant Moïse Moni Della pour qu’il ne bénéficie pas de la même mesure ? » interroge-t-il, dénonçant un « combat d’arrière-garde » du chef de la MP. « Le Rassemblement est par ailleurs d’accord pour que les autres 300 cas de prisonniers et détenus politiques soient examinés par cette commission », conclut-il.

S’il y a suffisamment de volonté politique pour décrisper le climat politique, on n’a pas besoin de trop de procédures.

Affirmant parler « à titre personnel » − son parti n’a pas encore organisé de compte-rendu pour faire connaître la position à adopter à ce sujet −, le député UNC Juvénal Munubo estime aussi que « s’il y a suffisamment de volonté politique pour détendre l’atmosphère et décrisper le climat politique, on n’a pas besoin de trop de procédures. »

« Dans tous les cas, à l’UNC, nous sommes pour que Kabila amnistie Katumbi pour permettre à Katumbi de revenir au pays », jure-t-on dans l’entourage de Vital Kamerhe. Mais, à vrai dire, « personne n’a intérêt à ce que Katumbi revienne », fait remarquer un observateur des arcanes politiques congolais. « Beaucoup aujourd’hui brassent de l’air pour lui montrer qu’ils sont en train de le défendre mais, en réalité, que ce soit à la MP, à l’UNC, au MLC, voire au Rassemblement, la disqualification de Katumbi […] ferait les affaires de leurs leaders. Un adversaire de moins, c’est toujours ça de gagné ! », souligne notre source.

2. Le cas Badibanga

Dans le futur accord, le poste de Premier ministre reviendra à l’opposition. Ou plutôt au Rassemblement, selon Raph Kabengele. « Les évêques l’ont bien dit et le feront clairement ressortir dans le document de l’accord », soutient-il. Autrement dit, Samy Badibanga, chef du gouvernement issu de l’accord du 18 octobre, bien que membre de l’opposition, devra être remplacé. Une perspective que n’acceptent pas, pour l’instant, certains caciques de la MP.

« C’est surtout [une question d’] équité : le Rassemblement aura déjà la direction de l’organe chargé de suivi. Pourquoi l’opposition qui a participé au premier dialogue ne garderait pas la primature ? » tance un opposant dont le parti a pris part aux pourparlers de la Cité de l’OUA sous la facilitation du Togolais Edem Kodjo.

3. Quelle dénomination pour le CNT congolais ?

Sur le fond, les protagonistes se sont mis d’accord sur la mise en place d’un organe de suivi de la mise en oeuvre de l’accord. « Il sera également chargé de superviser la Ceni, de veiller à ce que celle-ci organise les scrutins à la date convenue ; il aura aussi un rôle d’arbitre auprès des institutions », confie Raph Kabengele.

Cette structure sera dirigée par Étienne Tshisekedi, si l’on croit l’entourage de ce dernier.

Mais comment cet organe sera-t-il dénommé ? La MP ne veut pas entendre d’un « Conseil national de transition ». « On pourra peut être se mettre d’accord sur le terme de Haute Autorité pour ma mise en oeuvre et le suivi de l’accord (HAMA) », glisse l’opposant Martin Fayulu.

4. Quid de la Ceni ?

Dernier bémol : la restructuration de la Ceni. Seule la MP semble ne pas y être favorable. « Restructurer la Ceni, c’est retarder les élections », estime Adam Chalwe.

Mais même à l’UNC, pourtant signataire du premier accord avec le camp de Kabila, la balance penche du côté d’une restructuration de la commission. Une position défendue également par le Rassemblement.



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