C’est comme dans un film, avec comme acteur principal le «roi des soirées sénégalaises». Aux charretiers qui ont voulu le dévaliser, Salam Diallo a opposé une farouche résistance. L’un des malfaiteurs a pris ses jambes à son cou alors que l’autre a voulu jouer au dur en dégainant un poignard. Deux coups de feu d’un pistolet de calibre 22 long Rifle l’ont convaincu que Salam Diallo ne sait pas que danser «la Goana». Malick Mbengue, l’un des cambrioleurs, est depuis lors dans la Chambre de sûreté de la Brigade de gendarmerie de la Foire, attendant sa conduite au parquet.

 Dans la matinée du lundi 9 mai 2011, alors que le paisible quartier d’Ouest-Foire commençait à se vider de ses occupants partis travailler, deux individus, à bord d’une charrette, sillonnent les coins et recoins de ce secteur. Ils sont habillés comme des gueux et se font passer pour des préposés au ramassage des ordures ménagères. Il est 09 heures, lorsqu’ils se pointent au domicile du chanteur Salam Diallo. L’un, perché sur la charrette, fait le guet. L’autre, identifié plus tard sous le nom de Malick Mbengue, tambourine le portail principal. La fille du chanteur ouvre. Malick lui fait comprendre qu’il est un charretier ramasseur d’ordures, moyennant quelques pièces de monnaie. La fille marchande avec lui et un accord est vite trouvé. Laissant la porte entrouverte, la fille retourne sur ses talons pour récupérer les ordures ménagères. Malick en profite pour accéder au salon et s’emparer de l’ordinateur portable du chanteur posé négligemment sur une table. Un geste qui n’échappe pas à la vigilance de la gamine. Sachant qu’elle a affaire à des malfaiteurs, elle crie au voleur. L’accompagnant de Malick Mbengue, pris de peur, disparaît avec la charrette. Malick tente de l’imiter, mais n’a pas le temps de s’éclipser. Il se retrouve nez à nez avec le maître de maison. Salam Diallo est armé d’un pistolet de calibre 22 long Rifle. Mais ce pistolet est si petit que Malick ne le prend pas au sérieux. Poussant sa témérité jusqu’à son paroxysme, le cambrioleur pose l’ordinateur portable par terre, dégaine un poignard et fait face au chanteur. Ils sont seuls dans la maison, avec comme arbitre la fille de l’interprète de «Goana». La confrontation est inévitable. Ce que le chanteur comprend en premier. Plus rapide que l’assaillant, il tire deux coups de feu qui ricochent sur le pantalon-jean de Malick Mbengue et lui écorchent la peau. Le malfaiteur comprend alors que Salam ne fait pas de la comédie. Il n’est pas sur une piste de danse, mais bien chez lui, devant sa fille. De quoi le galvaniser.  Malick, téméraire mais pas bête, comprend que le rapport de force est inégal. Et que s’il fait la moindre erreur, il vendange sa vie. Il se débarrasse alors de son poignard, se met à genou et lève les mains en l’air. Salam le met en joue, tout en sortant son portable de sa poche pour appeler la brigade de gendarmerie de la Foire.

Quelques minutes plus tard, un pick-up des hommes en bleu se gare devant le domicile du chanteur. Le commandant de la brigade de la gendarmerie de la Foire, l’adjudant-chef Mamadou Kandji, descend de la voiture. Il est accompagné de quelques-uns de ses éléments. Lorsqu’il pousse le portail d’entrée, il tombe sur une scène surréaliste : Salam, ventre bedonnant, le visage grave, tient en respect un inconnu en sueur, malgré cette heure matinale. Lorsqu’il a vu les gendarmes, Salam baisse son pistolet et commence à raconter au commandant de brigade sa mésaventure. Le débit de ses paroles est rapide. Il parle, gesticule et mime les gestes pour se faire comprendre. Les mots ne lui suffisent pas pour se faire comprendre. Pendant ce temps, Malick Mbengue se fait passer les menottes aux poignets. Rideau : le film est terminé. 

Après Salam le chanteur, Salam le conteur et Salam l’homme au grand cœur, disciple de Serigne Fallou Mbacké et pleureur devant l’Eternel, le Sénégal découvre ainsi Salam le héros. Le temps d’une matinée.

Daouda MINE