Le panel d’experts des Nations unies chargé de documenter d’éventuelles violations de l’embargo sur les armes en Centrafrique a présenté son rapport annuel intermédiaire à New York jeudi 21 janvier. Il ne sera rendu public qu’à la fin du mois, mais RFI a pu consulter le document, et en dévoile les principales conclusions.
Les investigations contenues dans ce rapport datent pour l’essentiel d’avant l’élection de décembre et la formation de CPC, cette coalition rebelle qui menace aujourd’hui le pouvoir de Bangui. Les experts qualifient tout de même de « central » le rôle joué par l’ex-président François Bozizé – déjà sous sanctions de l’ONU – dans la mise sur pied de cette coalition.
Concernant les livraisons d’armes dans le pays – autorisées à certaines conditions –, les experts rappellent les forces armées centrafricaines à leur obligation d’assurer la protection et la traçabilité de leurs stocks. Ils soulignent en effet que du matériel militaire arrivé en octobre dernier à Bangui en provenance de Russie n’avait pas été enregistré par la Centrafrique au mois de décembre, et disent avoir des preuves que certains de ces équipements se sont retrouvés fin décembre à Boali aux mains de groupes armés membres de la CPC, 3R et anti-balaka précisément. Les experts affirment aussi que « la plupart des notifications » de livraisons d’armes que les États adressent au comité de sanctions sont trop lacunaires, ce qui rend difficile l’application de l’embargo.
Autre fait saillant documenté dans ce rapport, la façon dont l’UPC, l’un des plus puissants groupes armés du pays, tire ses revenus d’un système de taxation sur l’exploitation du business des mines d'or dans la région de Bambari. Les experts accusent ce groupe armé d’avoir en place une véritable « administration parallèle » à celle de l’État centrafricain. Ils décrivent comment des agents sont chargés pour le compte le compte de l'UPC de prélever les taxes minières à la place des autorités, sous peine de représailles parfois, puis d’acheminer les fonds ainsi collectés vers Bokolobo où réside le chef du groupe Ali Darassa.
Complicité
En toile de fonds, les experts dénoncent surtout la complicité dont font preuve, selon eux, plusieurs entreprises d’extraction d’or présentes sur place : les entreprises IMC, l’Industrie minière de Centrafrique à capitaux chinois, et Midas, une entreprise officiellement malgache, « réputée proche de la Russie » selon Africa Intelligence.
Ces deux entreprises sont entre autres accusées de payer directement des membres de l’UPC pour assurer la sécurité de leurs sites, et donc de financer le groupe armé en violation flagrante du régime de sanctions des Nations unies. L’an dernier, selon une enquête de RFI, l’entreprise Axmin enregistrée au Canada, avait refusé de poursuivre son exploitation de Ndassima dans ces conditions. Selon l'entreprise, cette exploitation était impossible sans passer d’accord avec des groupes armés.
Enfin, le groupe d’experts de l'ONU insiste sur « l’absence » de représentants de l’État dans ces zones d’exploitation de l’or. Un officiel qu’ils ont interrogé raconte même avoir été arrêté et retenu pendant sept heures par l’UPC pour avoir tenté de se rendre sur le site minier de Ndassima 2.
Interrogée par le panel d’experts, Midas a répondu ne pas être informée de la présence de I’UPC dans la zone. L’entreprise a ensuite fourni aux experts une lettre signée du ministère de l’Intérieur adressée à la compagnie, dans laquelle il est écrit que Midas ne travaille pas avec les groupes armés.
IMC n’a pas répondu aux accusations des experts.
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