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Afrique

Présidentielle en Guinée : Cinq millions d'électeurs appelés aux urnes

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Préparatifs du vote à Matoto (Conakry) pour le double scrutin du 22 mars en Guinée. C. Valade/RFI

Près de 5,5 millions d'électeurs sont appelés aux urnes ce dimanche 18 octobre pour élire le prochain président de la République guinéenne. Douze candidats sont en lice dont l'actuel chef de l'État, Alpha Condé, qui brigue un troisième mandat après l'adoption controversée d'une nouvelle Constitution. Si la Céni assure que tout est fin prêt pour le vote, des commissaires de l'institution ont émis des doutes sur la crédibilité du processus.

Avec nos correspondants et envoyés spéciaux en Guinée,

En Guinée, les bureaux de vote ont ouvert ce dimanche 18 octobre au matin. À Conakry, la capitale, où nos correspondants Carol Valade et Mouctar Bah suivent le déroulement du scrutin, comme à Kankan, le fief d'Alpha Condé, où se trouve notre envoyée spéciale Bineta Diagne, certains bureaux de vote ont ouvert à l'heure, d'autres avec un peu de retard, et même certains avec un peu d'avance. Ils doivent fermer ce soir à 18h. Le ministre de la Sécurité, Albert Damantang Camara, a fait le point sur la situation sécuritaire en milieu d'après-midi :

Les informations que nous recevons font état de vote calme. Les gens se déplacent normalement, il n'y a pas de problèmes majeurs dans les bureaux de vote. Certains ont ouvert un petit peu en retard, d'autres un petit peu plus tôt mais de manière générale, les choses se déroulent normalement et sans incidents.

Engouement pour le scrutin à Kankan

À Kankan, notre envoyée spéciale a notamment pu constater une forte affluence dès l'ouverture des bureaux de vote. Beaucoup d'électeurs étaient sur place dès 6h du matin, notamment dans les quartiers Bordo et Heremakono, où l'on sent un fort engouement des électeurs. "C'est un devoir de citoyen que j'accomplis depuis le retour de la démocratie en 2010", confie, tout fier, Moussa Sangaré.

C'est un devoir de citoyen que j'accomplis depuis le retour de la démocratie en 2010.

À l'inverse, l'affluence ce matin était moyenne, voire faible, dans le centre-ville de Kankan ainsi que dans trois bureaux de vote situés dans les quartiers Missirah et Mobil, précisément là où des actes de violence se sont produits en début de semaine.

La présidente d'un de ces bureaux de vote a même interpellé un superviseur de la Commission électorale pour que des agents de sécurité soient déployés "au plus vite" sur ces sites. "J'ai très peur pour le dépouillement", affirme cette responsable sous couvert d'anonymat.

À la mi-journée, les quelque 600 observateurs de la société civile déployée en Haute-Guinée n'avaient pas constaté d'incident majeur. À l'inverse, le candidat Ousmane Kaba, qui a voté à Kankan, affirme avoir relevé des anomalies, notamment des "bureaux de vote fictifs" selon ses mots, dans les quartiers Bordeaux et Missirah de Kankan. Ces informations ont été démenties par le président de la Commission électorale communale de Kankan.

Les électeurs espèrent que ce vote permettra d'améliorer leurs conditions de vie. C'est le souhait d'Aminata Konaté.

"Je vote pour le changement, pour l'alternance"

Dans les quartiers du centre-ville de Conakry et de la proche banlieue, tout semble bien se dérouler, constate notre correspondant sur place, Carol Valade. Le chef de l'État a voté dans la commune de Kaloum, le centre-ville de Conakry, non loin de la présidence. "Je souhaite que tout se passe dans la paix et la tranquillité", a-t-il déclaré avant de "souhaiter bonne chance à la Guinée". "Mon souhait est que l'élection soit libre, démocratique et transparente, que tout se passe dans la paix et la tranquillité", a ajouté Alpha Condé.

Son principal concurrent, Cellou Dalein Diallo, s'est également acquitté de son devoir de citoyen près de son domicile de Dixinn. "Je suis confiant", a-t-il déclaré. "L'heure de l'alternance est venue, j'espère juste que des violence ne viendront pas entacher ma victoire", a-t-il poursuivi avant d'appeler ses militants au calme : "Je lance un appel à tous mes partisans, de faire preuve de retenue, de responsabilité, pour que ce scrutin se passe dans les meilleures conditions. Je n'ai aucun doute quant à l'issue du scrutin et c'est pourquoi je ne souhaite pas que des violences viennent perturber le scrutin et peut-être compromettre dans une certaine mesure ma victoire".

Hier encore, les différents camps s'accusaient mutuellement d'entretenir la tension par des actes d'intimidation envers leurs délégués respectifs, après une campagne marquée par quelques actes de violence, un processus décrié par l'opposition et un parti au pouvoir qui dit craindre des troubles à l'annonce des résultats. Dans un communiqué, le ministère de la Sécurité annonce "une forte mobilisation, tant à Conakry qu'à l'intérieur du pays et note deux incidents mineurs". Samedi 17 octobre, l'ONG Amnesty International a appelé les autorités à "protéger la sécurité de toute la population, alors que la campagne électorale a été marquée par des violences et des violations des droits humains".

Trois heures après l'ouverture des bureaux de vote, dans plusieurs quartiers du centre-ville et de la proche banlieue de la capitale Conakry, l'affluence semblait être relativement forte, notamment dans cette école primaire de Coléah où la cour était pleine de monde, lavage des mains obligatoire à l'entrée mais pas vraiment de distance entre les électeurs.

Certains bureaux ont ouvert avec une heure d'avance et d'autres avec un peu de retard, selon nos informations. "Je vote pour le changement, pour l'alternance", confie un habitant de Camayenne, tandis qu'un autre, lunettes de soleil sur le nez, disait, lui, préférer la continuité, la stabilité. Vers le quartier de Hamdalaye, en banlieue, quelques coups de feu ont été entendus très brièvement mais le calme est revenu à l'heure actuelle. Conakry compte un peu plus d'un million d'électeurs inscrits, soit 19% de l'électorat global, selon la Céni. À Labé, fief de l'UFDG, le parti du principal opposant Celou Dalein Diallo, les électeurs sont au rendez-vous, comme a pu le constater notre envoyée spéciale sur place, Charlotte Idrac :

J'étais à Conakry. Je suis venu hier juste pour voter. J'ai fait 24 heures avant d'être là pour élire mon président.

À Labé, le préfet Safioulahi Bah a par ailleurs lancé un appel au calme :

Ce que je demanderais aux citoyens c'est déjà, dès après avoir voté, que chacun retourne chez soi et attende la fin du processus espérant que les résultats qui sortiront des urnes seront acceptables pour tous.

Dans le reste de la Guinée, le vote se déroule dans le calme, surtout dans les grands centres urbains comme Kindia au centre-ouest, Mamou au centre, Kissidougou au sud-ouest et Boké au nord. On note une forte affluence dans ces villes qui ont connu par endroit quelques problèmes de logistique avec pour conséquence un retard dans l'acheminement du matériel électoral, par exemple dans la ville de Boké.

Si le matériel électoral était disponible, par contre, de nombreux citoyens n'ont pas retrouvé leur carte électorale, document essentiel pour s'acquitter de leur devoir civique. S'ils retrouvaient leur carte électorale, ils ne retrouvaient parfois pas leur bureau de vote. De nombreux bureaux de vote ont ouvert avec une heure de retard. La ville de Mamou n'a pas connu ce retard mais plutôt une forte affluence dès les premières heures de la matinée qui ont contraint les délégués sous pression à commencer le vote 30 minutes, voire 40 minutes avant l'heure indiquée.

Pas ou peu de possibilités de vote pour les Guinéens de la diaspora

Même si le vote se déroule sur toute l'étendue du territoire national, les Guinéens de la diaspora seront nombreux eux à ne pas pouvoir s'exprimer. Ils voteront dans seulement onze ambassades et consulats en Afrique, selon une source à la Commission électorale nationale indépendante (Céni). Ce ne sera pas le cas au Sénégal ou encore en Angola, deux pays où résident nombre de ressortissants guinéens.

Il n'y aura par ailleurs pas de vote pour les quelque 5 500 électeurs guinéens inscrits en Guinée-Bissau. Aucun bureau de vote n'est ouvert comme prévu à l'ambassade de Guinée. Selon un diplomate guinéen interrogé par RFI, l'ambassade n'a reçu qu'une partie du matériel électoral. Il manque des bulletins, des urnes ou de l'encre indélébile. "Dans une telle condition, nous ne pourrons pas organiser le scrutin", a-t-il déclaré.

La Guinée-Bissau partage avec la Guinée une frontière commune de 324 kilomètres. Celle-ci a été fermée unilatéralement le 27 septembre par Conakry officiellement pour "raisons de sécurité" sans plus de détails.

L'alternance ou un troisième mandat pour Alpha Condé ?

Le principal enjeu de cette élection est la reconduction d'Alpha Condé pour un troisième mandat, ou l'alternance à la tête du pays. Cette bataille, le chef de l'État, qui a fait modifier la Constitution lors d'un référendum controversé pour pouvoir se représenter, espère l'emporter dès le premier tour, par un nouveau "coup KO", comme il l'avait théorisé en 2015.

Il aura face à lui onze autres candidats, dont Cellou Dalein Diallo de l'Union des forces démocratiques de Guinée (UFDG), son adversaire pour la troisième fois, qui a fait campagne sur ce slogan : "Il est l'heure".

Viennent ensuite, pour les plus connus, Ousmane Kaba du PADES, Ousmane Doré, Kabélé Camara ou encore Abé Sylla, et deux femmes, Makalé Camara et Makalé Traoré. Tous prêts à disputer au "professeur" la magistrature suprême.

Climat de méfiance

Si la Céni assure que tout est fin prêt pour le vote, des commissaires de l'institution ont émis des doutes sur la crédibilité du processus et un climat de méfiance règne dans les état-majors des partis politiques.

À quelques heures de l'ouverture des bureaux de vote, les différents camps s'accusaient mutuellement d'entretenir la tension par des actes d'intimidation envers leurs délégués respectifs.

Dans les rangs de l'UFDG, principal parti d'opposition, on dénonce "une organisation unilatérale" de la composition des bureaux de vote à la mise à disposition d'un PV unique pour tous les candidats. "Tout est fait pour créer la zizanie", soupire son secrétaire général Aliou Condé.

Du côté du Rassemblement du peuple de Guinée (RPG), le parti au pouvoir, on est en revanche plutôt serein sur le déroulement des opérations de vote. C'est au moment du dépouillement et de la centralisation des résultats que la porte-parole du parti, Domani Doré, craint des tensions. "L'opposition a déjà prévenu qu'elle proclamera ses propres résultats alors que seule la Céni est en droit de le faire", s'inquiète-t-elle. "Personne ne peut empêcher les citoyens de communiquer", répond Aliou Condé.

Ces deux principales formations ont prévu de déployer des délégués dans chacun des 425 bureaux de vote de la préfecture. Leurs responsables promettent d'être vigilants sur la transparence du scrutin, comme l'indique ce reportage de notre envoyée spéciale Charlotte Idrac à Labé :

Une élection après des mois de contestation

Avec notre envoyée spéciale à Kankan, Bineta Diagne

Octobre 2019. Des syndicalistes, des jeunes et des politiques décident de s'unir autour du Front national pour la défense de la Constitution (FNDC). Leur but : empêcher le président sortant, Alpha Condé, de modifier la Constitution afin de briguer un troisième mandat.

Le FNDC parvient à mobiliser de nombreux citoyens. Mais ces rassemblements se soldent par des affrontements avec les forces de l'ordre et des arrestations. Le FNDC opte ensuite pour des "journées ville morte".

En parallèle, le dialogue politique se crispe : s'appuyant sur les recommandations d'un rapport de l'Organisation internationale de la francophonie (OIF), l'opposition remet en question la fiabilité du fichier, qui comprend selon elle, des anomalies. Le 22 mars dernier, l'opposition appelle au boycott du référendum et des élections législatives. Estimant que le processus électoral n'est pas transparent, la communauté internationale n'envoie pas d'observateurs.

Le "oui" en faveur d'une nouvelle Constitution l'emporte finalement avec 91% des suffrages sur fond de violences : on compte officiellement, une trentaine de morts en Guinée forestière.

Puis fin août, coup de théâtre : après des débats internes houleux, l'opposant Cellou Dalein Diallo s'engage dans la course à la présidentielle. Le leader de l'UFDG veut se "battre dans les urnes contre un troisième mandat du président sortant". Il rompt ainsi avec la stratégie du FNDC, dont les manifestations peinent désormais à mobiliser.

La Cédéao, qui a finalement accompagné la Commission électorale dans la refonte du fichier, estime que ce dernier est désormais de "qualité satisfaisante". Malgré cela, certains membres de la Céni et de l'opposition continuent de douter de la fiabilité du processus électoral.


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