L’embellie statistique du rebasing face aux réalités budgétaires
Le récent rebasing du produit intérieur brut publié par l’ANSD a remplacé l’année de référence 2014 par 2021, entraînant une réévaluation mécanique de l’économie sénégalaise. Le PIB 2021 est désormais estimé à 17 316 milliards de FCFA, soit une hausse de 13,5 %, reflétant une meilleure prise en compte des secteurs émergents tels que l’économie numérique, les services financiers digitaux, l’industrie pétrolière et gazière ainsi que la production de noix de cajou. Ce type d’ajustement, à l’instar du Sénégal, a touché la Côte d’Ivoire qui avait enregistré une augmentation d’environ 20 % lors de son rebasage de 2023, tandis que le Ghana avait vu son PIB croître de plus de 10 % lors de sa révision précédente.
Cette révision statistique modifie automatiquement plusieurs indicateurs macroéconomiques. La dette publique, auparavant évaluée autour de 74 % du PIB, recule mécaniquement vers 65 % selon les chiffres de l’ANSD, tandis que la pression fiscale s’allège légèrement. Toutefois, ces ajustements restent purement comptables et ne traduisent pas une amélioration réelle des fondamentaux budgétaires. Les coûts d’intérêt sur la dette, les besoins de financement à court terme et le déficit budgétaire demeurent inchangés. Comme le souligne Leeuwner Esterhuysen, économiste principal à Oxford Economics, l’opération améliore la situation en apparence sans modifier les contraintes structurelles.
La valeur ajoutée du rebasing réside dans la capacité à mieux connaître la taille réelle des secteurs productifs. L’intégration plus complète de l’économie informelle et des nouvelles activités économiques peut servir de base pour affiner les politiques industrielles, orienter la stratégie de mobilisation des recettes et calibrer les programmes sociaux. Sans traduction concrète en décisions publiques, le rebasing restera une simple embellie statistique.
Si l’effet mécanique sur le taux d’endettement paraît significatif, il demeure insuffisant face aux défis structurels. Le ratio de dette, bien qu’allégé par le changement de base, reste supérieur aux seuils de convergence de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (70 % du PIB). À titre de comparaison, la Guinée a également procédé à un rebasage et affiche un PIB plus élevé à la même échéance, ce qui souligne la nécessité pour le Sénégal de transformer cette révision statistique en véritable levier de politique économique.
La situation budgétaire du Sénégal demeure fragile. La note souveraine à long terme a été abaissée par S&P à « CCC+ » en novembre 2025, sanctionnant l’absence d’accord avec le FMI et la vulnérabilité de la dette, malgré l’effet mécanique du rebasing. Le déficit budgétaire, prévu en baisse de 13,4 % du PIB en 2024 à 7,8 % en 2025, nécessite un engagement soutenu pour rester soutenable et éviter que la croissance économique ne soit compromise par une pression fiscale excessive ou par une accumulation de nouvelles dettes.
L’embellie statistique met en lumière une double réalité. Elle offre une image plus complète et moderne de l’économie sénégalaise et permet de mieux évaluer la contribution des secteurs émergents. Elle n’apporte toutefois aucun soulagement réel aux tensions budgétaires, à la charge de la dette ni aux enjeux de soutenabilité financière. La véritable opportunité consiste à utiliser ces données révisées pour renforcer la mobilisation des recettes, améliorer la gouvernance économique et orienter les investissements vers des secteurs à forte valeur ajoutée, transformant un simple ajustement statistique en un levier concret de croissance et de résilience économique.
Commentaires (4)
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Juste pour comprendre : L’exploitation du pétrole et du gaz a commencé qu'à partir de 2025. On peut supposer il y a encore de la marge pour la progression du PIB !?
C'est intéressant et ça arrive au bon moment.
Mais ce qui est cocasse est le fait que l'agence a calculé 74% de dettes publiques de l'État en 2024. Puis après le rebasing en 2025 on passe à 65%
Il est passé où la dette cachée 😂
Et presque personne n'en parle !!
Si c'est bien l'ANSD qui a dit ça; celà vaut dire qu'il n' y avait pas de dette cachée et que nous nous sommes faits mal tout seul en envoyant de mauvais signaux au reste du monde, ce qui nous a coûté cher. Espèrons un mea culpa salvateur de quelqu'un.
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