Une lettre si improbable

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Une lettre si improbable

  Monsieur le Président de la République, le peuple a reçu votre message. En guise de réponse point d'appui dans son désarroi, il vous témoigne de sa désaffection et de son sentiment profond d'avoir été hautement trahi.  Sa confiance souillée, tous ses espoirs anéantis, il vous rappelle le lourd tribut qu'il a payé dans un passé récent pour vous porter au pouvoir... Faisant fi de vos origines, sans se soucier outre mesure de ce qui fût alors votre parcours et votre moralité, il fit le pari que vous saurez réussir le défi :

·       Non de redresser une entreprise française en faillite en lui confiant, à coup de plus de mille milliards de nos francs, la construction d’un impertinent Train Express Régional au moment où son réseau ferroviaire classique est quasiment inexistant

·       Non de signer des accords de pêche qui donnent carte blanche aux gros navires européens et chinois de surexploiter, pour finir de les épuiser, ses ressources halieutiques, privant les populations de l'essentiel des protéines animales nécessaires à l'équilibre de leur alimentation. Mais aussi d'emplois et de revenus des milliers d'hommes et de femmes qui s'activent dans le secteur de la pêche.

·       Non de signer des accords d'exploitation de ses ressources minières, pétrolières et gazières dans des conditions nébuleuses et dans l'irrespect total des dispositions réglementaires des codes (minier, pétrolier, gazier) et de la nomenclature institutionnelle en la matière.

·       Non de drainer tous les investissements vers un Diamniadio à quelques encablures d’un Dakar qui s’étouffe à la place d’un choix bien plus judicieux d’une localité de l’intérieur, avec comme dividendes des parts de marché juteuses pour vos proches et vos collaborateurs.

·       Non de constater dans une inaction inquiétante la faillite de son système de santé et son système d’éducation, oubliant qu'un peuple malade et non instruit ne peut combattre ni sa pauvreté, ni même sa propre bêtise

·       Non de chercher à museler par tous les moyens toutes les voix discordantes feignant d'ignorer que la démocratie est tributaire  du pluralisme  ( médiatique, politique, syndical..)

  Mais de  redresser le moral d'un  peuple las de voir ses institutions  taillées  sur mesure  pour s'accaparer la puissance publique,  las  de  voir sa croissance  se réduire à des chiffres  qu'il ne rencontre jamais dans son plat  à midi, las de voir sa  charte fondamentale  tripatouillée à toute occasion  pour des calculs  politiques mesquins, las de pleurer sa jeunesse qui se perd dans les tréfonds de l'Atlantique et  dans le désert éprouvant du Sahara, las de vivre le spectre traumatisant des inondations à chaque  hivernage, las d'une justice à la solde des puissants et jamais des faibles....bref d'un peuple  qui n'obtient jamais ce qu'il demande, à qui on donne toujours ce qui n'est pas son besoin , d'un  peuple qui a l'impression de ne pas être dans le même monde que  ceux qui le gouvernent..

Tristement, le constat est que, Monsieur le Président de la République, vous avez échoué., car vous avez oublié :

·       Que vous devez votre pouvoir et les privilèges qui lui sont attachés à la volonté de 58% des Sénégalais et non à la France

·       Que vous n'êtes pas le meilleur des Sénégalais, ni le plus beau, ni le plus instruit mais seulement celui qui a été choisi à l'unanimité

·       Que votre pouvoir n'est pas absolu, mais relatif à d'autres pouvoirs et, en dernière instance à la volonté du peuple.

·       Que vous n'êtes pas Dieu, mais un homme avec vos forces et vos faiblesses et qui font toute votre part d'humanité.

Par conséquent, pour le bien du peuple sénégalais, sa stabilité, sa paix et sa cohésion sociales, vous devez démissionner. Faites-le pour vous-mêmes, votre nom, pour votre famille et votre descendance. Faites-le pour l’histoire. Monsieur le Président de la République, la démission n’est pas un acte de faiblesse et de lâcheté, elle n'est pas le signe de la défaite. Au contraire, quand les raisons s’imposent, la démission est un acte de grandeur, c'est le renoncement au besoin de reconnaissance et la vanité pour un idéal qui dépasse l’individualité et l'intérêt personnel ... Quoiqu’’il arrive, le Sénégal  vous survivra...

                                                     Abdoulaye Sène NIANE Professeur de Philosophie

                                                                                  [email protected]


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