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Vendredi 01 Juin, 2018 +33
Chronique

[ Chronique ] : Alex et Idiot

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[ Chronique ] : Alex et Idiot

 

« Ce monsieur qui toujours bougonne 
mériterait des coups de pied/ Dans un endroit 
de sa personne qui le représente en entier »
Eugène SILVAIN
 

Que les temps sont durs ! Quand il ne laisse pas sa bouche entrebâillée, Abdoulaye Wade grince les dents comme une porte mal huilée à la recherche de mots pour cacher sa honte. Dans cette affaire dite Segura, le président de la République a perdu le contrôle de son verbe et en arrive à perdre tout contrôle sur ses nerfs. « C’était un cadeau », crie-t-il à tue-tête. Soit ! Mais comment vous croire, quand vous avez commencé par le mensonge ? Le ministre de la Communication avait été instruit de nier toute implication. Son Premier ministre sommé d’avouer toutes implications. La veille, Abdoulaye Wade a passé un dur quart d’heure entre les mains de l’enquêteur Dominique Strauss Kahn. Il croyait encore, ridicule, à ses chances de compromettre Alejandro Segura : « au demeurant, il ne s’agissait pas d’une seule valise, mais deux ». Réponse du directeur du FMI : « c’est encore plus grave, monsieur le président. Mais à ce stade, la version de notre agent paraît plus conforme à la vérité des faits. » En des termes moins diplomatiques, c’est à peine si Dominique Strauss Kahn ne l’a pas traité de bonimenteur. Car si le président de la République avait réussi son coup, Segura serait aujourd’hui à la Une des tabloïds du monde entier comme un corrompu. Le corrupteur serait, d’après le plan concocté au palais de la République, le ministre des Finances Abdoulaye Diop. 
C’est l’entourage du président de la République qui a pris le soin d’informer les journalistes sénégalais qu’Alex Segura, le moralisateur téméraire du FMI, avait été pris dans une histoire de trafic de devises dans un aéroport français. Le chef de l’Etat croyait son coup si bien monté que le communiqué du Conseil des ministres du 2 octobre 2009 révélait « qu’ayant découvert des pratiques de corruption et de malversation à des niveaux élevés de l'Administration, le chef de l'Etat s'est dit indigné de telles pratiques qui sont en porte-à-faux avec les principes de bonne gouvernance qui devraient présider à la gestion des affaires du pays ». Il voyait déjà la tête ensanglantée de son ministre des Finances gisant sur le sol. Ce qu’il ne savait pas, c’est que Segura avait informé Abdoulaye Diop dès son arrivée à Barcelone, qui lui a suggéré de remettre l’argent à l’ambassadeur du Sénégal à Madrid. 
Aujourd’hui, cette affaire de corruption a fait l’objet de plus de 26 000 articles dans le monde entier, traduits dans toutes les langues, même en portugais brésilien. Le prétendant infatigable au prix Nobel de la paix, le « sage » africain stupéfait le monde entier. Abdoulaye Wade, faut-il le dire, n’avait pas besoin d’un tel exploit pour prouver sa stature internationale. S’il garde encore une jambe accrochée aux ficelles de son pouvoir, le mythe qui l’entourait s’est effondré. Quand ils font preuve de beaucoup de retenue, les éditorialistes accrochent des guillemets à son « cadeau ». Dans les rédactions du monde entier, ils accompagnent leurs sons de claviers de ricanements nourris. 
Les Sénégalais eux-mêmes n’en reviennent pas. C’est comme s’ils avaient cessé de bouger, s’étaient arrêtés de penser, effrayés, regardant le funambule de Kébémer suspendu en l’air, sur sa corde raide, en se demandant : « Mais que va-t-il faire qui le fera tomber ? » Même ses souteneurs les plus dévoués sont pris de panique. S’ils ne se sont pas tus, ils assument maintenant qu’il est inutile d’espérer un sauvetage. Il s’agrippe désespérément au capitaine de frégate Bara Cissokho, mais plus personne ne veut porter le chapeau à la place d’Abdoulaye Wade. Ses disciples l’abandonnent et n’hésitent plus à brocarder publiquement l’ancien apôtre de la bonne gouvernance. Mardi, il est allé révéler au monde entier la gestion scandaleuse de sa Fondation sur la fracture numérique. Le Fesman a connu le même sort. Des milliards du contribuable prêtés à son ami français ont été dilapidés sans aucune justification, au point de l’obliger au report de la manifestation. Chez Abdoulaye Wade, le vol s’accompagne toujours de mensonges insupportables. Imaginez qu’il y a une semaine, il déclarait avoir rehaussé l’image du Sénégal, ternie par la mauvaise gestion d’Amadou Moctar Mbow lors de son passage à l’Unesco ! Le monde, qui l’a toujours adulé, découvre maintenant le côté sordide de ce fangeux démocrate.
On n’en parle pas assez, mais l’affaire Segura cache un autre scandale bien plus grave encore. Une partie de l’argent, 100 000 euros, a disparu entre Lamine Faye et le colonel Bara Cissokho. Ce marin sorti lieutenant de l’école navale du Maroc est tout sauf un voleur, tout sauf un menteur. Il ne supporte pas de voir opposer sa parole à celle de Lamine Faye, petit-fils sans instruction, bombardé capitaine de police. Lamine Faye gagne officiellement 360 000 francs de salaire net, mais il est déjà propriétaire d’un château à Sendou et de deux villas aux Almadies. Ses relations avec Bara Cissokho n’ont jamais été faciles. Il a toujours pensé, lui qui a toujours sorti Abdoulaye Wade d’affaire, que cette place lui revenait. Six mois après l’alternance, il est entré de nuit jusque dans l’appartement du président de la République,  arme au poing. Il voulait prouver à son grand-père que son aide-de-camp chargé d’assurer sa sécurité ne faisait pas bien son travail. Mais ses prouesses ne s’arrêtent pas là. Pour prouver que le même Cissokho ne mérite pas de garder les mallettes à billets, il le fait délester fréquemment de plusieurs dizaines de milliers d’Euros. Une vive altercation a opposé les deux hommes au cours d’un voyage présidentiel en Ile Maurice, quand le colonel Cissokho s’est rendu compte que 45 000 euros avaient mystérieusement disparu de sa valise. Quand ils ne s’approvisionnent pas directement dans les mallettes de Cissokho, les proches d’Abdoulaye Wade coupent dans les « cadeaux ». Il y a deux ans, une affaire rocambolesque avait éclaté, opposant le ministre Thierno Lô au journaliste Madiambal Diagne. Le président de la République, de ses propres aveux, avait remis 200 millions de francs Cfa à Thierno Lô, destinés au journaliste Madiambal Diagne. C’était quand même épatant de voir un chef d’Etat avouer publiquement, pendant une campagne électorale, avoir utilisé autant d’argent pour corrompre un journaliste. Abdoulaye Wade a toujours compensé en indigence morale ce qui lui manque en intelligence. Il vient à nouveau de le confirmer. Même dans le banditisme de grand chemin, il est moins doué qu’on ne l’imaginait.
SJD



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