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Monday 01 September, 2025
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Réformer le maintien de la paix : le Mali dénonce une mission inefficace et appelle à un recentrage sur la souveraineté nationale

Auteur: Aminata Traoré

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Lors de la conférence ministérielle des Nations Unies sur les opérations de paix, tenue à Berlin, le ministre malien des Affaires étrangères, Abdoulaye Diop, a dressé un réquisitoire sans concession contre la mission onusienne au Mali. Il déplore un éloignement des objectifs initiaux, un déficit de concertation avec les autorités nationales et l’instrumentalisation des droits de l’homme. Pour Diop, il est temps de repenser la doctrine du maintien de la paix sur le continent africain.
Lors de son intervention à Berlin, le ministre malien des Affaires étrangères, Abdoulaye Diop, a livré une critique frontale de la mission onusienne de maintien de la paix au Mali. Revenant sur dix années de présence de la MINUSMA, il a déclaré que cette expérience n’avait pas permis de renforcer la stabilité du pays ni de répondre aux objectifs essentiels pour lesquels la mission avait été déployée. C’est cette impasse qui a conduit le gouvernement malien à demander, en 2023, la fin de la mission.
Selon Diop, le mandat de la MINUSMA s’est progressivement éloigné de sa vocation initiale. Plutôt que de s’attaquer directement aux défis sécuritaires, la mission a concentré ses efforts sur des questions politiques, de gouvernance et de droits de l’homme, qui ont selon lui élargi son mandat au détriment de l’efficacité opérationnelle. Un décalage qui a contribué à un profond mécontentement des populations, notamment dans les zones où les soldats de la paix se sont abstenus d’intervenir face aux exactions des groupes armés, invoquant des limites dans leur mandat.
Le ministre malien insiste sur le fait qu’une mission de maintien de la paix ne peut pas être envoyée dans un pays où il n’y a pas de paix à maintenir, en l’occurrence un contexte de guerre asymétrique. Il déplore une forme d’inaction qui a nourri la colère des citoyens maliens, frustrés de constater que les forces internationales, pourtant massivement financées, restaient passives devant les violences.
Pour éviter la répétition de telles situations, Abdoulaye Diop appelle à une refondation de la doctrine du maintien de la paix. Il propose une approche centrée sur les besoins des États, fondée sur le respect de leur souveraineté et sur une concertation permanente entre la mission et les autorités nationales. Il regrette que, dans bien des cas, les missions aient ignoré, voire remplacé, les institutions étatiques, contribuant à fragiliser davantage les pays concernés.
Un autre point de discorde majeur concerne l’usage politisé des droits de l’homme. Abdoulaye Diop dénonce une instrumentalisation de cette question, qui aurait servi davantage à exercer des pressions politiques qu’à véritablement protéger les populations. Cette approche sélective et souvent perçue comme partiale a contribué, selon lui, à fragiliser la relation entre les Nations unies et l’État malien, créant une crise de confiance durable et compromettant l’efficacité du partenariat international.
Diop a également mis en lumière l’incohérence des ressources allouées. Alors que la mission bénéficiait d’un budget annuel de près de 1,3 milliard de dollars, les fonds destinés au renforcement des capacités de l’État malien étaient « pratiquement négligeables ». Il plaide pour une meilleure répartition des moyens, en faveur de la montée en puissance des institutions nationales.
Enfin, le ministre appelle à mettre fin à certaines pratiques qu’il juge paternalistes, comme la règle du « porte-plume » dans la rédaction des résolutions onusiennes, estimant qu’elles perpétuent une forme de dépendance politique. Pour Abdoulaye Diop, les missions de paix ne doivent pas être éternelles : elles doivent accompagner, sans se substituer, et surtout, préparer les pays à assurer eux-mêmes leur sécurité et leur stabilité.
En conclusion, le chef de la diplomatie malienne adresse un message clair à la communauté internationale : il est temps de remettre les États africains au cœur du dispositif, de revoir en profondeur la philosophie du maintien de la paix, et d’engager un véritable partenariat fondé sur le respect, la souveraineté et l’efficacité.
Auteur: Aminata Traoré

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