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BABA HAMDY DIAWARA, MUSICIEN-COMPOSITEUR-ARRANGEUR «Il y a trop de confusion de rôles dans la musique sénégalaise»

Auteur: Lesenegalais.net

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La scène musicale sénégalaise est emplie de sa touche originale, ces dernières années. Cet artiste au doigté envoûtant a un bagout respectable, de son séjour aux Etats-Unis à son retour au pays, avec, entre autres, une collaboration avec Thione Seck. Baba Hamdy Diawara a l’empreinte d’un concepteur de sonorités doublé d’un parolier et d’un producteur. Le label «1000 Mélodies» s’est aménagé un podium loin des confusions de rôle dans la palette des métiers de la musique, de l’amateurisme ambiant et du star-system. Entretien avec un artiste qui aspire à occuper une place de choix dans le Landerneau musical sénégalais. 

 

Dans l’espace artistique sénégalais, le grand public et les spécialistes vous voient initier, très souvent, de nouveaux concepts. Qu’est-ce qui fait courir Baba Hamdy ?

Je ne suis animé que de la seule volonté de servir mon pays par le biais de mon art. Je suis musicien et j’ai eu à acquérir une certaine expérience aussi bien au Sénégal qu’à l’étranger. J’ai senti qu’il me fallait partager tous mes modestes  acquis avec l’ensemble de mes compatriotes. Comme je refuse de tendre la main ou me faire remorquer par un lead-vocal, je préfère prendre des initiatives et créer de nouveaux concepts pour le plus grand bien de la musique sénégalaise. Mon séjour aux Etats-Unis m’a permis de comprendre qu’il n’y a rien de tel que l’initiative privée. Il faut oser entreprendre pour s’en sortir. Voila tout ce qui me pousse à agir et c’est aussi simple que cela.

Vous êtes le patron de la structure ‘’1000 Mélodies’’. Celle-ci voudrait-elle changer le visage musical du Sénégal ?

Je n’irai pas jusqu’à le dire. Toutefois, je suis conscient qu’il faut faire bouger les choses. Notre génération a énormément de choses à apporter à la musique sénégalaise. Je suis convaincu qu’il faut oser entreprendre et prendre des initiatives pour changer la donne. Je suis musicien-compositeur-arrangeur et, pour cela, je dois prendre des initiatives, histoire de ne pas me contenter d’être derrière un soliste. J’ai un rôle important à jouer dans la musique de mon pays. Je suis parolier, pianiste, arrangeur et producteur car j’ai compris qu’il nous faut prendre notre destin en mains. Il faut savoir rendre à César ce qui lui appartient. Il y a trop de confusion de rôles dans le monde musical au Sénégal. C’est pour cette raison que j’ai voulu m’investir à fond dans le créneau. Il nous faut disposer d’une industrie musicale car les possibilités ne  manquent pas.

Les artistes que vous avez réussi à mettre sur orbite peinent pourtant à convaincre pour les uns alors  que, pour d’autres, le succès a été éphémère. Vos explications ?

Je suis très mal placé pour juger de mon travail. Cependant, je vous ferai savoir que je n’ai pas pour vocation de coacher des artistes. Je fais de mon mieux pour détecter des talents et les mettre sur orbite. Pourtant, je ne vais pas me permettre de citer des noms mais j’ai contribué à l’éclosion de beaucoup de talents. Beaucoup de grandes vedettes de la chanson ont bénéficié de mes services. J’ai travaillé avec des artistes comme Titi, Amy Collé, Alioune Mbaye Nder et tant d’autres. Il ne m’appartient pas de suivre au pas les artistes que j’ai aidé, modestement, à sortir de l’anonymat car ne carrière se gère et il ne faut surtout pas être pressé. Je trouve que j’ai déjà suffisamment travaillé pour la musique de mon pays en essayant de détecter et d’encadrer de nouveaux talents. Le reste n’est plus de mon ressort.

De quel style musical pourrait venir le succès de la musique sénégalaise sur le plan international ?

Là aussi, je ne saurais trop me prononcer car la musique est une affaire de sensations. N’empêche, elle obéit à des normes. Au Sénégal, les musiciens ont vraiment le niveau. En ce  qui me concerne, j’ai eu à travailler avec Sean Paul et d’autres vedettes de cette dimension. C’est pour vous dire que les instrumentistes peuvent s’adapter à tous les styles. Ce qui est non négligeable. Mais, pour arriver à imposer un rythme ou une couleur,  il faudra se conformer à des normes et essayer de mieux codifier le Mbalakh. Le succès ne se décrète pas, mais il faut beaucoup travailler pour toucher le plus grand nombre.

C’est ce qui explique certainement votre album «You Mélodies»…

Je pense que j’ai assez répondu à cette question. Je voulais rendre hommage à un géant de la musique sénégalaise. Youssou est incontournable dans la sphère musicale nationale et aussi internationale. C’est un très grand interprète qui est très mélodique. En ma qualité d’arrangeur, j’ai éprouvé du plaisir à rejouer certains de ses titres et le résultat est là. Dans la vie, il faut savoir donner sans rien attendre en retour. Et c’est cela ma philosophie !

Youssou Ndour a-t-il bénéficié des retombées de cet album ?

Evidement, car ce sont ses œuvres. Je n’ai fait que réadapter des créations. Encore une fois, je n’ai pas réfléchi en termes de gains aussi bien à mon niveau qu’à celui de Youssou Ndour. Il a été très content de mon initiative et il l’a publiquement déclaré. Je pense que cela devrait vous suffire amplement. Il n’y a rien à chercher dans cette décision que j’ai prise sans aucune contrainte. D’ailleurs, Youssou n’était même pas au courant. C’est à la fin que je lui en ai fait part. Il a été très heureux et honoré. Cela me suffit largement !

Par où pèche la musique sénégalaise ? Pouvez-vous nous dire les limites des arrangeurs au Sénégal ?

Je ne suis pas un donneur de leçons encore moins un censeur. Il ne m’appartient pas de juger les limites de notre musique. Je me contente de poser des actes qui témoignent de ma volonté de faire bouger les choses et cela me suffit largement. Je ne me permettrai pas, encore une fois, de juger mes collègues. Tout ce que je peux dire, c’est que la musique est un vaste chantier où seul le travail paie. Il  faut éviter de nous complaire dans la facilité et, surtout, tout faire pour  travailler dur pour essayer récolter des fruits de notre labeur.

Comment analysez- vous la perte d’éclat des artistes comme Abou Thioubalo ou Amy Collé Dieng, entre autres…

Je parlais tantôt de la confusion des rôles. On ne peut pas être chanteur, arrangeur, parolier interprète et chef d’orchestre à la fois. Il faut que les rôles soient mieux distribués et que l’amateurisme disparaisse de nos mœurs musicales. Une carrière doit être bien gérée et il faut tout un ensemble de bonnes résolutions pour remédier à ces maux qui plombent la bonne marche de notre musique. Il s’agit de la précipitation et du star system mal maîtrisé. On brûle souvent les étapes et cela ne pardonne pas dans le show-biz. C’est un milieu où on doit toujours se remettre en cause.

Pourquoi aviez-vous choisi de signer avec Alioune Mbaye Nder et ou en êtes-vous avec ce projet qui avait fait grand bruit ?

Il est vrai que le label ‘’1000 Mélodies’’ avait décidé de travailler avec Alioune Mbaye Nder. C’est à la suite de la sortie de son dernier album, sur lequel j’avais travaillé, que nous avions voulu cheminer ensemble. Il se trouve que les choses tardent à décoller mais nous travaillons à notre rythme et je préfère m’en arrêter là.

Mais ce n’est pas une réponse…

Vous savez bien qu’ici au Sénégal, les nouvelles idées dérangent et je n’en dirai pas plus. Merci de ne pas insister.

Au-delà de la défense de vos droits, qu’est-ce qui explique la mise sur pied d’une structure comme « Clef de Sol » qui regroupe des instrumentistes ?

Encore une fois, je suis conscient que la musique est un vaste champ et chacun peut s’y mouvoir à satiété, selon ses ambitions. Je vous ai dit tantôt que les arrangeurs et les instrumentistes sont à la base de tous les succès de nos grands chanteurs. Pourtant, ils ne sont cités nulle part. C’est pour mettre en valeur le travail de instrumentistes que j’avais pris sur moi de mettre sur place cette nouvelle entité. Il fallait marquer le coup et faire savoir à tout le monde que nous avons notre mot à dire et que nous allons désormais défendre nos intérêts sans attendre que les autres le fassent à notre place. Nous allons organiser des spectacles de manière périodique  tout en mettant sur place de nouveaux concepts pour accompagner des artistes et les aider à bien se mouvoir dans le circuit.

Quid de la confusion avec l’AMS ?

Il n’y a aucun problème avec l’AMS (Association des Métiers de la Musique du Sénégal). Nous avons voulu marquer notre empreinte et prendre notre destin en mains. Au cours du lancement de Clef de Sol, un responsable de l’AMS est venu défendre sa position que nous avons clairement respectée. Nous voulons prendre notre destin en mains et, pour ce faire, nous avons lancé Clef de Sol pour être mieux en phase avec nos aspirations. C’est tout à fait légitime et, à ce niveau, nous n’avons aucun complexe.

Maintenant, vous êtes dans la production audiovisuelle avec « Onde Star ». Pouvez-vous expliquer ce concept ?

Il s’agit d’une émission de  télévision dénommée « Onde Star ». Ce qui signifie : « on devient star ». Nous voulons montrer au public comment on parvient à fabriquer une star. Actuellement, nous sommes à l’ère de la communication. Il faut savoir bien vendre un produit. Pour arriver à cela, nous avons travaillé avec un spécialiste en communication et d’autres grands musiciens comme Vieux Mac Faye et Papis Konaté. Il s’agit de trouver des sosies de grandes vedettes de chez nous. On va les coacher et les prendre en mains. Ils vont se mesurer au cours d‘une émission de télévision et ils se mettront dans la peau de l’artiste choisi. Au cours du lancement qui a eu lieu au mois de mai dernier, nous avons défloré une partie du concept en permettant à deux candidats de  se produire devant les journalistes. Nous avions aussi profité de ce plateau pour expliquer, en long et en large, les dessous de ce projet rénovateur qui nous a pris deux ans. Nous envisageons de lutter contre la médiocrité dans le secteur de la musique en essayant de mettre sur orbite de nouveaux types d’artistes qui pourront faire face à tous les aléas du milieu. De la conception à la réalisation d’un album jusqu’au lancement du produit, aucune étape ne sera sautée. Au finish, le candidat qui aura le plus convaincu le public se verra prendre en charge par le label ‘’1000 Mélodies’’ qui est chargé de la production de l’émission. La 2 STV est uniquement le diffuseur de cette nouvelle émission.

Pourquoi le partenariat avec 2 Stv et pas une autre chaîne ?

Les responsables de cette chaîne de télévision ont été littéralement séduits par ce projet. Big John l’a dit publiquement : ils n’attendent que des initiatives de ce genre. Il faut savoir que dans tous les grands pays, les émissions de télé sont produites par des grandes maisons de production et les médiums se chargent de la diffusion. C’est ce que nous allons voulu faire avec nos propres moyens sans l’aide de personne.

Et vous-y gagnez quoi exactement ?

D’abord, la fierté d’avoir osé franchir le pas. C’est la première fois que des jeunes sénégalais se lèvent pour prendre des initiatives de ce genre sans l’appui d’aucune main extérieure. Tout a été réalisé par mon équipe constituée uniquement de jeunes. Nous avons tout financé sur fonds propres sans l’aide d’aucun sponsor. Tout cela pour vous dire que j’ai mis en avant mon envie de travailler pour la musique de mon pays et de sortir des sentiers battus. Il fallait oser et croire en nous car nous sommes capables de réussir mais faudrait-il croire en nos possibilités... Je suis convaincu de la valeur de mon produit et je suis sûr que je vais le rentabiliser. Pour l’heure, c’est la fierté d’avoir réussi ce challenge qui m’anime le plus. Les retombées suivront inévitablement car j’ai foi en mon travail.

 

Auteur: Lesenegalais.net
Publié le: Dimanche 02 Octobre 2011

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