La question de la médiation pénale initiée par le gouvernement et annoncée dans la traque des biens mal acquis ne fait pas l’unanimité au sein de la mouvance présidentielle. En tous cas, le parti de Idrissa Seck ne s’inscrit pas dans une logique de négociation. Selon le député Thierno Bocoum, il est politiquement et moralement insoutenable que quelqu’un puisse voler des deniers publics et en garder une partie.
La récente décision du Gouvernement d’opter pour une médiation pénale consistant à laisser 20 % aux prévaricateurs qui voudront rendre leur butin, continue à faire des vagues. Au-delà d’une frange de l’opinion publique et de la classe politique divisées sur la question, des divergences de points de vue commencent à faire jour au sein de la mouvance présidentielle. En effet, le parti de Idrissa Seck a pris hier le contre-pied de cette décision annoncée par le gouvernement. Car pour le député Thierno Bocoum, «seule la loi définit les délits et les sanctions qui leur sont attachées. Il est du ressort exclusif de la Justice de dire qui est coupable ou pas et le cas échéant d’appliquer les sanctions prévues par la loi». En tout état de cause, annonce le secrétaire national chargé de la communication et des jeunes du Rewmi, «il est politiquement et moralement insoutenable que quelqu’un puisse voler des deniers publics et en garder une partie», martèle Thierno Bocoum dans une déclaration parvenue à Wal fadjri.«Le pouvoir est disposé à accepter une médiation pénale comme le prévoit la loi», a confirmé samedi à la radio privée Rfm, Abdou Latif Coulibaly, ministre chargé de la Promotion de la bonne gouvernance et porte-parole du gouvernement sénégalais. La veille, Me El Hadji Diouf, un des avocats de l'Etat du Sénégal dans cette affaire, avait, dans un entretien paru dans Le Populaire, indiqué que l'Etat du Sénégal «est prêt à concéder 20 % des biens mal acquis si les concernés retournent les 80 % au Trésor public».«Le président (Macky Sall, Ndlr) a toujours dit que son objectif n'est pas d'emprisonner des Sénégalais, (..), mais il faut qu'ils (les présumés coupables) retournent les 80 % au trésor public, à l'Etat du Sénégal qui a besoin de cet argent», a affirmé l'avocat. Pour le porte-parole du gouvernement sénégalais Abdou Latif Coulibaly, il est plus réaliste d'accepter que ceux qui sont soupçonnés de détournement de deniers public retournent 80 % de ces biens que d'attendre une justice qui peut prendre des années et des années avant de rendre son verdict, alors que le pays a besoin de cet argent.Une option qui, comme on peut s’en rendre compte, est partie pour susciter une vive polémique au Sénégal. Comme du reste l’a déjà fait l’objet de la traque des biens mal acquis.Georges Nesta DIOPREACTION - Mame Mactar Gueye et le Rds saluent l’option de la médiation pénaleLe Rassemblement démocratique sénégalais (Rds) de Mame Mactar Guèye approuve l’idée du gouvernement de Abdoul Mbaye à propos de la médiation pénale dans le cadre du recouvrement des biens mal acquis. Selon le communiqué sanctionnant le bureau politique de ce parti, «avec la mesure que viennent de prendre les autorités, à travers la voix officielle du porte-parole du Gouvernement, consistant, en lieu et place du jusqu’au-boutisme judiciaire, bruyant et improductif, à privilégier la médiation pénale, l’Etat vient de s’entourer des meilleures garanties d’un recouvrement efficient». L’Etat du Sénégal, selon le Rds, «en humanisant sa démarche aura su tirer utilement profit de la richesse de notre patrimoine culturel, qui met en exergue une de nos valeurs sociétales cardinales comme la discrétion, qui a toujours occupé une place de choix dans les us et coutumes de nos sociétés».Pour le parti de Mame Mactar Guèye, le prévaricateur de ressources publiques aura «la latitude, plutôt que d’être jetée en pâture à l’opinion, et en lieu et place d’un sempiternel jeu de cache-cache avec la Justice, d’aller, dans le secret du bureau du procureur, transiger».Selon Mame Mactar Guèye et Cie, il ne s’agit point de «concéder 20 %» à un quelconque gestionnaire indélicat, le trésor se contentant des 80 %». Il s’agit plutôt selon le Rds de procéder à une démarche intelligente de recouvrement optimal du patrimoine commun, plutôt que de s’engager dans la voie incertaine du «tout ou rien», qui s’est révélée jusque-là inopérante. Par ailleurs, Le Rds rend un vibrant hommage à la vigilance de deux praticiens émérites du Droit, Me Ousmane Séye et Me El Hadji Diouf, pour avoir inlassablement préconisé dans cette affaire la voie de la médiation pénale. Tout en se réjouissant que leur plaidoyer ait eu un écho favorable auprès du principal plaignant, en l’occurrence l’Etat, dont c’est le devoir régalien de se constituer partie civile, dans tout fait avéré de prévarication des ressources publiques.Dans la même veine, le bureau politique du Rds a tenu à rappeler que dès les premières heures de la mise en œuvre de la politique de protection des ressources publiques, initiée par les nouvelles autorités, «le Rds a publiquement émis le souhait légitime de voir la sagesse, la décence républicaine prévaloir sur tout le processus, afin que ces actes, combien louables, de réédition des comptes ne dérapent sur les pentes glissantes de l’acharnement politico-judiciaire, ou plus prosaïquement du règlement de comptes. Susceptibles de provoquer, à terme, d’inutiles déchirements dans le tissu social». Au fait, pour le parti de feu Latif Guèye, «étant entendu que lorsqu’on a eu le privilège de se voir confier la charge d’un bien public, il n’y a rien d’extraordinaire, qu’à l’heure de passer le témoin, il faille rendre compte au contribuable, par l’entremise de ceux qu’il aura démocratiquement investi de sa confiance. Pourvu toujours que cette réédition des comptes se passe dans le respect scrupuleux des droits et de la dignité de la personne humaine».
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