Depuis l’entrée en vigueur de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA) en 1995, le Sénégal, comme ses pairs africains membres, bénéficie d’un socle juridique commun destiné à sécuriser les transactions économiques, renforcer la confiance des investisseurs et favoriser l’essor du secteur privé. Près de trente ans après, l’impact de cette architecture juridique sur le climat des affaires sénégalais mérite d’être analysé à l’aune des transformations économiques du pays.
L’un des apports fondamentaux de l’OHADA réside dans l’harmonisation des règles commerciales et corporatives à l’échelle régionale. Pour le Sénégal, cela a permis une plus grande lisibilité des normes applicables aux entreprises, facilitant la création de sociétés, la protection des créanciers ou encore la transparence comptable. Des domaines naguère marqués par l’instabilité normative ont gagné en sécurité juridique, un élément clé pour attirer des investissements privés, locaux comme étrangers.
Cette stabilité s’est traduite par une modernisation progressive de l’environnement juridique des affaires, notamment à travers l’adoption d’actes uniformes sur le droit des sociétés commerciales, les procédures collectives ou encore l’arbitrage. Le recours au Tribunal de commerce de Dakar et à la Cour commune de justice et d’arbitrage (CCJA) contribue à renforcer la prévisibilité des décisions judiciaires, bien que la lenteur de certaines procédures et l’accès inégal au droit restent des défis persistants.
Dans un contexte où la compétitivité économique dépend aussi de la simplification administrative, l’OHADA a incité le Sénégal à rationaliser ses procédures d’immatriculation, notamment à travers le guichet unique de l’APIX, qui centralise les démarches de création d’entreprises. Toutefois, l’impact réel sur les petites entreprises, souvent peu familiarisées avec ces mécanismes, reste limité en dehors des grands centres urbains.
Si l’OHADA constitue un levier important pour asseoir un cadre favorable aux affaires, son efficacité dépend largement de son appropriation locale. La formation continue des magistrats, des greffiers, des notaires et des acteurs du secteur privé demeure une condition essentielle pour consolider les acquis. Par ailleurs, la coexistence entre le droit OHADA et d’autres régimes normatifs sectoriels ou coutumiers complexifie parfois l’application concrète des textes.
Loin d’être un cadre figé, le droit OHADA continue d’évoluer. Le Sénégal, qui a récemment plaidé pour des réformes en matière de financement des PME et d’inclusion numérique dans les normes commerciales, entend peser davantage dans les futures révisions. L’enjeu n’est pas seulement juridique, mais économique : adapter les règles aux besoins réels des acteurs économiques pour accompagner durablement la transformation du tissu entrepreneurial national.
Auteur: Aïcha FALL
Publié le: Mercredi 25 Juin 2025
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