O. Camara est un jeune homme originaire de Dianah Bah, dans la région de Sédhiou. Animé par l'espoir d'une vie meilleure, il avait embarqué clandestinement sur une pirogue de fortune, depuis l'île de Betenty, pour rejoindre ses dizaines de camarades déjà à Barça. L'embarcation surchargée avait pris le large pour les iles Canaries.

Mais le destin en a décidé autrement, au large des côtes mauritaniennes. Prise dans une violente tempête, la pirogue n'a certes pas chaviré, mais les neuf heures de pluie avaient fini de transformer l'espoir en cauchemar. O. Camara et ses compagnons se sont retrouvés à la merci de l'océan déchaîné qui déversait dans l'embarcation des tonnes d'eau à évacuer. Un mort fut dénombré.

Le jeune Camara, qui s'activait dans son village dans l'agriculture, l'élevage de poules et dans l'horticulture, eu le profond regret d'avoir quitté son village natal pour une aventure aussi périlleuse dont il porte encore les cicatrices invisibles.

Lorsque le capitaine de la pirogue a renoncé au voyage, ce fut la grande désolation. Et c'est au large des côtes gambiennes que les cent occupants rescapés ont été largués pour rejoindre leurs familles. O. Camara, sans le sou, a emprunté la route de Farafeni à pied. Il lui a fallu plus de 24 heures de marche pour fouler le sol de Farenni. Là, il a rechargé son portable et informé son père de sa douloureuse situation. Ce dernier lui a envoyé de l'argent pour se soigner à Dakar, auprès d'un parent.

Aujourd'hui, ses camarades l'appellent "Espagne". Au départ, il en pleurait, au souvenir de son camarade resté dans l'Atlantique. Désormais, il en rit, l'insoutenable douleur s'étant émoussée.