Calendar icon
Monday 03 November, 2025
Weather icon
á Dakar
Close icon
Se connecter

Faut-il créer le service national écologique minimum ?

Auteur: Seneweb News

image

Faut-il créer le service national écologique minimum ?

Le désert frappe à notre porte

Il devient de plus en plus fréquent, quand on parcourt le Sénégal, de se rendre compte que l’on aperçoit de moins en moins d’arbres par rapport à la situation d’il y a 10, 20 ou 30 ans.

Le paysage que l’on voit sur la photo ci-contre, n’est pas celui du Ferlo au Nord-Est du Sénégal, connu pour être semi-désertique. La photo a été prise dans la zone située entre Diamniadio et Mbour, précisément sur l’autoroute à péage, un peu avant le rond-point où se sépare la voie qui mène vers Sindia, de celle qui va vers Popenguine.

L’image permet de constater un fait très alarmant : un seul arbre peut être dénombré à vol d’oiseau (un manguier tout vert et fleurissant) entre l’autoroute à péage et l’Aéroport International Blaise Diagne (A.I.B.D) sur une distance bien supérieure à 2 Km.

Dans maintes zones de notre pays, l’on peut constater une disparition progressive de notre savane arborée, laissant place à une sèche savane arbustive voire simplement herbeuse, ou même quelquefois à un paysage de désolation dénudé de tout couvert végétal.

La poussière fréquente qui envahit notre pays n’est-elle pas un autre signe de l’arrivée du désert ?

Lors d’un déjeuner dans le restaurant d’un Européen, à Saly, le patron disait en parlant du temps qu’il faisait « dans votre pays, on a les quatre saisons dans le même jour » pour signifier entre autres qu’il fait très chaud le jour et très froid la nuit. Ces paroles du restaurateur étaient entendues juste une heure de temps après que je venais de prendre la photo dont il est fait allusion ci-dessus. Ces paroles rappellent en effet ce que nous ont appris les géographes : l’amplitude thermique élevée typique du climat désertique.

Ne pas être sensible à notre environnement, c’est faire comme si Dieu n’existait pas ou comme s’il nous a posé,en tant que simple décor, les arbres, arbustes et autres plantes qui nous entourent, tels des figurants dans une pièce de théâtre.

C’est à notre avis ne pas s’approprier ce qu’il nous dit dans le Coran, comme quoi ce qui nous soigne et nous nourrit, il nous l’a mis autour de nous.

Les nations qui observent et étudient leur environnement avancent plus vite que les autres ; parce que la nature inspire science et innovation.

Les bienfaits de l’arbre et des plantes

Rappelons les bienfaits de l’arbre, ils :

purifient l’air en absorbant le gaz carbonique et en nous restituant de l’oxygène ; les polluants et les poussières en suspension dans l’air peuvent être captés par les feuilles d’arbres ;fixent le sol et luttent contre son érosionréduisent le volume des eaux de ruissellement et les dommages causés par les inondations, et peuvent bloquer l’avancée de la mer ;par leur transpiration, dégagent de la vapeur d’eau qui influe sur le degré d’humidité locale, tempérant ainsi les variations extrêmes du climat, réduisant donc l’amplitude thermique. C’est à cause de cette propriété qu’on dit aussi que l’arbre appelle la pluie, parce qu’à terme c’est l’évaporation qui se transforme en nuages puis en pluies ;nous protègent contre la chaleur en nous servant d’abris ;constituent des brise vents pour nos champs ;nous nourrissent les animaux et nous ;comme les plantes, nous permettent de fabriquer des médicaments pour nous soigner ;pour non pas finir, mais nous en arrêter là, les arbres embellissent nos paysages,donc peuvent contribuer notablement à la relance de notre tourisme.

Les effets de la désertification: appauvrissement de nos sols, menace sur notre élevage et notre patrimoine végétal

Les effets d’une telle désertification progressive, on le sait, sont multiples et relatifs :

à l’appauvrissement de nos sols qui ne sont plus suffisamment fixés,deviennent pauvres en humus que peuvent leur donner les feuilles des arbres qui tombent ;

à la raréfaction de l’herbe pouvant servir de pâturage au cheptel ;à l’effondrement de l’économie de cueillette ;à l’appauvrissement de notre pharmacopée,  donc la réduction de nos chances de parvenir à une industrie pharmaceutique propre ;

Un article récent paru dans le journal « le Soleil » du 21 février 2018, de monsieur Oumar KANDE fait part de l’alerte du colonel Papa Momar FAYE ancien conservateur des parcs nationaux du Sénégal, sur les risques de disparition de cent (100) plantes médicinales dans six (6) régions du Sénégal.

à l’enlaidissement de nos paysages, etc…

Quelles solutions ?

A l’occasion de la célébration du 57ème anniversaire de notre indépendance, notre Président annonçait sa décision de faire en sorte que notre armée prenne une part privilégiée dans la préservation de notre environnement, compte tenu du fait que la détérioration de celui-ci constitue une des principales menaces auxquelles notre pays est confronté.

Une telle décision repose à notre avis sur une idée avant-gardiste : le péril ne vient pas seulement de ceux qui peuvent nous anéantir par la guerre, mais de tout ce qui de façon soudaine ou progressive peut remettre en cause notre existence ou s’avérer délétère pou nous ; et la désertificationen fait partie.

Un service national écologique pour reboiser le Sénégal

Le péril existentiel majeur s’est avéré depuis notre indépendance, non pas venird’un ennemi armé, mais concerne notre espace vital, notre environnement naturel, de façon insidieuse et peut être imperceptible pour ceux qui se confinent dans notre capitale.

Dès lors ne devons-nous pas instituer un véritableservice national écologique (obligatoire ou facultatif) qui se fixera comme objectif d’initier, d’organiser et de pérenniser un reboisement à grande échelle de notre territoire ?

Nos experts forestiers nous indiqueront les espèces les plus appropriées pour une telle action, mais nous pensons empiriquement à des arbres fruitiers tels que les manguiers.

Le manguier se contente de peu d’eau et ses feuilles restent vertestoute l’année.

Sur la photo, le petit manguier semble nous parler, comme pour nous dire « ici je suis le dernier rempart ».

Une telle approche permettrait par la même occasion à notre pays de booster considérablement ses exportations de mangues, les mangues sénégalaises étant parmi les meilleures au monde.

Le projet de la grande muraille verte a été une bonne initiative qui, bien réalisée et bien suivie, peut contribuer notablement à la lutte contre la désertification ; mais on ne doit pas penser que le désert « ne peut pas passer par-dessus un mur ».

Le service national écologique engagerait tous les jeunes sénégalais âgés de 18 ans pour quelques mois, qui s’occuperaient de reboiser tout notre pays et d’entretenir les bois et forêts ainsi créés.

Le service national écologique devrait faire jonction avec une économie de culture fruitière dans des conditions à étudier.

Des jeunes ayant fini leur service pourraient se voir octroyer des domaines à exploiter en privé, individuellement ou en association.

L’idée de service national écologiquen’est pas une copie de celle du service national universel (SNU) du président Français Emmanuel MACRON.

Ce dernier a été élu le 14 mai 2017, le président SALL a parlé de faire de l’armée sénégalaise un rempart contre la détérioration de notre environnement le 4 avril 2017, et ce concept que nous avons trouvé clairvoyant et avant-gardiste nous a encouragés à nous asseoir pour rédiger cet article dont l’idée première nous habite depuis plusieurs années.

Les enjeux

Enjeux liés à l’appauvrissement de nos sols et à notre économie

L’insécurité alimentaire constitue évidemment le principal risque induit par l’appauvrissement de nos sols, elle résulterait de la baisse des performances de notre agriculture, de l’amoindrissement de nos ressources fourragères.

Ce risque plane doncà la fois sur les humains et sur les animaux.

La disparition progressive des baobabs, des tamariniers, des « kads » (acacia albida) fait que nous ne sommes pas sûrs de pouvoir continuer, dans les 40 ans à venir, à profiter des succulentes boissons à base de « bouye » (pulpe de pain de singe), de « daqar » (pulpe de tamarin) dans nos sauces ou d’aliments tant prisés par notre bétail (s’agissant du kad).

Tous les secteurs tournant autour de l’agriculture, de l’élevage, de l’économie de cueillette, et de l’économie tout court peuvent à l’avenir être mis en danger, avec comme corollaire des pertes d’emplois, une neutralisation potentielle des efforts fournis pour lutter contre la pauvreté, une exacerbation de l’exode rural.

Enjeux liés à l’enlaidissement de nos paysages

Le sud de notre pays, partie la plus verte, a constitué pendant longtemps celle qui attirait le plus de touristes.

Tout le monde sait que la conservation du patrimoine écologique dans ces régions y est pour beaucoup.

Les touristes étrangers, comme les Sénégalais d’ailleurs sont attirés par notre « Verte Casamance ».

L’arbre et les plantes attirent et incitent à la découverte. Mais ils ont de moins en moins de place dans nos villes et nos cités et même nos villages. La plupart des travaux de terrassement préalablesà l’installation de nos cités commencent par un anéantissement des arbres et le plus souvent sans replantage. Si vous cherchez de l’ombre pour vous garer dans une allée de nos cités, vous risquez de passer autant de temps que pour trouver une place de parking au centre-ville de Dakar.

Enjeux liés à l’appauvrissement de nos ressources botaniques donc à la réduction des chances pour créer une véritable industrie pharmaceutique propre

Les arbres et les plantes ont depuis l’aube des temps été utilisés par l’homme pour se soigner. L’un des médicaments les plus répandus à travers le monde, l’aspirine trouve son origine dans l’écorce d’un arbre qui s’appelle le Saule.

Bon nombre d’autres médicaments sont, même si on peut être amené à leur trouver par la suite pour certains, des substituts de synthèse, mis au point à partir de végétaux ; les wolofs ne s’y trompent d’ailleurs pas car ils appellent le médicament « garab » qui veut dire arbre.

Notre flore très diversifiée, dont l’existence est menacée par le processus de diversification, recèle de nombreuses espèces dotées de principes actifs à efficacité thérapeutique scientifiquement reconnue et pour beaucoup plus encore, empiriquement avérée.

De nombreuses études, mémoires et thèses ont été effectués, soutenus, sur les propriétés thérapeutiques du « Nguer » (GuieraSenegalensis), du « Mbal » (EuphorbiaHirta), de la pervenche de Madagascar (Catharanthusroseus, qui sert de base à la fabrication de médicamentstrès chers contre le cancer), du « Poftan » (calotropisprocera) et tant d’autres encore, à notre éminente faculté de médecine et de pharmacie de Dakar ou ailleurs.

Les principes actifs reconnus sur ces plantes intègrent des classes thérapeutiques qui ciblent trois (3) catégories de maladies faisant partie des plus fréquentes dans nos pays :

les maladies diarrhéiques (notamment chez les enfants de 0 à 5 ans ) ;les maladies broncho pulmonaires (encore surtout dans la classe d’âge 0 à 5 ans) ;les maladies à forte mortalité chez les adultes, que sont l’hypertension artérielle et le cancer.

Ce ne sont pas seulement les études qui ont révélé l’efficacité d’une bonne partie de notre pharmacopée, mais l’expérience pratique, médicalement suivie.

J. KERHARO, ancien professeur de pharmacognosie, de botanique et de biologie végétale à la Faculté de Médecine et de Pharmacie de Dakar, rapportait en 1973 qu’entre 1945 et 1948 une sévère épidémie de « diarrhée cholériforme » survenue en Haute Volta (ancien Burkina Faso) avait été éradiquée par une administration d’infusion de « Nguer », après que tous les traitements classiques furent utilisés sans résultats.

Tout le problème réside, dans le hiatus entre le niveau de nos ressources humaines, composées entre autres de professeurs agrégés dans de multiples spécialités de la médecine et de la pharmacie, et l’extraversion quasi-totale de notre consommation de médicaments malgré la disponibilité de plantes médicinales à propriétés curatives reconnues.

Loin de nous l’idée de préconiser ou d’encourager l’usage direct des plantes à des fins thérapeutiques comme le font les guérisseurs.

A notre avis, l’utilisation des plantes doit se faire scientifiquement dans le cadre de la médecine moderne qui n’est pas comme on le dit souvent une médecine  occidentale. Cette médecine procède d’une démarche rationnelle et la rationalité est universelle.

Il faut que notre pharmacopée converge vers la médecine moderne, scientifique, via une industrie pharmaceutique propre, génératrice d’emplois et non qu’elle reste dans une démarche thérapeutique empirique et hasardeuse de « guérisseurs ».

Ceci n’est pas une diatribe contre la médecine dite traditionnelle, mais à notre sens, on ne doit y faire recours qu’après avoir épuisé les possibilités de la médecine moderne, notamment lorsque celle-ci engage un pronostic vital.

La mise en place d’une véritable industrie pharmaceutique mettant en valeur nos plantes médicinales s’impose, mais la désertification ferait reculer considérablement la réalisation de cet objectif.

D’aucuns pourraient trouver extrémiste de proposer une « armée de planteurs » pour reboiser et entretenir les arbres qui auront été plantés (bien entendu après une formation appropriée) ;mais nous ne pensons pas qu’une telle proposition soit exagérée, car depuis le Président SENGHOR on parle de reboisement, mais nous avons l’impression que ce qui reste à faire est beaucoup plus important que ce qui est déjà fait par l’Etat, les Organisations telles que l’ONG NEBEDAY, dont l’action est à saluer fortement, sans oublier la  coopération internationale dont la coopération canadienne, qui très précocement (depuis les années 60) a eu l’initiative de financer l’érection de la bande de filaos tout au long de notre grande côte, sur la zone des Niayes.

La bande de filaos a considérablement contribué à ralentir l’avancée de la mer, particulièrement, à la lutte contre l’ensablement des cuvettes maraîchères.

Nous pensons qu’il y a urgence et qu’il doit s’agir maintenant de reboiser non plus une partie du Sénégal mais tout le Sénégal.

Cheikh Tidiane MBENGUE

Ancien Directeur des Services Cliniques, Laboratoires et Pharmacies

de l’ASBEF.

Ancien Directeur Financier de l’Union Pharmaceutique Interafricaine.

Expert Comptable- Conseil d’Entreprises

Auteur: Seneweb News
Publié le: Mardi 20 Mars 2018

Commentaires (0)

Participer à la Discussion