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Chronique

La quête de l’eau à Dakar, un souvenir de la chaude ambiance des bornes-fontaines d’antan

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La quête de l’eau à Dakar, un souvenir de la chaude ambiance des bornes-fontaines d’antan

N’eût été la solennité du sermon qui exige du fidèle un recueillement total, on en viendrait presque à se dilater la rate à l’énoncé du scénario décrit à la prière de vendredi par l’imam de la mosquée des HLM Shelter Grand-Yoff troisième tranche B pour parler du désarroi des Dakarois face au manque d’eau.En effet, a clamé d'une voix docte l'érudit, les gens qui criaient et se lamentaient dans la presse pour appeler au secours contre les inondations envahissant leurs demeures sont, à peine qu’on a fini de s’apitoyer sur leur sort, 

les mêmes à vociférer qu’ils ont soif. Avant d’accompagner leurs ‘’naxtu’’ (jérémiades) de randonnées dignes de celles d’Ulysse à travers les rues de la capitale, à la recherche de l’eau à boire. La situation est des plus renversantes : on court après l’eau, ce liquide qu’on ne voulait pas voir envahir sa maison, sa cour et ses chambres. Modernité et alternance obligent, dans la grande banlieue où on avait l’habitude de conjurer les pluies par la recette animiste de grand-mère consistant à faire du ‘’sul xorom’’ 

(enfouir du sel dans le sable) au moindre amas nuageux, dorénavant on presse les gouvernants en leur réclamant à cor et à cris des motopompes et autres camions hydro-cureurs. Foin de tout cela, depuis deux semaines. Il a suffi que la conduite de l’usine de Keur Momar Sarr fasse des caprices et refuse d’acheminer ‘’ndox mu nul’’ (l’eau potable) dans la capitale pour que Ndakaru oublie ses inondations et ouvre la page d’un nouveau cycle de dénonciations de l’incurie des pouvoirs publics,

 rythmée par les corvées d’eau. Comme avec le sourire que n’ont pu s’empêcher d’esquisser quelques fidèles en suivant le sermon de l’imam, la nostalgie doit bien habiter le cœur et l’esprit de certains Dakarois à la vue des femmes en quête d’eau ou des longues files de récipients (bassines, seaux et bouteilles d’eau minérale grand modèle) s’étirant devant un point d’eau. Avant que le ‘’xecc ndox’’ (abonnement à l’eau courante dans les maisons) soit généralisé, 

les bornes-fontaines installées par les pouvoirs publics étaient à tous les coins de rue des quartiers de Dakar et servaient ainsi de points de ralliement à la gent féminine. Des heures durant, on faisait la queue devant le point d’eau et en attendant son tour de ‘’root’’ (puiser de l’eau), on tenait salon. Tout y passait comme potins : le prochain mariage de la ‘’miss’’ du quartier qui, après plusieurs ‘’door yat’’ (refus) aux garçons a fini par céder à un type plein aux as, le énième ‘’eumbel’’ (grossesse) de la dévergondée qui s’est fait encore avoir par un type qui nie pour le moment toute paternité, 

le taneber (séance de tam-tam) à venir et les secrets d’alcôve, révélés au grand jour par les plus libertines des mariées du groupe des chercheuses d’eau. Le tout est débité avec des trémolos dans la voix et forces roulements d’yeux, histoire d’intimider les célibataires qui en palissent d’envie et harcèlent les rapporteuses pour qu’elles accélèrent l’histoire avant que leur tour d’aller puiser de l’eau ne les oblige à en rater le fin mot. Hélas, tout n’était pas rose à la borne-fontaine. Aussi, on s’y bagarrait comme des chiffonniers.

 A coups de ‘’paan’’ (bassine en fer) et de ‘’siwo’’ (seau), les femmes se tapaient dessus pour des histoires de rang, voire un vieux différend qu’on s’était promis de régler entre ‘’dieg’’, une fois qu’on se retrouverait au ‘’robinet’’. Elles s’en sortaient la lèvre tuméfiée, les tresses arrachées ou le lobe de l’oreille en sang. Certaines bornes-fontaines étaient le lieu de si fréquentes altercations qu’on avait fini par les baptiser ‘’robinets-bagarres’’. Seules les bagarreuses et les querelleuses à souhait osaient s’y rendre. 

Pour y tenir tête à leurs alter ego ou au ‘’seytané’’ gardien de la borne-fontaine qui chamboule les rangs parce qu’on l’a soudoyé ou qu’il en pince pour une gourgandine. Chahutés pour de tels antécédents, certains gardiens de bornes-fontaines passaient pour la tête de turc des adolescents qui, en plus, ne comprenaient pas pourquoi il les empêche de se baigner à grande eau au robinet public, le soir après les ‘’attaquements’’ (matchs de foot).

 ‘’On dirait que c’est pour son père’’, maugréaient les gamins en s’enfuyant à l’approche du bonhomme, perçu comme un empêcheur de faire usage de la chose publique. Comme concurrent des femmes, il y avait aussi le vendeur d’eau. Généralement un Maure noir, le ‘’jaykatu ndox’’ a longtemps fait partie du décor des bornes-fontaines dakaroises où, profitant de la gratuité de l’eau, il venant puiser le liquide avec son ‘’pool’’ (long récipient) pour ensuite aller le vendre à raison de 25 francs CFA le récipient. 

 Un prix qui, évidemment, montait en flèche, quand l’eau manquait et qu’il fallait jouer des coudes pour en avoir. Ce que savaient bien faire les ‘’ondo’’ (cette appellation vient du fait que c’est ce cri qu’ils lançaient en parcourant les rues au pas de course, le récipient en équilibre sur la tête) qui étaient des forces de la nature. La tradition, nourrie par de méchantes commères, les présentaient comme des esclaves doublés d’eunuques et obnubilés par l’envie de gagner le maximum d’argent qu’ils vont ensuite remettre à leurs maîtres restés en Mauritanie.CTN/SAB



4 Commentaires

  1. Auteur

    Papoufal

    En Septembre, 2013 (13:20 PM)
    je pense k tout le monde doit etre pret pour soutenir le gouvernement a resoudre ce problem au lieu d'en profiter des erreurs de ce derinier pour creer des problems. Trouver de leau est plus important et doit etre notre prioriter et non sortir KARIM WADE du gnouf ou de faire des greves apres avoir regler le problem de l'eau on pourrai comencer a faire des greves. Nekeu si greve niackheu toy xepeu do saguou do nane amena louko gueune car lou nek ak son tps. Massaly yaw aussi ak sa rewander coment des gens continus a te suivre. Come on Senegalese people reveillons nous. Il faut pa etre facher juska ne plus refrechir. Reglons le problem de l'eau c pa en brullant des pneu k l'eau va revenir car c kelk choz ki a ete gater il faut le reparer et l'etat est entrain de le faire. C pa facil du tout de ne pa avoir de leau pour des jours car la ou je suis le Samedi matin kan je me suis reveiller a 7h03mn g constater kil ny avait pa de courant. Je ne pouvais pa prendre mon bain car yavais pa deau chaude no prendre mon cafer car tout est electrik. Le courant est revenu a 7h43mn mais g failli etre fou. G t hors de moi car je ne pouvais rien faire. Imagine entre 7h3mn a 7h43mn a savoir 40mn seulement g penser k j'allais mourir donc je ressent votre peine vous ki l'endure ya 2 semaines de cela. Je suis navre et de tout coeur avec vous. Mais reglons le problem et apres on va agir car lou eupeu tourou t lou tourou yakh amenafa. Courage et prions au bon dieu de nous donner des gens conscients et responsable pour diriger nos pays Africains. Il faut kon change aussi de ne pa voter pour des gens ki nous donne du pognon pour etre au pouvoir car kou eubeu sa sakhal yaip la tai koula faye pour k tu vote pour lui louko neklkdef sou fallo. Niou bayi seuffeul nos dirrigeants kan ils sont au pouvoir dilaine tek louniou antanoul car sathie rek mo siy top. Si on est elu et k tout le monde te pose leur problem so amoul xel rek sathie. Le teranga senegalais mougui niouye tuer. Lingay laine t bayi naine bi mo gueune kou nek di topeu kaineu pour son interet personel. On doit vraiment changer de MENTALITER pour avancer. Rew mi warna depasser fi. Mias nek di niane rek ou di naxater si internet bi di nane damay tek deal tu te leurre toi meme. Je suis tres facher, ecoeurer de voir mes freres et soeurs senegalais etre dans cette situation. Ndokh laniou wakh pa greve ou karim. Travaillez pour le pays et pa pour votre poche. Noo k jesuis facher way, maire na looooooool. Li affairou do me harame la way. Plus egoiste k nos gouverneur tu meurts. yalla na niou dai neup deme safara. Ca va mal
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  2. Auteur

    Pape Diop

    En Septembre, 2013 (13:37 PM)
    belle ecriture
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    Auteur

    Mags

    En Septembre, 2013 (17:09 PM)
    Félicitations à l'auteur de cet article qui a su avec une très belle écriture et un ton juste nous ramener en effet à des souvenirs d'enfance. Effectivement, les bornes fontaines faisaient partie de la sociologie de nos quartiers avec toutes leurs histoires si bien contées ici. Quant au "diaay ndox" maure, lui aussi faisait partie des personnages emblématiques de nos quartiers. je n'ai jamais d'ailleurs compris comment ils arrivaient à maintenir en équilibre leur barrique sur la tête en se déplaçant.
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    Auteur

    Maxmaguette

    En Septembre, 2013 (19:10 PM)
    waww ! article bii mom gueuneu nèkhe !
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