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Formalisation des femmes : L’accès au financement, un obstacle majeur

Auteur: Léna THIOUNE

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Formalisation des femmes : L’accès au financement, un obstacle majeur

Si la formalisation est souvent présentée comme la clé de l’autonomisation des femmes, l’accès au financement reste le maillon faible de cette équation. Invitée de l’émission "Seneweb Éco" de ce dimanche 28 septembre, Maïmouna Diagne, présidente fondatrice de la Plateforme africaine pour l’autonomisation des femmes (PAAF) a insisté sur ce point, soulignant que « seuls 8 % des femmes ont accès à un crédit bancaire formel. Les autres doivent se débrouiller avec des financements parallèles, parfois très chers ». Le manque de garanties, notamment foncières, accentue cette exclusion.

En effet, pour les institutions financières classiques, le problème des garanties demeure central. Beaucoup de femmes ne disposent pas de titres fonciers ni d’actifs reconnus par les banques, ce qui les empêche de présenter des cautions solides. Or, sans financements, la formalisation se vide de son sens : impossible d’investir, de moderniser son activité ou encore de candidater à des marchés publics.

Face à cette réalité, des solutions émergent. Maïmouna Diagne cite notamment les nano-crédits de la DER, proposés avec un taux d’intérêt plafonné à 5 %, loin des taux usuraires pratiqués dans certains circuits informels. Elle rappelle aussi le rôle des tontines et des systèmes d’épargne solidaires, qui permettent à des milliers de femmes de financer des activités à petite échelle. Mais ces mécanismes, aussi ingénieux soient-ils, restent insuffisants pour transformer les initiatives individuelles en entreprises durables.

La mutualisation apparaît ainsi comme une voie d’avenir. En se regroupant en coopératives, les femmes gagnent en visibilité, en volume de production et en crédibilité auprès des institutions financières. « Cinquante femmes organisées pour produire du jus, du savon ou des céréales locales peuvent non seulement être formées efficacement, mais aussi répondre collectivement à des marchés plus importants », souligne Mme Ndiaye.

Au-delà de l’innovation financière, la présidente de la PAAF insiste sur la nécessité d’une formation adaptée. Chaque année, son organisation accompagne plus d’un millier de femmes dans la gestion comptable, l’éducation financière et le numérique, afin de renforcer leur capacité à convaincre les bailleurs. « Sans formation, même avec un prêt, il est difficile de tenir sur la durée », dit-elle.

Par ailleurs, Mme Diagne rappelle que la formalisation des activités féminines ne se réduit pas à un acte administratif ou fiscal. Selon elle, c’est un véritable passeport vers la liberté économique et sociale. « Beaucoup de femmes et de jeunes croient que formaliser, c’est seulement payer des impôts. Or, c’est d’abord avoir une reconnaissance juridique, pouvoir ouvrir un compte bancaire, bénéficier d’une couverture sociale, notamment pour la maternité », explique-t-elle.

Pour l’experte, formaliser son activité revient aussi à exister dans les chiffres de l’économie nationale. Tant que les femmes restent dans l’informel, elles demeurent invisibles aux yeux des décideurs et des politiques publiques. « On ne peut pas demander à être représentées si on n’apparaît pas dans les statistiques », insiste-t-elle, parlant même d’un « acte patriotique ».

L’État et ses partenaires multiplient les initiatives pour encourager ce passage vers le formel à travers les formations, la sensibilisation autour du statut d’entreprenant de l’OHADA et l'accompagnement des chambres de commerce. Mais le déficit d’information reste criant. De nombreux artisans ignorent encore les opportunités offertes par la formalisation. Madame Ndiaye cite l’exemple des tailleurs qui, durant la pandémie, fabriquaient des masques pour des intermédiaires formalisés. « Ils auraient pu répondre eux-mêmes aux marchés publics s’ils avaient eu un statut légal », regrette-t-elle.

Auteur: Léna THIOUNE
Publié le: Lundi 29 Septembre 2025

Commentaires (1)

  • image
    Vérité il y a 1 jour

    Dire que le vrai problème des femmes au Sénégal est l’accès au financement n’est pas juste. J’ai dirigé une société de financement et j’ai vu de près que le vrai défi, hommes comme femmes, c’est la discipline financière. Beaucoup détournent les fonds de leur activité et finissent par faire défaut, même quand elles progressent.

    Financer le secteur informel est une aventure risquée que j’ai moi-même vécue à mes dépens. Le besoin n’est pas plus d’argent, mais de discipline dans la gestion.

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    Bene2 il y a 1 jour

    C'est exactement comme vous le dites. Le manque d’intelligence financière est criard.

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