Comment vous analysez les premières tendances communiquées par le ministre de l’Administration territoire qui semble annoncer une victoire de IBK au premier tour ?
Je crois que la majorité importante dont a bénéficié le candidat Ibrahima Boubacar Keïta (IBK) est étonnante a priori, mais je pense qu’il faut l’analyser dans son contexte. C’est dans le contexte d’un pays cassé et où les Maliens sont atterrés et traumatisés. Cette élection était, pour le Mali, une occasion de sortir de cette descente aux enfers. En allant voter massivement, c’est la première fois qu’il y a un taux de participation aussi élevé depuis la restauration de la démocratie électorale au début des années 90. Cette participation massive dénote la prise de conscience des Maliens dans l’intérêt qu’ils avaient à aller déposer le bulletin dans l’urne. Ils ont choisi celui qui était à même de les sortir de là où ils se trouvent. Je pense que ce vote traduit un réflexe de survie politique. Vous constatez que les Maliens n’ont pas réparti leurs voix entre les sensibilités partisanes politiques, c’est un vote personnel, un vote qui dépasse les clivages politiques. Il s’est agi, pour les Maliens, de porter leur choix sur quelqu’un qui est à même de remettre le pays sur les rails.
Justement, pourquoi les Maliens ont-ils choisi IBK et non les autres ?
Parce que IBK apparaissait comme un électron libre. C’est certes une personnalité du sérail politique malien, mais il avait manifesté ces dernières années sa personnalité en dehors des partis politiques. Je ne peux pas citer de noms, mais pour les autres, comme l’Urd, le fonctionnement n’était pas régulier dans le temps. L’Adema a souffert du fait qu’il est identifié au système politique malien qui s’est écroulé, mais aussi de l’usure du pouvoir. Si le choix s’est porté sur IBK, c’est parce qu’il apparaissait, aux yeux des électeurs, comme celui qui est le plus indépendant. Son élection traduit la condamnation du système qui s’est écroulé.
Si son élection est confirmée, que doit-il faire pour relever tous les défis qui l’attendent ?
IBK fonctionnait aussi dans l’appareil d’Etat. Il a été Premier ministre et président de l’Assemblée nationale qui était, à l’époque, une Chambre d’enregistrement. Il faut se rappeler que quand il était Premier ministre, IBK avait sorti le Mali d’une crise sociale qui avait éclaté en 1994-1995 et qui avait même menacé les fondements du nouveau régime malien. IBK a aussi souffert pour avoir été humilié aux élections de 2002 et depuis, on l’avait cantonné dans un rôle qui n’était pas compatible avec ses réelles capacités d’exercice du pouvoir. IBK a été élu non pas pour un programme classique, mais plutôt pour un besoin de redressement du pays, d’affirmation nationale, de la souveraineté et de l’unité nationale du Mali. Et sur ces sujets, il a été toujours ferme. IBK a su utiliser des termes très forts auxquels les Maliens n’étaient pas insensibles, parce que le Mali est un peuple très digne.
Quels sont ces termes ?
Ce sont les termes de dignité, de courage. Ce sont des termes qu’on utilise dans des contextes exceptionnels. IBK a compris que cette élection n’était pas une élection classique, mais exceptionnelle. Il fallait des mots et des expressions très forts qui correspondent à la volonté de la majorité des Maliens. Les Maliens ont voulu qu’on leur restaure leur dignité, leur honneur après qu’ils ont été piétinés.
Auteur: GFM
Publié le: Mercredi 31 Juillet 2013
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