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Reportage - Saly Portudal : La femme aux deux visages

Auteur: SenewebNews

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Selon une légende, le nom du village de Saly viendrait du prénom d’une jeune fille. Des blancs, venant de débarquer, ont croisé la fille en question qui ne comprenait pas leur langage. Alors que les étrangers lui demandaient comment s’appelait la localité, elle a cru comprendre qu’on lui demandait son nom. Elle a alors répondu : Saly.
 
D’autres personnes pensent que le village est un ancien comptoir d’origine portugaise. Les colons portugais auraient surnommé cet endroit Sali Portugal, une dénomination qui s'est transformée peu à peu en Saly Portudal.
 
Quoi qu’il en soit, Saly est aujourd’hui une station balnéaire très courue qui a été ina ugurée le 24 février 1984, en plein essor du tourisme au Sénégal. Il est devenu un point de départ, de retour d'excursions et de découvertes pour des touristes qui viennent découvrir le Sénégal ou qui sont tombés amoureux du pays.
 
Temple du tourisme sexuel
 
Saly est une commune dotée d’une station balnéaire du même nom, inaugurée le 24 février 1984, au moment où le tourisme prenait son essor au Sénégal. Destination peu courue auparavant, Saly est devenu un site touristique. L’un des plus visités du pays, s’il n’est pas le plus fréquenté. Le nombre de ses habitants est difficile à chiffrer en raison des allées et venues des touristes et la présence de résidents temporaires qui viennent passer à Saly quelques mois par an. Lors du dernier recensement, Saly Portudal comptait 4 006 habitants et 457 ménages. Mais il peut compter jusqu’à 20.000 personnes en pleine saison (touristique). Des complexes hôteliers, discothèques, bars, restaurants, boutiques artisanales, sports nautiques, une nature verdoyante, des aménagements de rêve…, font le décor de ce «paradis terrestre». Ici, on se dispute une clientèle dépensière, au moment où la population autochtone végète, ayant du mal à joindre les deux bouts.
 
En effet, le développement rapide d'un tourisme de masse dans une localité assez démunie n’est pas sans conséquences. Certaines dérives comme la spéculation foncière, la délinquance, la prostitution, la pédophilie… sont notées. Saly est devenu, en l’espace de quelques années, le lieu privilégié du tourisme sexuel.
 
Bienvenue au «paradis»
 
A l’entrée de la station, un élégant portail vous accueille avec un mot de bienvenue. Téranga sénégalaise oblige, la Société d’aménagement des côtes et zones touristiques du Sénégal (Sapco, qui gère la station balnéaire), n’a pas voulu être en reste. A défaut de pouvoir accueillir tout touriste qui foule le sol de Saly, l’astuce a été trouvée. Un mot de bienvenue à l’entrée et d’au revoir à la sortie.
 
Situé à 80 km de Dakar, Saly est un «paradis» pour les touristes. Ici, on est loin du Sénégal de l’intérieur et même de la capitale dakaroise et sa banlieue inondable. La chaussée est impeccable. Les arbres soignés, bien taillés et même peints. Le gazon abondamment arrosé. Les bâtiments imposants et impeccables. Même les banques rivalisent d’architecture. Tout est bien étudié pour faire plaisir aux visiteurs qui ont de l’argent à dépenser.
 
Même le «village artisanal» est d’une propreté impressionnante. Il jure d’avec les autres marchés crasseux. Résultat, les prix sont le triple de ceux qui ont cours à Mbour, ville la plus proche. La clientèle ne marchande guère, si ce n'est pour s’amuser.
 
Au carrefour, un grand panneau indique les noms d'hôtels bardés d'étoiles : le Palm Beach, l'Espadon, Savana, Fram, les Bougainvilliers, les Flamboyants, Club Aldiana, les Villas Neptune, Golf, Emeraude, Safari, Cristallines... On compte à Saly pas moins de 16 hôtels de 2 à 5 étoiles, 30 résidences et 100 milliards d’investissement pour 3 000 emplois créés.
 
Toutes les grandes chaînes d'hôtels  et tours operators y ont un établissement. Des résidences se sont également construites en nombre. Beaucoup d'Européens ou de Dakarois viennent régulièrement séjourner dans les résidences hôtelières qu'ils ont achetées. Parmi eux, beaucoup de Français, de Belges, d’Allemands, de Japonais. Même les colombiens commencent à être fréquents dans la localité.
 
Installés depuis le début des années 80, les grands groupes hôteliers sont la locomotive de cette station balnéaire tournée vers le tourisme. Des séminaires, mariages, symposiums, conférences, bref toutes sortes de manifestations, y sont organisés.
 
La journée, Saly donne l’impression d’une ville européenne. Résidents et touristes errent paisiblement le long des avenues ombragées.
Sur la plage, des femmes marchandent des paréos et chapeaux de paille, sous l’œil amusé de leurs hommes au ventre rougissant ou bedonnant ou de gigolos racoleurs. Les blancs sont les rois. Les noirs leurs serviteurs. Des noirs qui sont souvent barmen, serveurs, gardiens, taximen, guides touristiques…, s’ils ne sont pas des gigolos.
 
Capitale du bronzage et du farniente
 
Avec son interminable plage de sable fin, Saly offre l'avantage d'une baignade sûre. Il est, en effet, le paradis du bronzage et du farniente. L'ambiance est assurée. Et trouver un coin de plage tranquille est chose aisée grâce à l'étendue de la zone côtière.
Le hic est que, comme un aimant, Saly attire des centaines de jeunes en quête de travail... ou d'un beau mariage avec un(e) «toubab(e)» de passage. S’ils ne monnayent pas leurs corps.
À la terrasse des cafés de Saly, les prostituées chassent le blanc solitaire. Leur activité est légale, même si le code pénal sénégalais les oblige à avoir un carnet sanitaire et à éviter de racoler sur la voie publique.
 
Les complaintes des populations autochtones
 
Cette situation préoccupe beaucoup les populations autochtones. La station étant, en effet, installée à côté des villages traditionnels de Saly Tapée, Saly Coulang et Saly Niakh-Niakhal sur les flancs desquels sont issus d’autres quartiers (Saly Peulh, Saly Mbambara, Saly Joseph, Saly Vélingara, Saly Station, Saly Darou, Saly Carrefour, Saly Extension…).
 
«Personne n’est épargné. Pas même nos propres enfants. On voit tout le temps des mineures s’adonner à la prostitution», témoigne un employé d’hôtel, la cinquantaine, que nous avons croisé au restaurant-bar, le Rdc. «Nous faisons tout pour assurer à nos enfants une bonne éducation. Mais le milieu est loin d’être favorable à une bonne éducation. Les tentations sont grandes. Même les hommes se laissent piéger des fois, a fortiori les femmes, surtout les mineures», ajoute notre interlocuteur qui habite au village de Saly Tapée. La raison est que les tentations sont grandes. Les jeunes côtoient le luxe, voient des gens affluer de partout pour chercher des revenus, quitte à écarter les cuisses, alors qu'ils végètent dans une misère insoutenable. Ils sont désargentés, manquent de travail et leurs parents peinent à leur assurer les trois repas quotidien. C'est pourquoi, lorsqu'une opportunité se présente, ils s'y engouffrent, tête baissée. Les marches organisées par les populations locales pour dénoncer la prostitution et la pédophilie à Saly, n’y font rien.
 
Saly continue son bonhomme de chemin, avec son luxe, ses touristes, son mirage, ses tares.
 
Auteur: SenewebNews
Publié le: Lundi 23 Février 2015

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