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"N.W.A - Straight Outta Compton" : le gangsta rap américain passé au tamis hollywoodien

Auteur: france24

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Chaque mardi, France24 se penche sur deux films qui sortent dans les salles françaises. Cettesemaine, une plongée dans l'intimité de quatre prostituées marocaines avec "Much Loved", de Nabil Ayoub,et l'univers du gangsta rap passé à la moulinette hollywoodienne dans"N.W.A - Straight Outta Compton", de F. Gary Gray.

Si l’on s’en réfère à l’affiche, c’est donc l'histoire du "groupele plus dangereux du monde" que F. Gary Gray entend nous raconter avec"N.W.A - Straight Outta Compton". Dangereux pour qui ? Dangereux pourquoi ? On ne saurait répondre tant ce biopic choral retraçant le parcours de cequ’il est convenu de présenter comme les pionniers du gangsta rap américain,confine au certificat de respectabilité.

Mais tout d’abord, c’était quoi N.W.A ? Une bande de rappeurs qui ouvritune page de la musique américaine avec la sortie en 1988 de "StraightOutta Compton", littéralement "Tout droit sorti de Compton", unquartier ultra-violent de Los Angeles dont sont issus les cinq membres dugroupe. Véritable cri de révolte d’une jeunesse livrée à elle-même et auxviolences policières, l’album bouscule le monde de la musique par la radicalitéde ses paroles. En témoigne son titre phare "Fuck Tha Police" (nulbesoin de traduire) qui vaudra à N.W.A quelque souci avec les autorités, maisaussi une renommée mondiale. Ces agitateurs alors méconnus font aujourd’huiréférence dans l’univers du hip-hop : Eazy-E, Dr. Dre et Ice Cube, pour neciter que les plus connus.

C’est leur fulgurante ascension que raconte scolairement le film : lagalère de la rue, les premières scènes dans les clubs underground, la signaturedu premier contrat avec des managers blancs pas très bien intentionnés, lasortie de l’album, les tournées quasi orgiaques aux quatre coins desÉtats-Unis, les villas de luxe et la rivalité entre les membres du groupe, à laquellela mort d’Eazy-E du sida en 1995 viendra mettre un point final. Une décennie,donc, durant laquelle le gangsta rap va s’imposer dans le paysage musical UScomme un éléphant dans un magasin de porcelaine.

Sageet pompier

C’est cela, l’histoire de N.W.A. Celle d’une émancipation, d’uneeffervescence, d’une révolution culturelle menée par des autodidactes qui ontsu bousculer les codes de l’industrie musicale en imposant les leurs (tel IceCube qui saccage le bureau du patron de Priority Records à coups de batte debaseball).

De tout cela, onétait en droit d’attendre un film mal élevé. Malheureusement, F. Gary Gray -cornaqué, entre autres, par Dr. Dre et Ice Cube à la production - s’estcontenté de livrer un biopic sage et pompier, un pur produit hollywoodien sansrelief dont le seul but est d’installer définitivement son sujet au Panthéon dela musique américaine. Après deux heures et demie de ce récit égocentré, queretient-on de cette subversion artistique qui, à l’image du rock'n'roll dansles années 1960, incarnait le diable dans bien des foyers américains ? Rienqu’une accumulation de stéréotypes éculés sur le milieu (des flingues, de lamarijuana, des grosses voitures, des petites pépées se trémoussant seins nus aubord de la piscine, etc.). On se croirait dans un vieux film à costumes qui,avec le même souci d’exhaustivité d'une fiche Wikipedia, se complaît à fairedéfiler à l’écran les figures historiques du gangsta rap première génération(coucou Snoop Dogg, coucou Tupac).

Il y a quelque chose de risible à ce que les anciens membres de N.W.Aaient voulu se peindre en "bad boys" au grand cœur, aient misé tantd’énergie à démontrer de manière systématique que les malotrus, lesmalhonnêtes, les vrais voyous, c’étaient les autres. Au premier rang desquels,Jerry Heller, le manager manipulateur, ou Suge Knight, le truand businessman.

Rien de nouveau cependant. Bien avant la naissance du gangsta rap, lesécrivains avaient déjà compris l’intérêt d’écrire leur propre légende."Vous qui aimez la gloire, soignez votre tombeau", disaitChateaubriand. On l’ignorait, mais les membres N.W.A sont en fait de grandsromantiques.

Auteur: france24
Publié le: Mercredi 16 Septembre 2015

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