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16 jours d’activisme : Gorée prête son histoire à la protection des femmes dans l’espace virtuel

Auteur: Seneweb-News

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16 jours d’activisme : Gorée prête son histoire à la protection des femmes dans l’espace virtuel

Un cœur rouge géant trône au milieu de la place Nelson Mandela. Ce symbole ne représente pas une célébration romantique ordinaire. Il bat la mesure d’une urgence sociale et sociétale. L’île de Gorée, habituée au ressac de l’histoire, a prêté son décor séculaire à une cause contemporaine ce mardi 25 novembre 2025. Le Sénégal a choisi ce lieu de mémoire pour lancer la campagne annuelle des 16 jours d’activisme contre les violences faites aux femmes et aux filles.

La communauté internationale observe cette période du 25 novembre au 10 décembre. Le thème retenu pour cette édition cible une menace précise. Il s’intitule : « Ensemble, pour mettre fin à la violence numérique à l’égard de toutes les femmes et filles ».

La cérémonie a vu la convergence de nombreuses personnalités politiques et diplomatiques. Maïmouna Dieye, ministre de la Famille, de l’Action sociale et des Solidarités, a présidé l’événement. Elle avait à ses côtés le préfet du département de Dakar ainsi que le maire de Gorée, Maître Augustin Senghor et la députée Hélène Diouf. Parmi les autres invités de marque, on note aussi les présences de : Jean-Marc Pisani, ambassadeur de l’Union européenne, Carine Robarts, ambassadrice du Royaume-Uni, Hélène De Bock, ambassadrice du Royaume de Belgique, la Claudia Rosero Mosquera, l’ambassadrice de Colombie, Arlette Mvondo, représentante résidente d’ONU Femmes au Sénégal et la Professeure, la professeure Amsatou Sow Sidibe, présidente de la Commission nationale des droits de l’homme.

Le choix de l’île n’a rien d’un hasard logistique. Il relève d’une symbolique expliquée par la ministre dans son allocution d’ouverture. Elle a tenu à revenir sur le lien entre les douleurs du passé et les défis du présent.

« C’est avec une émotion toute particulière que nous venons ici à Gorée, lieu symbolique de mémoire pour procéder au lancement de la campagne nationale des 16 jours d’activisme contre les violences faites aux femmes et aux filles », a-t-elle déclaré.

La ministre a ensuite explicité la connexion entre la violence historique systémique et la violence virtuelle moderne. « Ce choix n’est pas fortuit, c’est le fruit d’une réflexion soutenue visant à faire le lien entre les violences systémiques et la déshumanisation du passé et les nouvelles formes de domination et d’exclusion de l’ère du numérique. Ce lieu hautement symbolique nous rappelle l’urgence de garantir l’intégrité et la dignité des femmes et des filles non seulement dans les espaces physiques mais désormais aussi dans les espaces virtuels. Comme nous y invite le thème de la campagne de cette année “Ensemble pour mettre fin à la violence numérique à l’égard de toutes les femmes et filles”. Ce thème répond parfaitement à l’actualité et à ses dérives avec la montée en puissance des réseaux sociaux, les violences numériques se sont en effet multipliées devenant une nouvelle arme de destruction silencieuse très répandue », estime-t-elle.

Les données statistiques, révélées par elle, viennent appuyer ce constat. Le ministère a précisé avoir commandité une enquête nationale de référence sur le sujet. La collaboration avec le système des Nations Unies et l’ANSD a permis de chiffrer l’ampleur du phénomène. La prévalence des violences numériques subies avant l’âge de 18 ans s’élève à 20,4 %.

Le tableau global dressé par la ministre révèle une situation critique pour la majorité des femmes. « Plus de 80 % des femmes ont déclaré avoir subi une violence numérique à un moment ou un autre de leur vie. L’utilisation abusive des réseaux sociaux par la désinformation, la difamation, le harcèlement, l’usage de données personnelles sans consentement, la menace et le dénigrement constituent pour les femmes et les filles une lourde menace et les exposent à de lourdes conséquences notamment par rapport à leur santé mentale. Mesdames et messieurs, le numérique doit être un espace d’émancipation, pas une nouvelle frontière de la violence », révèle-t-elle.

Face à cette menace, l’État tente d’adapter sa réponse face à cette mutation de la violence. A ce sujet, la membre du gouvernement a rappelé que le cadre législatif a connu des évolutions récentes. La loi 2020-05 adoptée en 2020 a renforcé les dispositions du Code pénal sur le viol et la pédophilie. Par ailleurs, la stratégie « New Deal technologique », lancée par les nouvelles autorités, semble accompagner ces mesures notamment avec sa volonté de promouvoir un accès sécurisé au numérique. La promotion de la cyberculture auprès des populations et de l’administration figure parmi les objectifs spécifiques. Il s’agit de prévenir les risques comme le piratage ou l’escroquerie.

La planification stratégique de l’État s’inscrit dans le long terme. Le second plan d’action national pour l’éradication des violences basées sur le genre couvrira la période 2026-2030. La Direction de la famille élabore ce document. Il servira de référentiel unique pour coordonner les actions de l’État, des partenaires techniques et financiers ainsi que de la société civile.

La prise en charge des victimes représente un autre pilier de l’action gouvernementale. La ministre a évoqué la construction de centres de prise en charge holistique. Un protocole de collaboration multisectorielle formalise cet engagement et il lie les ministères de la Justice, de l’Intérieur, des Forces armées, de la Santé et de la Famille. Le but est d’offrir un soutien complet aux victimes.

Les normes sociales et les mentalités restent toutefois un obstacle important. Le gouvernement mise sur la sensibilisation pour provoquer un changement comportemental. Maïmouna Dieye a cité plusieurs initiatives en cours. Le projet Kaarangé bénéficie du partenariat d’ONU Femmes et du financement d’Affaires Mondiales Canada. Il prévoit des formations pour outiller les femmes. Le projet SWEDD reçoit l’appui de la Banque mondiale et l’assistance technique de l’UNFPA. Il se concentre sur la communication pour déconstruire les normes néfastes.

Le programme de la campagne 2025 semble démontre cette volonté de toucher toutes les couches de la société. Ainsi, des actions précises sont prévues. La sensibilisation sur la santé mentale et la sécurité en ligne impliquera les étudiants de l’UCAD (Université Cheikh Anta Diop). Des débats avec les producteurs de séries télévisées aborderont la représentation de la violence dans les médias. Les forces de l’ordre et de défense bénéficieront d’un atelier spécifique sur la violence numérique. Un « roadshow » parcourra la banlieue dakaroise.

La ministre a lancé un appel direct à trois catégories d’acteurs pour garantir le succès de la lutte. Elle s’est adressée aux décideurs, à la société civile et à la communauté.

« Cette mobilisation cible trois acteurs clés dont l’engagement est indispensable à la victoire finale. D’abord, aux décideurs, je m’inclus dans cet appel, nous devons faire preuve d’un engagement financier et politique inébranlable pour la mise en œuvre effective de l’ensemble de nos politiques et de notre arsenal législatif. À la société civile et aux partenaires, notre succès repose sur la mutualisation, la coordination et la mise en place d’une véritable coalition d’action. Votre rôle dans la sensibilisation, le renforcement des capacités et le dialogue est indéniable. Et enfin, à la communauté, citoyens, leaders d’opinion, médias, la lutte contre les violences est l’affaire de tous. Elle repose sur une respectabilité personnelle et citoyenne », lance-t-elle.

La responsabilité collective est au cœur du message délivré à Gorée. La ministre a insisté sur la nécessité de dénoncer les abus et de partager les connaissances en matière de prévention : « Nous devons agir collectivement en brisant le silence pour combattre l’impunité, dénoncer sans crainte, partager les connaissances sur la prévention et faciliter la prise en charge rapide des victimes. C’est dans notre capacité à nous mobiliser tous ensemble que réside la clé de l’éradication définitive de ce phénomène de la violence. La violence numérique n’est pas une fatalité, c’est un combat.

Un combat que nous pouvons gagner si nous luttons ensemble ».

C’est sur cette promesse de soutien que la campagne des 16 jours a officiellement débuté au Sénégal.

Auteur: Seneweb-News
Publié le: Mercredi 26 Novembre 2025

Commentaires (1)

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    Défenseur il y a 6 heures

    C'est bien comme combat ! Il ne faut pas oublier le "mais " par rapport à la violence faite par les femmes surtout sur les nouveaux nés.

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