Le 28 janvier 2025, un an après le retrait des trois pays du Sahel, le Mali, le Burkina Faso et le Niger, de la Communauté Économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO), un événement marquant a eu lieu à Kangaba, sur le site historique de Kurukanfuga. Un lieu emblématique, où les peuples du Mandé et leurs alliés s’étaient réunis au XIIIe siècle pour promulguer la Charte du Mandé, a servi de cadre à une célébration symbolique du premier anniversaire de cette sortie de la CDEAO. Un symbole fort de l'unité des peuples du Sahel, qui choisissent de redéfinir leur destin face aux défis communs auxquels ils sont confrontés.
En quittant la CDEAO, les trois pays ont exprimé leur volonté de fonder une organisation sous-régionale plus autonome, sans ingérence externe, notamment de la part de la France, un acteur souvent perçu comme dominant au sein de la CDEAO. Les dirigeants des trois pays, à savoir le Capitaine Ibrahim Traoré du Burkina Faso, le général Assimi Goita du Mali et le Lieutenant-Colonel Mohamed Bazoum du Niger, ont ainsi décidé de tracer leur propre voie, loin des structures régionales traditionnelles, dans l’espoir de bâtir un modèle d’intégration plus équitable et solidaire.
Le 29 janvier 2025 a également marqué une étape importante avec l’entrée en vigueur du passeport AES, un document d’identité biométrique destiné aux ressortissants des pays membres de l’Alliance des États du Sahel. Ce passeport, qui a été remis en main propre au Président du Faso, le Capitaine Ibrahim Traoré, symbolise non seulement la naissance d’une nouvelle ère pour ces pays, mais aussi le commencement du processus d’enrôlement de leurs citoyens. Le document constitue un pas vers une plus grande intégration régionale et une meilleure mobilité pour les populations du Sahel, dans un contexte où la CDEAO, malgré sa mission de coopération, n’a pas réussi à répondre aux attentes des trois pays en matière de souveraineté et de respect de leurs aspirations.
L’officialisation du retrait de la CDEAO par le Mali, le Burkina Faso et le Niger en janvier 2025 intervient après un an de tensions et de déclarations publiques. Le retrait a été précédé d’un an de rebondissements diplomatiques, depuis l’annonce de la décision en janvier 2024 jusqu’à son application effective. En quittant la CDEAO, les trois pays mettent en avant leur désir de fonder une alliance régionale basée sur la solidarité réelle et non sur des rapports de domination ou d’influence extérieure.
Lors d’une rencontre à Ouagadougou en janvier 2025, les ministres des Affaires étrangères des trois pays ont souligné l’importance de cette démarche, qui vise à promouvoir une intégration véritable, libre de toute ingérence. Selon Abdoulaye Diop, ministre malien des Affaires étrangères, la nouvelle approche “offre une nouvelle opportunité de parvenir à une fraternité réelle et une solidarité véritable”. Les déclarations ont été interprétées comme une critique implicite de la CDEAO, qui est accusée par les trois pays d’être restée sous l’influence des intérêts extérieurs, notamment de la France, au détriment de l'autonomie des nations du Sahel.
À l’occasion de ce premier anniversaire, de nombreuses manifestations ont été organisées dans les trois pays, en particulier au Burkina Faso, où des rassemblements ont marqué ce que certains ont appelé l’“enterrement” symbolique de la CDEAO. Ces manifestations témoignent d’un large soutien populaire à la démarche des autorités, malgré les critiques et les tensions qui demeurent avec la communauté internationale, en particulier l’ancienne colonie protectrice, la France. Les citoyens des trois pays semblent plus que jamais déterminés à prendre leur avenir en main et à promouvoir un modèle d’intégration qui privilégie la solidarité et la coopération entre nations africaines.
L’un des défis majeurs pour l’AES reste cependant sa capacité à s’imposer comme un modèle d’intégration viable, face aux défis sécuritaires, économiques et diplomatiques qui frappent la région du Sahel. Le modèle de coopération que souhaitent mettre en place les trois pays devra prendre en compte les réalités de la région, marquée par l’instabilité, le terrorisme et les crises humanitaires. L’AES devra également convaincre d’autres pays du Sahel ou d’Afrique de l’Ouest de rejoindre cette initiative et d’en faire un projet continental.
Le retrait de la CDEAO pourrait ainsi être vu comme le début d’une nouvelle phase pour le Sahel, où les pays de la région choisiront un modèle de coopération plus adapté à leurs réalités. Toutefois, la solidité de ce projet dépendra de la manière dont les trois pays réussiront à surmonter leurs défis internes et à établir une véritable unité autour des valeurs de fraternité, de solidarité et d’autonomie.
Le 29 janvier 2025, les pays du Sahel ont écrit une nouvelle page de leur histoire avec la mise en circulation du passeport AES et l’officialisation de leur retrait de la CDEAO. Bien que cette décision marque un tournant dans les relations régionales, elle ouvre également la voie à un projet d’intégration qui pourrait redéfinir l’avenir du Sahel. Il reste à voir comment ces nations parviendront à concrétiser cette vision d’une union africaine fondée sur la solidarité, l’autonomie et l’indépendance. L’avenir de l’AES, tout comme celui du Sahel, dépendra de la volonté politique de ses leaders et de la mobilisation de ses populations.
Commentaires (0)
Participer à la Discussion