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Vendredi 01 Juin, 2018 +33
Chronique

[ Chronique ] Mais qui vous a fait roi ?

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[ Chronique ] Mais qui vous a fait roi ?
« Les lois sont les toiles daraignées 
où passent les grosses mouches 
et où restent les petites »
 H. de BALZAC


C’est une épreuve douloureuse que d’assister, impuissant, à cette flopée de pratiques scandaleuses sous le règne d’Abdoulaye Wade. Quand je pense à cette tournure désastreuse qu’a prise l’alternance, se bousculent à mon esprit une foultitude d’ignominies, allant de la lampe à huit millions de Karim Wade aux cent millions offerts à Alex Segura, en passant par les milliards pour la rénovation de La Pointe de Sangomar, les millions de dollars du Fonds taïwanais déposés dans un compte à Nicosi, le petit terrain nu acheté à 23 milliards de francs à New York, les villas présidentielles qui n’ont jamais vu le jour. Quand il me faut dire de quoi tout ceci est le nom, les bras m’en tombent littéralement. Ma langue reste collée à mon palais. Car ce qui se passe maintenant dépasse les frontières de l’entendement. Un autocrate en fin de parcours défend aveuglément son fils et tous les jours, viennent l’éclabousser de nouvelles révélations. Soulignons en cette chose la nouveauté bienheureuse. C’est que jusqu’ici, le président de la République voyait des gens « malintentionnés » derrière les accusations portées contre son fils. Depuis quelques mois, des organes de contrôle de l’Etat se chargent de cette tâche salutaire. Après l’Armp sur les marchés publics, une scabreuse affaire de partage de plusieurs centaines de millions de francs tirés de la vente de la licence de Sudatel, cette fois-ci révélée par l’Inspection Générale d’Etat, accable la nébuleuse Anoci. Les hauts fonctionnaires de l’Etat ainsi que les magistrats en sont arrivés à cette ultime nécessité, défendre leur honneur. Puisqu’il faut aussi s’occuper de toutes ces épouses de nouveaux riches, qui vont à Sorano faire étalage de leurs milliards vert-de-grisés dans le sang des nécessiteux.  
Nous avions dénoncé dans ces colonnes ce détournement en règle, le fait que quelques agents de l’Artp se mettent des centaines de millions de francs dans les poches sans qu’ils aient bougé les fesses. Le partage de ce gros butin risque de faire quelques pauvres victimes, sans doute ceux qui ont le moins profité de cette affaire. La décision d’utiliser les 100 milliards payés par Sudatel est elle-même illégale, puisqu’elle n’a fait l’objet d’aucune autorisation de l’Assemblée nationale. A ce jour, personne ne sait où est passé cet argent, comment il a été géré, dans quels comptes il a été déposé. Puisque s’il était déposé dans les comptes du Trésor public, il eut fallu une autorisation du ministre des Finances. Mais il fallait que dans cette ambiance de corruption généralisée, quelques uns payassent pour tous les autres. C’est chose faite. Il reste que si Daniel Seck doit répondre de ce crime, Karim Wade doit nécessairement expliquer en vertu de quelle loi son institution a accepté 96 millions de francs provenant de ce partage et ce qu’il en a fait. Si l’ancien directeur de l’Artp est un voleur, tous ceux qui ont partagé le produit de ce vol sont des receleurs.  
Mais Karim Wade n’est pas homme à se laisser démonter. Malgré ces bruits de casseroles qui l’entourent, le fils d’Abdoulaye Wade parvient à rendre sa voix audible. Il veut débattre, non pas de sa propre gestion, mais de la gestion du Parti socialiste d’il y a douze ans, avec des invités qu’il a lui-même choisis. Le bonhomme pense qu’on doit lui obéir en tout. Alors que la question, pour ce qui concerne Sudatel comme pour ce qui est du conflit avec Sentel, est de savoir pourquoi le fils du chef de l’Etat engage des négociations en tout genre, en l’absence des autorités compétentes. Sous Wade, Premier ministre est devenu un titre honorifique. Souleymane Ndéné Ndiaye n’est déjà plus qu’un vestige. Nous avions aussi un ministre des Finances, jusqu’à ce que le chef de l’Etat le dépouille de tout pour habiller son fils. Pour mériter le respect d’Abdoulaye Wade, il faut être courageux et bête.

 
Il est évident que cette affaire Sudatel cache des conflits d’intérêt, des rétro-commissions pratiquées par une poignée de voyous à l’impunité assurée par le président de la République. Daniel Goumbalo Seck est un maillon d’une chaîne de corruption qui prend ses racines à la présidence de la République et nulle part ailleurs. Depuis que ses petits ministres ont compris que le pillage systématique était orchestré au sommet de l’Etat, ils s’en donnent sans la moindre retenue. Les éditeurs de presse se battent depuis plus d’un mois pour savoir ce que cache le décret de répartition de l’aide à la presse, une simple application de la loi. Mais c’est sans compter avec la détermination de Moustapha Guirassy. Abdoulaye Wade se laisse souiller de telles atrocités sans une raison apparente. Mais ce qui est atterrant depuis que ces nombreux scandales sont révélés, ce sont les cris de joie résignés qui accompagnent chaque révélation compromettante dans le camp libéral. Les « wadistes » ne s’indignent pas des scandales, ils se félicitent qu’on les révèle.  
Le propre d’une bonne démocratie n’a jamais été de mettre fin à la corruption. C’est de mettre en place des outils de surveillance et de punir ceux qui en sont coupables. La punition a ici valeur dissuasive. Après Daniel Goumbala Seck, tous ceux qui arriveront à la tête de l’Artp veilleront à la bonne tenue de cette agence. Il est vrai qu’au cœur de cette décision se trouve le parquet, bras séculier du ministère de la Justice. Mais je ne cesse de saluer le courage d’Amadou Sall et sa détermination à rendre aux juges de ce pays toute leur dignité. C’est une façon de sauver l’honneur de ce pays et celui d’Abdoulaye Wade.
Toutes ces révélations finissent par mettre le président de la République dans une situation peu enviable. Vilipendé à l’extérieur, il est détesté dans son propre pays. Mais le seul responsable de ce déchaînement, c’est Abdoulaye Wade lui-même. Il est étonnant qu’à ce point, il ne mesure pas tout le mal que lui cause son fils. Les festivités du cinquantenaire de l’indépendance, son activisme pour Haïti, le dernier concert qu’il a parrainé sont la preuve d’un dégoût que les Sénégalais ont déjà exprimé il y a bientôt un an. Tout ce que cet homme entreprend se termine par un fiasco. Chassé maintenant par toute la presse mondiale, il veut se rabattre sur la presse de son pays. Boudé par l’élite mondiale qu’il voulait impressionner, il se rabat maintenant sur la classe politique de son pays.  
On lui aurait pardonné d’avoir trahi les Sénégalais s’il n’avait pas trahi la morale. J’entends par là que le fait de laisser les populations croupir dans la misère ne lui a pas suffi. Il a fait du népotisme et de la corruption un système de gouvernement. Le sénégalais nouveau qu’il se proposait de façonner est un voleur et un menteur à l’image de son créateur. On n’aurait jamais pensé que dans ce pays qu’est le Sénégal, un homme pouvait se permettre toutes ces extravagances.  
Abdoulaye Wade suscite le dégoût. Mais le saura-t-il un jour ? Il continue de soutenir que ses jours de grâce ne sont pas terminés, mais c’est son ivresse du pouvoir qui n’est jamais terminée. L’idée que son fils serait le seul capable dans le pays est une imposture soutenue par un mensonge que ce pays ne lui pardonnera jamais. Jusque dans son propre entourage, chaque sénégalais se sent insulté.
Dix années d’aveuglement ont conduit à ce bilan catastrophique. En une décennie, nous sommes passés du rêve possible à la réalité impossible. Je me demandais ici-même –j’ai eu de nombreuses réactions à ce sujet- ce qui nous conduit à traiter par la bonté ce que nous traitions hier par la colère. On m’a accusé d’avoir appelé les Sénégalais à la révolte. C’est Abdoulaye Wade qui fait germer dans le cœur de chaque sénégalais un sentiment de révolte. Il a commis tellement de choses ignobles qu’il m’est impensable qu’après avoir attendu si longtemps le moment de le punir, nous en finissions avec cet homme par un simple jeu de cartes. Au-delà du débat institutionnel sur son incapacité mentale, la seule mesure salutaire pour ce pays est de faire partir Abdoulaye Wade. Puisque la question ne se pose pas. Là où nous en sommes, ce sont les Sénégalais qui sont dans l’incapacité mentale de le supporter.  

SJD       

Ps : de nombreuses personnes utilisent mon identité de façon frauduleuse sur Facebook, et n’ont cessé de le faire malgré mes différentes interpellations. Je voudrais mettre à la disposition de tous mes amis ce lien vers mon compte, le seul qui soit de moi :
http://www.facebook.com/profile.php?id=100000875648712



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