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( Dossier ) 25 mars 2012: La palpitante et dernière «drague» de Wade

Auteur: Youssouf SANE - Seneweb News

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Abdoulaye Wade - ex-Président de la République du Sénégal

“Duma dem, duma dem, fii lay took” (Je ne vais nulle part, je reste : Ndlr), disait-il. Debout à travers le toit ouvrant de son véhicule, le vieil homme avait à peine suffisamment de force pour déclamer ses mots. Le poing dans le vent, il défie un sort qui ne tardera pas à s’abattre sur lui. La fin de son reigne était proche. Me Wade ne le savait peut-être pas, mais il venait de faire sa toute dernière drague. Fini pour lui les grandes campagnes de séduction de l’électorat. Plus jamais de candidature ou d’élections pour cet orfèvre de la politique. Le crépuscule de ce frais vendredi du 23 mars 2012, qui étalait ses tentacules sur l’interminable caravane bleue, jetait le noir sur ses ambitions présidentielles. Il stoppait net une vie politique impressionnante. Le dimanche 25 mars, Wade est surclassé par son fils, Macky Sall. Seneweb vous replonge dans la palpitante campagne d’un président déchu. 

Mardi 7 février 2012. Un vent frais balaye la cour avant du palais de la République. Le vert foncé d’un gazon méticuleusement tondu contraste d’avec la fraîche peinture rouge du pavé sur lequel stationne le véhicule présidentiel. L'étendard flottant au-dessus de la grande bâtisse blanche et les mythiques gardes rouges, en faction dans chaque intersection du palais, imposent la solennité. L’odeur âcre du carburant embaume l’air pollué par le vrombissement des moteurs de quelques véhicules. Ils n’attendent plus que la sortie du maître des lieux. Et ce n’est que vers 18 heures que le vieil homme sort de la majestueuse bâtisse. Il a troqué son traditionnel boubou bleu de campagne contre une chemise blanche, enveloppée dans un somptueux costume gris. Le crâne chauve couvert par un bonnet gris, il s’engouffre dans la limousine présidentielle fringuant de forme. Le flot de véhicules ruisselle jusqu’à Niary Tally. 

Revigoré par une foule des beaux jours, Me Wade fait cap sur l’avenue Bourguiba. Mais, très vite, l’ambiance se gâte. A hauteur du carrefour de Castors, la tension monte. Son cortège n’est pas seul. Son futur principal challenger s’est invité sur les lieux. Macky Sall et sa caravane viennent vers eux. L’ambiance devient tendue. Les agents de sécurité bandent les muscles. Téméraire, le vieil homme sort sa tête du toit ouvrant de son véhicule. Il prend le gouvernail de ses troupes et distribue des coups de mains à ses partisans. Sans jamais quitter son sourire espiègle, il toise le candidat adverse qui fut son ancien directeur de campagne. Les gardes de chaque camp ceinturent les véhicules de leurs candidats.

Premières sorties, premières erreurs

Peine perdue pour les agents de sécurité. Car aucune étincelle ne jaillira de cette rencontre fortuite au carrefour de Castors. Au contraire, ces fortuites retrouvailles entre Me Abdoulaye Wade et son ancien Premier ministre, a  détendu l’atmosphère d’une période électorale tendue. L’ambiance redevient bon enfant. «J’étais très content de voir qu’il était là et qu’il n’y avait personne avec lui. On s’est salué d’ailleurs. Il était avec un petit camion et quelques dix personnes qui étaient avec lui. La foule était avec moi, et seules quelque dix personnes étaient avec lui», déclara un Me Wade souriant à la fin de sa tournée du jour. Quoique ses propos fussent teintés d’un humour jovial, le “pape du Sopi” venait de commettre sa première erreur d’appréciation. Ne venait-il pas de sous-estimer celui qui lui prendra ce qu’il voulait si jalousement garder au prix même de la stabilité du pays ? La voix des urnes affirmera que oui. Mais, cette petite «marche bleue» dans les rues de Dakar, cachait bien des cafouillages du directoire de campagne de Me Wade. 

«Vous vous rappelez, le président Wade avait croisé Macky à Bourguiba. Vous savez pourquoi? Nous avions prévu ce jour-là d’aller voir Serigne Abdoul Karim Mbacké. C’était quelque chose qu’on avait improvisé. Toutes les voitures étaient là. On était prêts. Mais avant de sortir du palais, le Président nous demande : ‘‘Mais est-ce que vous avez vérifié si le marabout est là’’. Vérification faite, le marabout était à Touba. Nous avons été obligés d’improviser une marche dans les rues de Dakar. Et c’est ainsi que le Président a croisé Macky Bourguiba et disait ‘‘j’ai croisé Macky, il était dans une camionnette’’. Nous avons mené une campagne électorale très difficile dans la mesure où on n’avait pas de directoire de campagne fonctionnelle. Tous les soirs, on tenait une petite réunion où il y avait le Président, Bruno Diatta, Habib Sy, moi-même, Zakaria Diaw, Pape Samba Mboup et, je crois, Madame Mbaye (sa secrétaire). Ce, pour voir un peu le programme qu’il fallait dérouler le lendemain. On ne gère pas une campagne comme ça. Par contre, Macky qui avait dirigé la campagne de Wade en 2007, il n’a fait que reprendre le programme qu’il avait. C’est pourquoi d’ailleurs, il a souvent rencontré Wade à l’intérieur du pays durant la campagne électorale», se remémore Serigne Mbacké Ndiaye qui était Porte-parole du Président Wade en 2012.

«Ce que j’ai fait pour Idy et Ousmane Ngom»

Le rythme de la campagne hausse d’un cran. Les langues se délient. Le 08 février, Me Wade va pêcher des voix à Thiès, ‘‘la ville rebelle’’. Mais, le douloureux divorce d’avec son fils d’emprunt, le contraint à la confession. «C’était une séparation très douloureuse. Le fait qu’il soit parti a poussé beaucoup de thièssois à m’en vouloir. Et pourtant, ils ne savent pas que c’est Idy qui a tort. Idy, depuis qu’il a eu son Bac, c’est moi qui payais le loyer de l’appartement dans lequel il vivait avec Ousmane Ngom. Et les pouvoirs que je lui avais donnés dépassent ceux que j’ai donnés à Souleymane Ndéné Ndiaye, mon actuel Premier Ministre», confie-t-il à la Khadara de la famille Ndiéguène. Il repartira de la ville rebelle le cœur gros, sous les huées des partisans d'Idrissa Seck. La moisson du jour n’est, hélas, pas honorable. Mais, le candidat encaisse et poursuit son bonhomme de chemin.

«Dama liguèye ba sénégalais yi contane»

La longue et palpitante campagne bat son plein. Au moment où une bonne partie de l’opposition affronte les forces de l’ordre au boulevard du centenaire et à la place de l’indépendance, Me Wade fait le tour du pays. Le “pape du Sopi” drague les foules, promet, liste ses réalisations. Mais surtout, il explique pourquoi il lui faut un nouveau mandat. «Dama liguèye ba sénégalais yi contane. Mais j’ai des projets. C’est moi qui les ai pensés, je les ai lancés. Certains ont abouti et d’autres sont en cours et je veux les finir tous pour les présenter aux sénégalais. Il y a d’autres projets que j’ai pensés et je ne les ai même pas commencés. Et pour réaliser tout cela, il me faut un autre mandat», expliquait Me Wade à Pire. Le motif est tout trouvé. Après la candidature de trop, le chef de l’Etat venait de donner là, les raisons de son coup de force.

Il échappe au pire

De ville en ville, ses pérégrinations l’amènent jusqu’à la petite côte où l’irréparable a failli se produire le 15 février 2012. Ce jour-là, vers 15 heures, son cortège de véhicules quitte Joal et s’engage vers Mbour. Dès Ndianda, les effluves de l’hostilité se faisaient sentir. Les populations, huées à la bouche et foulards rouges en main, accompagneront Me Wade jusqu’à la sortie de la localité. Mais, le pire attendait la caravane libérale à la prochaine cité : Nguéniène, fief du leader des Socialistes, Ousmane Tanor Dieng. Ici, on aurait cru que toutes les âmes de la cité avaient envahi la voie principale pour huer Me Wade, tant les décibels de leurs hurlements étaient insoutenables. Le cortège ne s’arrêtera pas au cœur de cette fournaise. Comble de témérité, Me Wade veut braver cette hostilité. Mais, à peine avait-il réussi à sortir son crâne chauve de la voiture, qu’une pluie de pierres s’abat sur son cortège. Les projectiles venaient de partout. Le viel homme s’en sortir indemne, grâce au courage d’un de ses gardes qui s’est courbé sur lui et qui a pris les cailloux à sa place. Mais, la vitre arrière droite du somptueux 4x4 Ford Suburban noir, à bord duquel il était installé, vole en éclats. Un responsable libéral prit une pierre en pleine figure. Vite, le cortège accélère. Certains gardes sécurisent le candidat tandis que d’autres, encagoulés et armés jusqu’aux dents, descendirent pour riposter. Puis, les huées se transforment en cris. La chaleur infernale et la poussière rouge, soulevée par les échauffourées, créent une atmosphère funeste durant lequel les villageois attaqués de toutes parts par des hommes armés de couteaux, de coupe-coupe, de barres de fer, furent violentés. La riposte fut disproportionnée. Le sang des nguéniènois a coulé. 

La colère noire

Me Wade, furieux, descendra à Mbour tout furieux.  «En traversant Nguéniène, on a vu beaucoup de gens avec des chiffons rouges. Nous sommes passés tranquillement, ils nous ont jeté des cailloux. Ils ont presque crevé l’œil d’un de nos responsables. Mais on m’a dit qu’il n’a pas perdu l’œil. Ce ne sont pas des démocrates, mais des sauvages», peste le président sortant dans une colère noire à Mbour. Du haut du podium de son meeting, il charge Ousmane Tanor Dieng qu’il traite de «fasciste», de «violent». «Ils ont dit que si je ne déclare pas que je ne suis pas candidat ils vont brûler le pays. Personne ne peut brûler le Sénégal. Après ils ont dit que si je présente ma candidature ils vont brulé le Sénégal, ils n’ont rien brûlé. Après ils ont dit que si le conseil valide ma candidature ils vont brûler le Sénégal, ils n’ont rien brulé. Donc ils ont raconté des histoires aux Usa et en Europe. Ce sont des bonimenteurs», fusillait-il son opposition. Sous le coup de la colère, il refuse tout report des élections et ferme la porte au dialogue. L’atmosphère se gâte.

Me Wade et le vieux militant zélé

Me Wade n’était pas du genre à cacher ses sentiments ou à nuancer ses propos. Les piques les plus acerbes qu’il lançait à l’opposition, il aimait à les dire en Wolof. Et dans un vocabulaire bien moins lustré. Morceau choisi: «Opposition bi fène yougnoulène fène boba ba tèy, Khana nguén diap si Yalla et ne plus croire à ce qu’ils vous racontent», a-t-il dit aux populations de Mbour. Ses humeurs, ses colères aussi, il ne les maquillait pas. Et quand il doit freiner un militant zélé, il ne passe pas par 4 chemins. Ce fut le cas à Fatick où Me Wade qui adore les bains de foule, a, cependant montré qu’il n’aime pas être coupé. A peine avait-il commencé à parler à ses partisans, qu’il est stoppé net dans sa lancée par un vieux militant. «Gorgui», «gorgui», «gorgui», scandait-il. Wade est freiné. Enervé sous l’impitoyable soleil fatickois, il bouillonne de l’intérieur. Le militant se tait et le candidat poursuit son discours. Têtu, l’impénitent militant revient à la charge. Il freine à nouveau le candidat. Wade le fusille avec un regard qui disait clairement : «mon ami si vous vous avisez à me répéter cette impolitesse, je vous promets que je ne réponds plus de mes actes». Mais, l’indélicat militant, qui n’a pas décrypté le regard de son président, ne se lasse pas. «Ya bari doolé…», avait-il entonné quand le candidat reprit son speech. A peine avait-il déclenché que Me Wade le rabroua, furieux: «Way yow  deuglouma way seugn bi. Moi je viens pour vous transmettre des messages, c’est bien d’applaudir, mais il faut écouter d’abord pour savoir ce que vous allez dire  après». L’homme se tut tout de suite, certainement surpris par cette facette de son idole. Il se noie dans cette grande foule que draina Me Wade. Le jour du scrutin, il sera surpris d'aller au second tour avec un challenger, maire de Fatick, nommé...Macky Sall.

Wade est épuisé, il toussote… 

Au début du second tour, les manifestations pour son départ redoublent d’intensité. La tension s’intensifie. Wade fait la sourde oreille. Il poursuit sa campagne dans les profondeurs du pays. Mais, ployant sous le poids de l’âge, le vieil homme n’est plus aussi fringuant qu’au début de sa campagne. La fatigue le gagne. La poussière des routes cahoteuses, pour ce candidat octogénaire, qui a effectué une bonne partie de ses trajets par hélicoptère ou par avion, eurent raison de la solidité du vieil homme. Me Wade commence à toussoter. Il est enrhumé à son entrée à Nioro. Son meeting à Tamba fut tenu après le coucher du soleil. «Waw je ne savais  pas qu'il était si vieux», s’exclama un ado qui regardait médusé Me Wade monter péniblement les marches du podium sur lequel il devait faire son speech. Ici, les nouvelles ne sont pas bonnes. On lui raconte que certains de ses hommes sont sur le point de quitter le bateau. Ils veulent rallier le camp de l’«ennemi». Furieux, Me Wade contient sa colère. Il ira, le couteau à la bouche, riposter sur les terres de son adversaire. «C’est un apprenti qui a commencé à faire ses leçons politiques dans mon université qui s’appelle le Pds, qui croit avoir tout appris et qui, un jour, a préféré aller de son propre gré créer un autre parti. Mais je pense que l’expérience de cette élection vous montrera qu’il n’a pas encore tout à fait assimilé la politique pour pouvoir avoir un diplôme qui lui permette de partir de lui-même», disait-il. Pour Me Wade, même «Idrissa Seck est plus fort en politique que Macky Sall».

La course folle au cœur du Sine

Sa tournée dans le Sine se poursuit. Mais dès Ourour, les deux candidats se croisent. Ils se font encore quelques signes de main. Mais ici, Me Wade n’a plus le sourire aux lèvres. Les résultats du premier tour sont passés par là. Sa colère a inhibé son humour. Son cortège s’arrête à Ouadiour. Macky Sall et ses hommes sont derrière. Des éléments de la gendarmerie accourent. Ils stoppent les républicains et font barrage entre les deux convois. Pape Samba Diop, chef de protocole du patron de l'Apr, intervient auprès des gendarmes. Mais rien n’y fait. La caravane marron descend du bitume, emprunte une piste parallèle à vive allure pour devancer la caravane adverse. Macky Sall, aux commandes, est debout à travers le toit ouvrant de son véhicule, le poing dans le vent. Il est vêtu d’un grand boubou beige. Le cortège adverse avance à son tour. La tension ne faiblit pas. Plusieurs éléments de la gendarmerie courent pour freiner l’avancée du cortège Apr, stoppé de justesse à Gossas. Macky Sall et ses hommes, qui ne voulaient pas s’arrêter en si bon chemin, forcèrent encore le passage et coupent le convoi de Me Wade en deux pour atteindre l’autre côté de la route. Les libéraux gardent tout leur calme. Ils ne réagissent pas. Ouf de soulagement ! Le pire est encore évité.

Quand la fin sonne 

«La fin, quand c’est fini, comment le sait-on, comment fait-on, comment ça finit ?» questionnait Camille Laurens dans son roman intitulé «Dans ces bras-là». Avec Wade, les avalanches d’erreurs durant la campagne, furent les éléments annonciateurs, ou provocateurs du divorce entre le peuple et son président. 

A Ziguinchor, le 12 mars, Wade lâche : «J’ai nourri moi des rebelles pendant des années. Je revendique cette responsabilité et je serais le seul Président de la République à faire ça». Les familles des victimes du conflit casamançais, qui ne purent comprendre que leur président faisait vivre les assassins de leurs fils, parents et proches, furent sous le choc. Le 20 mars 2012, Me Wade fait une déclaration surprenante. Il avertit que s’il n’est pas réélu, il y aura une grève générale car les salaires ne pourront plus être payés. Le lendemain, 21 mars 2012, à 4 jours du scrutin, stupéfaction totale à Tivaouane peule. Me Wade s’en prend aux podorois et matamois. Leur tort ? Avoir voté dans leur majorité pour Macky Sall.

Wade déraille et foire sa fin de campagne

«Que les départements Podor et de Matam s’expriment clairement lors du second tour, surtout celui de Matam. S’ils votent pour Macky, je ne réaliserai pas les projets de leurs localités, je les laisserais à Macky, limafa défone sakh dinako dindi. Comme il dit qu’il sait travailler, et que vous votez pour lui, je vous laisse avec lui. L’argent que je dois y investir je le transférerai chez ceux qui m’ont aidé et qui ont besoin de ponts et de routes. Le Pont qui était à Matam on l’avait construit depuis très longtemps. Il était tellement détérioré que quand une voiture passait l’autre l’attendait. Moi j’ai construit deux ponts modernes. Mais Matam n’a pas voté pour moi. Ce que je veux leurs dire ‘‘dou goudou dou gate’’. Si vous me demandez quelque chose, et que vous voulez que je le fasse, il faut que vous votiez pour moi. C’est quelque chose que j’avais gardé en moi et j’ai attendu que je sois parmi les haalpular pour le dire», lâche-t-il devant une population ébahie.

Me Wade avait-il oublié qu’il venait de déverser sa bile sur le citoyen qui l’a fait président. Oubliait-il que les ressources publiques qui servent à construire ces ponts et routes dont il parle appartiennent à ces pauvres citoyens qu’il menaçait ? «La malheureuse déclaration, c’est celle de Tivaouane peule. Moi j’étais dans le convoi, mais je ne l’avais pas entendu. J’étais devant et c’est quelqu’un qui est dans l’entourage du Président qui m'a dit : «appelle les radios pour rectifier, ils ont fait dire au Président que s’il gagne …». Je lui ai dit : “attention, moi j’ai entendu le président dire une chose comme ça dans son bureau. Donc avant de parler aux radios, laissez-moi le soin de vérifier”. J’écoute la radio, je l’entends lui-même parler. Je me rappelle le lendemain, mon grand, Zakaria Diaw, qui était le secrétaire général de la Présidence, me disait «je ne sais pas comment je vais retourner au Fouta», racontait le dernier porte du Président libéral. 

«Mane daanogouma dé» (j'ai pas encore chuté)

A mesure que les erreurs du vieux s’accumulaient, sa fin inexorable s’approchait à pas de titans. Mais, le vieil homme lui-même refusait sa fin. «De grands pays prédisaient le pire et m’ont demandé l’autorisation d’envoyer des observateurs pour les élections. Certains m’en ont envoyé 1000, d’autres 1800. Leur plan c’était que le jour où le Sénégal brulerait qu’il y ait le maximum d’observateurs pour le dire dans le monde entier. C’était leur plan, soutenus par certains sénégalais. Ils disaient même aux journalistes de venir pour voir comment le président va tomber. Après nioumay nieuw féliciter mane mi nga kham né dagnou beugone niouw sétane naka lay daano. Mane daanogouma dé. Jamais jamais jamais wallahi (…). Je veux terminer ces chantier. Alal djou bari la, té technique bou doywaar la ladj, té nama Yalla Bale mane rek mako mane yégali (J'ai des chantiers qui nécessitent beaucoup de ressources pour sa réalisation. Je suis le seul qui pourra terminer mes grands travaux:Ndlr)» expliquait le Présidant sortant qui ne voulait pas lâcher le pouvoir.

«Macky savait minute après minute ce qui se passait chez nous»

La campagne fut intense pour le “Pape du Sopi”. Et durant ses pérégrinations, malgré le sentiment de ras le bol qui prédominait, le vieux suscitait toujours l’affection ou la compassion chez nombre de sénégalais. L’humour du vieil homme savait égayer. Ses colères inquiétaient, mais ses sautes d’humeur faisaient bien sourire. Sa démarche devenue difficile rendait quelques fois triste. Ses difficultés à monter les escaliers des podiums, sonnaient comme un rappel à l’ordre de l’âge qui lui pesait. Mais, ce n’est pas que l’âge qui l'affaiblissait. Le pouvoir le quittait.

«Moi personnellement, j’avais suffisamment de détachement pour constater les défections. Des gens étaient là, mais ils trahissaient le Président. Il y a une personnalité que je ne nommerai pas. Une liste avait été dressée. Quand nous reprenions la liste, son nom a été sauté. Il est venu à la réunion et a dit : ‘‘Mais il n’y a pas mon nom. Kou tolou ni mane vous faites une liste et vous m’oubliez, je quitte la salle’’. J’ai dit aux gens laissez-le partir, vous ne pouvez pas le retenir. Même en salle de conseil des ministres, j’observais les gens. Et je voyais que  beaucoup étaient là physiquement, mais en réalité ils étaient partis. Je pense que c’était cela la force de Macky. Parce qu’il savait minute après minute ce qui se passait chez nous», se désole Serigne Mbacké Ndiaye.

La chute du Maître

L’homme n’a jamais abdiqué devant l’adversité. Il ne semblait retrouver une nouvelle jeunesse que dans le baroud d'honneur. Mais, cette fois, le sort avait décidé de lui dire non! Sa vaste connaissance de la science politique, ses grandes réalisations, et ses élastiques ressources présidentielles n’y feront rien. La cloche de sa fin politique avait sonné. Les électeurs lui ont tourné dos. Sa chute fut spectaculaire au soir du dimanche 25 mars 2012. Celui qui baignait tant dans l’affection et la grâce des sénégalais, venait d’être vomi par l’électorat. Il avait pourtant demandé, supplié, et même quémandé quelques années à l’électeur pour finir «ses projets». Mais, ce temps, il ne l’aura pas. Le 25 mars 2012, son pouvoir s’est écroulé, comme un jour il échappera à Macky Sall...

Youssouf SANE

Auteur: Youssouf SANE - Seneweb News
Publié le: Vendredi 25 Mars 2016

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