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5 % de croissance : Trop peu pour lutter contre le chômage des jeunes au Sénégal

Auteur: Awa DIOP

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5 % de croissance : Trop peu pour lutter contre le chômage des jeunes au Sénégal

L'économiste Amath Ndiaye (FASEG-UCAD) dénonce une « croissance sans emploi » et appelle à une réorientation budgétaire radicale pour absorber les 200 000 nouveaux arrivants annuels sur le marché du travail.

L'annonce d'un taux de croissance du Produit Intérieur Brut (PIB) de 5 % pour 2026 par le gouvernement sénégalais est saluée sur le plan macroéconomique, mais elle est jugée « largement insuffisant pour stabiliser l’emploi » par l'économiste Pr Amath Ndiaye, de la FASEG-UCAD. Dans une tribune critique, l'expert estime que ce chiffre ne permet pas de relever le défi le plus pressant du pays : l'emploi des jeunes.

L'analyse de l'économiste repose sur l'élasticité emploi-croissance, estimée à 0,6 au Sénégal. Selon ce calcul, chaque point de croissance génère environ 29 000 emplois. « Avec une croissance prévue de 5 %, l’économie sénégalaise pourrait créer autour de 145 000 emplois », explique le Pr Ndiaye.

Ce chiffre est loin d'être suffisant pour absorber la demande. Selon les données de l’ANSD, le marché du travail enregistre en effet « entre 200 000 et 300 000 nouveaux entrants chaque année ».

Conséquence directe : cette dynamique laisse un déficit annuel de 50 000 à 150 000 emplois, venant inéluctablement « aggraver le chômage et le sous-emploi », en particulier parmi les jeunes.

Ce déséquilibre, persistant depuis plusieurs années, s'explique par la nature même de la croissance sénégalaise, que l'économiste qualifie de « croissance sans emploi » (jobless growth).

La vitalité du PIB est en grande partie assurée par des secteurs à faible intensité de main-d’œuvre : « hydrocarbures, télécommunications, finance, grands travaux publics ». Ces secteurs ont un impact fort sur les chiffres nationaux mais un effet limité sur l'emploi de masse. « Les activités à forte intensité de travail — agriculture, transformation agroalimentaire, artisanat, BTP local, services marchands — peinent encore à se hisser au cœur de la stratégie économique nationale », déplore l'expert.

Résultat : la croissance « ne se traduit pas en emplois décents ni en amélioration significative du pouvoir d’achat ».

Face à cette urgence, le Pr Ndiaye appelle à un changement de cap budgétaire en cette période d'ajustement. Pour lui, la solution passe par la transformation de la dépense publique en un « levier d’emploi » plutôt qu’en un simple outil de gestion courante.

Il préconise de « réduire les dépenses de fonctionnement de l’État » – notamment les avantages non productifs et les doublons institutionnels – afin de réorienter ces ressources vers l'investissement public productif.

Les priorités budgétaires doivent impérativement redevenir : les infrastructures de base (énergie, numérique, hydraulique), la formation professionnelle, la santé et l'amélioration de la productivité agricole.

Pour atteindre la stabilité de l'emploi, l'économiste recommande au Sénégal de viser une croissance plus ambitieuse, de 7 à 8 % par an, et surtout « plus inclusive et plus intensive en travail ».

Cela suppose notamment :

Une stratégie industrielle et agricole fondée sur la transformation locale et la création de chaînes de valeur.

 Une politique d’emploi active : soutien aux PME, incitations à l’embauche et promotion de l’entrepreneuriat.

 Une gouvernance budgétaire exemplaire, orientée vers la réduction des inégalités territoriales.

« Le taux de croissance de 5 % prévu pour 2026 ne permettra pas de stabiliser le chômage ni de répondre à la pression démographique », conclut le Pr Ndiaye. Il insiste : « Réduire le train de vie de l’État, investir dans les secteurs productifs et promouvoir une croissance inclusive : voilà les véritables priorités. »

Auteur: Awa DIOP
Publié le: Dimanche 26 Octobre 2025

Commentaires (4)

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    Fall il y a 5 heures

    Évidement vous verrez peu ou pas de commentaires de mes compatriotes sénégalais sous cet article.

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    Kaïz il y a 4 heures

    Ça c'est même un rêve irréalisable.

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    coddoo il y a 3 heures

    et quel est votre avis et commentaire sur ce sujet?

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    Human Being il y a 5 heures

    Une croissance déséquilibrée (par rapport au taux de croissance de la population) se fait ressentir partout. Personne n'ose en parler dans les pays africains, mais il faudra à un moment ou à un autre stabiliser d'abord la croissance de la population pour envisager le développement. Espérer l'émergence avec une croissance exponentielle de la population c'est comme pédaler son vélo à la poursuite d'une voiture qui roule à près de 100 kms/heure et espérer la rattraper.

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    Grabo il y a 2 heures

    Il y a une dette de 5000milliards à payer en 2026. Dans ces conditions il n ya aucune marge pour faire quoi que ce soit.
    Payer les salaires et fonctionner devient un casse tête. Ils essayent de boucher les trous au jour le jour. Rien de plus.

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    Lami il y a 1 heure

    C est surtout que la croissance est maintenue artificiellement grâce aux gazs et pétrole mais en réalité la croissance à chuté avec bougre d'âne et bougres andouille.

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