Coup de théâtre à Pretoria. L'arrestation de Omar El Béchir était improbable. Alors qu'il bénéficiait d'une immunité accordée à tous les participants au sommet de l'Union Africaine (Ua), la justice Sud africaine, saisie par une Ong, a décidé de retenir Omar El Béchir aux fins d'exécuter les mandats d'arrêt internationaux émis contre lui. Avant que la justice ne rende son délibéré, le président soudanais a réussi à s'éclipser. Mais que lui reproche-t-on au juste?Omar El Béchir n'a pas attendu le verdict de la justice sud africaine. Le président soudanais a filé à l'anglaise.
Interdit de sortie du territoire sud africain, alors qu'il participait au sommet de l'Union africaine, El Béchir est parvenu à prendre son vol pour le Soudan alors que la justice n'avait pas fini de statuer sur la demande d'arrestation formulée par la Cour pénale internationale (Cpi). Un véritable camouflet pour l'Organisation des nations unies (Onu) et la Cpi, qui le traque depuis 2009. Aujourd'hui, deux mandats d'arrêt internationaux planent sur la tête du président soudanais. Depuis 2009, pour crimes de guerre et crimes contre l'humanité. Et en 2010, pour génocide par la Cour Pénale internationale (Cpi).Président du Soudan depuis 26 ans Omar El Béchir, 71 ans, a été réélu à la tête du pays en avril pour un nouveau mandat avec 94,5% des voix au terme d'une élection boycottée par une partie de l'opposition et largement contestée à l'étranger. C'est en 1989 qu'il accède au pouvoir par la grâce d'un coup d'Etat.
Il renverse le Premier ministre élu Sadeq al-Mahdi et prend la tête du Conseil du commandement révolutionnaire pour le salut national. Le 16 octobre 1993, il prend officiellement la fonction de chef de l'Etat. El Béchir s'allie à l'islamiste Hassan al Tourabi. Et Khartoum devient le repère des islamistes jihadistes. En réaction, les Etats-Unis mettent en place en 1997 le Soudan en embargo. Ce qui plombe l'économie du pays. Les relations entre Béchir et Tourabi se gâtent. Le président soudanais le met à l'écart avant de le faire incarcérer pour assumer seul le pouvoir.Dans les années 2000, son magistère est marqué par des négociations avec les indépendantistes du sud du pays, un rapprochement avec la République populaire de Chine et la guerre civile au Darfour. La rébellion est combattue par les forces armées et les milices affiliées au pouvoir. Pas moins de 300 000 morts et plus 2 millions de déplacés, sont chiffrés par l'Onu. Ce qui lui a valu des poursuites contre la justice internationale.
Le 14 juillet 2008, le procureur de la Cpi, Luis Moreno Ocampo, demande aux juges de l'instance internationale d'émettre un mandat d'arrêt à charge contre Omar El Béchir parce qu'il aurait commis des crimes de génocide, des crimes contre l'humanité et des crimes de guerre au Darfour. Le procureur accuse El Béchir d'être à l'origine d'une campagne systématique d'intimidation, de meurtres, de viols contres trois groupes ethniques du Darfour : les Four, les Masalit et les Zaghawa. Les campagnes orchestrées par le gouvernement soudanais ont de plus forcé le déplacement de plus de 1,5 millions de personnes. La chambre préliminaire, composée des juges Ahua Kuenyehia du Ghana, Anita Usacka de la Lettonie et Sylvia Steiner du Brésil, décide le 4 mars 2009 que la preuve est suffisante pour émettre un mandat d'arrêt contre lui. Les juges de la Cpi réfutent la preuve soumise par le bureau du procureur au sujet de l'accusation de génocide.
Après la présentation de nouvelles preuves, la Cpi lance le 12 juillet 2010 un nouveau mandat d'arrêt contre le président soudanais. En plus des accusations de crimes de guerre, et crimes contre l'humanité, il est poursuivi pour génocides contre les Fours, les Masalit et les Zaghawa. Le président soudanais est également accusé par le juge de la Cpi de détournement portant sur neuf milliards de dollars, qui seraient en partie logés chez Lloyds banking group. Béchir devient ainsi le premier chef d'Etat en exercice recherché par la Cpi et accusé de génocide devant la justice internationale. Malgré le feu vert de l'Otan et de Amnesty international, la Ligue Arabe et l'Union Africaine refusent de donner suite au mandat. Depuis que les mandats d'arrêt ont été émis, El Béchir s'est déplacé en Libye, au Qatar, en Egypte, au Tchad, à Djibouti et au Kenya sans être inquiété.
Auteur: Lala Ndiaye-Senewebnews
Publié le: Lundi 15 Juin 2015
Commentaires (0)
Participer à la Discussion