Préférence nationale n’est pas économie

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  • Article ajouté le : 18 Samedi, 2020 à 03h04
  • Author: Birame Ndiaye

Préférence nationale n’est pas économie

À l’émission Jakaarlo, il a été question de préférence à accorder aux sénégalais en vue d’une plus grande « propriétisation » locale des entreprises locales. Communiste un jour, communiste pour toujours, la bolchevisation, version sénégalaise, de la pensée politique est encore agissante. À moins que d’envisager le nationalisme des moyens de production, il est difficile de mettre en œuvre la charmante notion de préférence nationale. Monde ouvert, économies interconnectées, marché ouvert, il est difficile, après quoi, d’exiger de l’État que l’économie nationale soit confinée dans les mains des nationaux sénégalais. Il faudra d’abord concilier cette approche (d’un temps ancien) avec l’objectif à la mode : attirer les investissements directs étrangers.

S’il est vrai que l’État peut et doit encourager les initiatives locales, il n’a pas le choix que de mettre sur pied des incitatifs à l’hébergement du capital étranger. Efforts à effet nul, les actes de préférence nationale sont broyés par sa majesté le Capital. Le raisonnement simpliste et populiste du nationalisme désincarné est leurre et lueur. Seul prévaut, dans le jeu des compétitions et des investissements, la capacité financière à s’imposer dans le décor. 

La mondialisation, l’ordre économique international sont les cibles à combattre. Les politiques publiques nationales n’en sont que des remorques. Les partenaires, l’OMC et, surtout, les considérations budgétaires d’équilibre et de solvabilité commandent jusque dans l’orientation, l’arbitrage et la planification dans la gestion publique. La marge de manœuvre de l’État est sans cesse rétrécie par les coups de boutoir de la Finance internationale. Le mouvement altermondialiste n’est pas parvenu à renverser la tendance. Il faut espérer que le coronavirus vienne à bout de ce rouleau compresseur.

L'ordre économique a encore de beaux jours devant lui

Les élucubrations sur les changements de paradigmes et de revirement de l'ordre économique international ne seront que vœux pieux tant que les conditions pratiques d'un déclin du système économique ne seront pas réunies. La volonté manifestée de placer l'homme au centre de l'activité économique ne résiste pas à la capacité de renouvellement des tendances mercantilistes du marché et de la Finance.

C'est Marx qui parle: La production capitaliste tend sans cesse à dépasser les limites qui lui sont immanentes, mais elle n'y parvient qu'en employant les moyens, qui de nouveau, et à une échelle plus imposante, dressent devant elle les mêmes barrières. Les racines de ce mouvement de reproduction se trouvent dans les contradictions qui sont consubstantielles à la valorisation de l’argent devenu capital.

C'est dans cet ordre d'idée qu'il faut comprendre la précipitation de plus en plus affichée dans laquelle les dirigeants des pays dits développés comptent mettre fin aux mesures barrières afin que l'économie reprenne. Il en est de même des demandes d'annulation de dettes agitées puis formulées sur la scène internationale.

Il vaut mieux éviter le scénario d'un refus de la part du tiers monde d'honorer ses engagements. Cette éventuelle révolte pourrait provenir d'une situation de force majeure et aurait, du coup, servi de déclic au renversement des valeurs néolibérales et au bouleversement de l'ensemble des instruments de domination. Par contre, une annulation, malgré le manque à gagner, donnerait un souffle nouveau au règne des nababs, investisseurs-rois.

Birame Waltako Ndiaye 
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