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Quarante ans, Sénégalaise, toujours dans le pétrin - La tragédie des icônes

Auteur: gfm

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Le rituel, lorsqu’on débarque à Paris, c’est la visite de la ville et on a beau avoir les pieds sur terre, on ne peut s’empêcher de se sentir happé par un monde parallèle. Le lendemain de mon arrivée, avec mon toubab, nous avons marché jusqu’à la Place Vendôme, un sanctuaire dédié au nec plus ultra, avec ses bijoutiers joailliers tels Van Cleef et ArpelsCartier et Dior, entre autres marques, qui symbolisent le summum de l’opulence.  

Après, ce fut un tour au Faubourg Saint Honoré, le temple d’Hermès, où le prix des foulards avoisine le salaire d’un fonctionnaire moyen sénégalais. Vers midi, Eric Madelin et moi avons mangé à la Place Saint Michel, avant d’aller nous promener au jardin de Luxembourg, qui est aussi enchanteur qu’un aperçu de l’Eden. On peut tout reprocher aux Blancs, sauf l’entretien de leur cadre de vie. Les dépotoirs d’ordures, les eaux sales et stagnantes, les pissotières improvisées à chaque coin de rue, sont inimaginables à Paris et on se demande quel sentiment habite les maires de nos villes africaines lorsqu’ils se baladent dans Paris. 

 Il en est de même pour les commerçants, on emballe aucune nourriture avec du papier sale, personne ne manipule le pain pour en vérifier le croustillant avant d’en choisir un. La propreté est un reflexe, elle est instinctive. Ceci étant dit, le même jour, j’ai aussi découvert avec mon toubab un autre visage de Paris : Pigalle, qui n’était pas éloigné de notre rue.  Lorsqu’on parle de Pigalle, la pudeur interdit d’entrer dans les détails  et ce qu’il faut savoir, c’est qu’il s’agit de tout un quartier dédié à la sexualité, avec des sex shop et où trône surtout une imposante bâtisse dénommée sexodrome, comme d’autres parlent d’hippodrome.  Et c’est là aussi, sur cette même rue, qu’est érigé le musée de l’érotisme. Après Pigalle, c’est Barbés la cosmopolite et le marché Château rouge où plus tard, lorsque j’ai eu mes repères, j’allais acheter du tamarin et du «beugueudj» surgelé pour mon riz au poisson. Je ne m’y rendais  que pour cela,  parce qu’on y croise des immigrés vivant d’allocations familiales et oisifs dont le passe temps est d’aborder les Africaines dans un français  débrouillé. C’est à se demander s’il n’y a pas un réseau de prostitution clandestine dans cet endroit de la ville. 

De l’autre côté de Paris, là où je vivais, rien n’est traumatisant, du moins en apparence, tout porte à croire que la vie est belle et éternelle.  Dans  cette société, les vieillards sont relégués dans les maisons  de retraite  et les cimetières sont si fleuris qu’on les prend pour de simples espaces verts. Seulement, les bustes, les noms de certaines places et des hôtels comme le Ritz, rappellent ce que je nomme la tragédie des icônes. La mort surprenante qui frappe de plein fouet des jeunes femmes belles à qui tout réussissaient comme pour  faire revenir dans les mémoires qu’il y a Quelqu’un qui a droit de vie et de mort sur Ses créatures, même si personne ne L’évoque et qu’on ne croit même pas en Lui.  Parmi ces icônes emportées alors que personne ne s’y attendait, il y a la sublime Dalida, dont le buste érigé sur une place  à Montmartre, révèle le désespoir qui peut  se nicher derrière les paillettes. 

 Cette chanteuse et actrice hissée au rand d’idole, s’est suicidée dans sa maison, parce que ne pouvant plus supporter la vie. La jolie Dalida ne lui a pas trouvé un sens, malgré tout ce qu’elle lui a offert.  Il y a aussi l’histoire de Marie Trintignant, une autre  femme issue d’une célèbre famille d’artistes, que son compagnon, un artiste estimé par le public, a battu à mort un certain soir, à cause d’une histoire de jalousie. A la place Vendôme, la même qui fait rêver, avec ses enseignes, le souvenir de  Lady Diana  plane à l’hôtel Ritz et les circonstances de son accident alimentent encore la polémique.  A Paris, il n’y a pas que Louis Vuitton, Cartier et Chanel. A Paris, il n’y a pas que des jeunes gens qui rigolent sur les terrasses des cafés. A Paris, l’ange de la mort s’invite aussi, mais même avec cela, on oublie Dieu.  A Paris, on a les cheveux longs et les idées courtes, pour paraphraser Schopenhauer.

Auteur: gfm
Publié le: Dimanche 24 Novembre 2013

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