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Tuesday 02 September, 2025
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Laxisme en dur, victimes en poussière

Auteur: Mass Massamba NDAO

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Encore un drame, encore des morts. Et cette fois, c'est à Touba, encore. Comme un mauvais remake d'un film tragique sans fin, un bâtiment en construction s'est effondré, ensevelissant trois vies sous les gravats. Le mois dernier, ils étaient onze à périr dans des circonstances similaires. À Dakar, aux Almadies, en mai, deux autres corps sans vie ont été retirés d'un autre immeuble effondré. Même scénario, même silence, bis repetita.
Au Sénégal, les bâtiments tombent. Comme des cartes. Beaucoup détourner le regard vers ailleurs. 
Les experts du BTP, eux, n'en reviennent plus. Les causes ? Multiples et connues : absence d'études sérieuses, économies de bouts de plan, plans de construction bâclés, matériaux de qualité douteuse, contrôle quasi inexistant… Bref, une chaîne de responsabilités cassée dès le premier maillon. Construire un immeuble ne relève pas d'un miracle divin, mais d'un processus rationnel : étude du sol, dimensionnement des charges, fondations adaptées, vérifications systématiques, contrôle des matériaux. Rien de tout cela ne devrait être négociable. Mais chez nous, on saute les étapes comme on saute les normes. On construit vite, mal, au rabais. Parce que « les études, c'est trop cher ». Et puis surtout, "Yallah bakhna" (Dieu est bon). 
On bâtit au nom de la foi ce que la rigueur aurait pu éviter. On élève des immeubles sur des prières, on entre des familles dans des négligences.
Mais jusqu'à quand allons-nous tolérer cette barbarie urbaine ? Jusqu'à quand allons-nous regarder la mort s'empiler dans les failles de notre silence ? Après chaque effondrement, c'est le même refrain : consternation, déclarations, indignation. Puis vient le trou noir. Et dans six mois, sur comptera d'autres morts. Le cycle est rodé.
Car ce laxisme ne touche pas que nos immeubles. Il habite aussi nos routes crevassées, avec leurs lots de morts, nos hôpitaux vétustes. 
La libération est structurelle. La mémoire est courte. Dans un pays qui a du déjà vu sombrer le Joola, s'embraser le marché de Sandaga, ou mourir des dizaines de personnes dans des séries d'accidents, rien ne semble plus alarmer.
 L'oubli, chez nous, est une matière première. Et visiblement, elle est produite localement, en quantité industrielle.
À quand une vraie réforme du secteur du bâtiment ? À quand des audits systématiques sur les chantiers ? À quand des sanctions contre les promoteurs véreux, les ingénieurs complices, les agents de contrôle absents ? Ce pays ne manque pas de lois. Il manque d'applications. Et de respect pour la vie.
Il est temps que les morts pèsent sur les consciences et que l'urbanisme cesse d'être une jungle où seuls les plus imprudents prospèrent. 
Il est temps que les immeubles cessent de tuer. Sinon, bientôt, ce ne sera plus des effondrements. Ce sera un écroulement général. 
Auteur: Mass Massamba NDAO

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