C’est un surprenant retour en zone. Un «hors-jeu flagrant», selon les syndicalistes de la Société nationale d’électricité du Sénégal. Après un départ volontaire de la Senelec, Papa Dieng a opéré hier un «come back» fracassant à la rue Vincens de Dakar. «Il était parti parce qu’il ne croyait plus à l’avenir de la boîte, il est revenu aujourd’hui pour récolter des dividendes politiques», s’est étranglé Lamine Diarra, Secrétaire général du bureau exécutif du Syndicat unique des travailleurs de l’électricité/section de Dakar. Lui ne moufte pas. Du moins, en ces heures de forte contestation de son décret de nomination. «Je parlerai le moment venu», a glissé Papa Dieng. Pas un mot de plus. Une stratégie de défense classique ou un simple jeu de ruse, en laissant la parole aux autres pour ensuite mieux répliquer ? En tout cas, le nouveau Dg de la Senelec a toujours fonctionné comme ça. L’homme s’est fait sans tambour ni trompette.
Ingénieur
Etudiant studieux et garçon plein d’ambition, Papa Dieng diplômé de technologie en 1974 à l’Ecole nationale supérieure universitaire de technologie (Ensut)/ Université Cheikh Anta Diop de Dakar, est sélectionné parmi les 2 étudiants ayant une moyenne supérieure à 13/20 pour faire directement la formation d’ingénierie. Deux ans plus tard, en 1976, l’enfant de Pékesse touche son «Graal». Il sort avec le diplôme d’ingénieur option génie civil. Le jeune Papa Dieng est ensuite recruté à la Senelec, en qualité d’agent de la division normalisation et méthodes. De mai 1982 à février 1987, il officie au poste de Chef de service de la division principale, Normalisation et Méthodes, avant de devenir chef de service technique jusqu’en 1993, l’année à la quelle il est promu chef du département technique Réseau et coordination de la Senelec.
Il occupera cette fonction jusqu’en novembre 1998. A la tête de ce Département, il avait pour mission de veiller à tout moment à ce que la qualité de service soit dans les limites de tension et de fréquence fixées par le Cahier des clauses et conditions générales du service public de l’électricité, de coordonner les réseaux régionaux et d’étudier les structures de réseaux. 16 longues années de bons et loyaux services qui ne sont pas passées inaperçues. Du moins aux yeux du président de l’amicale des cadres de la société, Ablaye Diagne. «Je connais Papa Dieng parce qu’il était notre doyen et nous avons vécu ensemble dans l’exploitation de la Senelec. Il a cheminé longtemps à la Senelec à diverses stations. Il a piloté correctement des unités techniques. Et quand il a quitté, ce n’était pas pour insuffisance de résultats. Il avait juste un projet et il a quitté au moment où beaucoup de gens sont partis. C’est un cadre qui a été formé à la même école que beaucoup de nos collègues », témoigne-t-il. Comme pour dire que tout ce bruit qui accompagne la nomination de Papa Dieng au poste de Dg de la Senelec n’est que pur activisme.
«Footeux»
Né en 1951 à Pékesse dans le département de Tivaouane, Papa Dieng a passé une enfance tranquille dans ce patelin du Cayor, couvé par un père rigoureux et très à cheval sur l’éducation de son fils. Môme ordinaire, Papa Dieng ne gambadait pas encore, mais il avait appris et assimilé toutes les valeurs qui forgent un homme. Et l’adulte est resté aujourd’hui le garçon qu’il a toujours été. Papa Dieng est un «toutivore». «Un homme simple, qui mange tout ce qu’on lui présente», témoigne un de ses proches pour camper la personnalité de l’homme qui ne s’entourerait pas de chichis de nouveau riche, ni de comédies d’arriviste. «C’est aussi un homme très discret, laïc au point qu’il ne pratique jamais sa religion (l’Islam) en public. Cela ne fait pas de lui un homme doux. Pape sait encaisser des coups, mais il sait en donner aussi quand il le faut», prévient son proche.
Marié et papa de trois enfants, Papa Dieng est un grand amateur de football, même s’il n’a jamais pratiqué. Sa jeunesse a été marquée par l’équipe du Réveil de Saint-Louis, ancêtre de la Linguère de Saint-Louis. Mais si ce garçon du centre a toujours supporté cette équipe du Nord, c’est grâce à l’enfant du Sud, le défunt Essamaï, Jules François Bocandé, qui a été son joueur préféré. En inconditionnel, qui ne se saoule jamais des hauts faits d’armes de l’ancien capitaine et puis entraîneur des «Lions» décédé le 07 mai 2012 à Metz, Papa Dieng se rappelle toujours le premier match du Senef Bocandé avec l’équipe nationale du Sénégal. C’était contre le Togo et ce jour-là, j’étais au septième ciel», dit-il souvent à ses amis, quand il lui arrive de (re)commenter cette grande rencontre de foot du siècle dernier.
Transfuge
Aujourd’hui Président de la communauté rurale de Pékesse, son village natal et transfuge socialiste qui rejoint l’Alliance pour la République (Apr) du Président Macky Sall à la veille de la Présidentielle 2012, Papa Dieng a été Cadre émérite de la Senelec, qu’il a représenté dans plusieurs instances africaines comme au Comité d’études Normalisation et Recherches de l’Union des producteurs et distributeurs d’énergie électrique en Afrique (Updea). A l’époque, le bonhomme avait effectué de nombreux stages et séminaires en Europe pour enrichir son CV. Une solide expérience qui l’avait poussé à quitter la Senelec en 1998 pour monter sa propre affaire, en mettant sur pied la Société industrielle de matériels électriques (Simelec). Et depuis hier, Papa Dieng a retrouvé la «maison» qu’il avait quittée. Pas comme chef de Département, son poste avant son départ volontaire, mais comme Directeur général de la boîte. Un fauteuil sous haute tension sur lequel il tient en apnée et qui risque de l’électrocuter s’il ne fait pas attention. «Nous l’attendons de pied ferme», a averti M. Diarra. A bon entendeur…
ADAMA DIENG
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