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Chronique

[ Chronique ] On en a ras-le-foot-bol !

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[ Chronique ] On en a ras-le-foot-bol !

« Les grands embrasements
naissent de petites étincelles »
RICHELIEU


A quelque chose, malheur est bon. On se demandait ce qui pouvait sortir les Sénégalais de leur malheur chronique. Eh bien, un autre malheur ! Pardonnez mon sarcasme, mais voyez bien de quoi nous sommes capables. Nous supportons d’être privés de nourriture, de courant avec une résignation inhabituelle. Quant à nous priver de ballon pendant quatre ans, nous trouvons que c’est inacceptable. L’entraîneur national a payé cet affront cash. Le ministre Bacar Dia a eu l’insigne idée de prendre les devants pour donner Lamine Ndiaye en sacrifice. Mais il pourrait suivre dans les prochains jours. Les dieux du ballon rond sont trop gourmands.
Voilà pourtant quatre années que Samuel Sarr prive le pays d’électricité, ruine les entreprises nationales par son incapacité. Tout ce que le président de la République a trouvé à faire, c’est de le promouvoir ministre de l’Energie. Ce régime prébendier croit normal de nous priver d’électricité, de nourriture, mais ne pardonne jamais ceux qui nous privent de football. Les coups de tête manqués d’Henri Camara, les loupés de Salif Diao sont discutés en Conseil des ministres comme si l’avenir du Sénégal en dépendait. Mais dès qu’il s’agit de la dépense quotidienne, nos experts libéraux s’en remettent à l’économie mondiale et à « la conjoncture ».
Il faut dire merci à Diouf et compagnie. Comme par magie, la Senelec a rétabli le courant en banlieue. Les jeunes qui ont manifesté à la fin du match contre la Gambie ne réclamaient pas du travail à Abdoulaye Wade. Ils réclamaient le droit d’espérer une qualification à la Coupe d’Afrique et au Mondial. Une fois là-bas, continuer à espérer un quart de finale, une demi-finale, une coupe, jusqu’à ce que le malheur s’abatte de nouveau sur les frêles épaules d’El Hadj Diouf et Kalidou Fadiga. C’est une fin de match triste, mais si les Lions avaient gagné, nous n’aurions pas eu une troisième mi-temps dans les rues de Dakar. Ils n’ont pas obtenu un match nul. C’est un match nu. Nous allons enfin nous regarder tels que nous sommes, et arrêter de nous prendre pour ce que nous ne sommes pas.
Je ne comprends d’ailleurs pas le mépris dans lequel nous tenons nos voisins gambiens. Nous avons réagi comme s’ils étaient indignes de leur performance. Alors que le ballon rond roule pour tout le monde pareil, dans tous les coins de la planète. Depuis une dizaine d’années, la Gambie a investi dans ses petites catégories et ses infrastructures sportives. Pendant ce temps, l’agent immobilier Karim Wade autorisait le dynamitage du stage Assane Diouf, vendu au chinois le plus offrant. Nous avons la langue pendue, mais nous devrions dire merci à cette génération de footballeurs exceptionnels. Je me rappelle encore de l’enthousiasme avec lequel Abdoulaye Wade appelait El Hadj Diouf en Corée pour lui exprimer la reconnaissance de son peuple. Ces jeunes étaient transportés partout comme des bêtes de cirque pour leurs performances. Ils étaient l’œuvre d’un seul homme, qui disait avoir misé et gagné. Il n’a pas perdu, il nous a perdus.

Rappelez-vous de tous ces rapaces qui tournaient autour d’une association d’opportunistes dénommée « le Sénégal qui gagne ». Grâce au talent de ces jeunes nés dans les banlieues pauvres, l’Etat a reçu des milliards en dividendes ces dernières années. Qu’avons-nous fait de cet argent ?
L’injustice que vivent tous les Sénégalais, nos Lions, même pleins aux as, en subissent les conséquences. Ils ne comprennent pas pourquoi l’argent du football ne va pas au football en premier. Je trouve injuste que parce qu’ils n’ont pas gagné leur match, l’Etat nous livre un spectacle d’un si mauvais goût, en refusant de leur payer leurs primes. Nous nous en prenons inutilement aux jambes de Fadiga. Si nous pensons qu’elles sont vieilles pour exercer, nous devons appliquer la même logique à Abdoulaye Wade. La vie est pleine de miracles, mais il n’y en pas dans le domaine du sport comme celui de la gouvernance. On ne récolte que la graine que l’on a semée. A chaque fois que notre économie a été en panne, Abdoulaye Wade a fait appel au football. Les deux sont maintenant en panne, Dieu merci. J’imagine les coups de klaxon qui auraient accompagné une qualification des Lions. Le président de la République aurait justifié tous les excès, et mené Macky Sall au poteau. On verrait encore la tête de Karim Wade dehors avec son troupeau de gardes du corps, nous rappeler qu’il est de la banlieue.
Nous avons trop attendu de ces jeunes footballeurs. Ils sont payés pour le football. Mais même dans les clubs qui les font vivre, le football reste un jeu avec des gagnants et des perdants. Ils viennent représenter leur pays avec des risques de blessures qui peuvent mettre un terme à leurs carrières, alors que nous ne faisons rien pour eux. Observez bien tous ces « anciens ». Quand ils cessent d’être des professionnels du football, ils deviennent pour la plupart des professionnels de la misère. Ce n’est pas seulement valable pour le football. C’est valable pour tous les sports. L’Etat fait toujours des promesses à ses grands athlètes qui se distinguent sur la scène mondiale, mais il ne respecte jamais sa parole. Je ne vois pas pourquoi on interdirait à Diouf et Diomansy de s’amuser après un match comme s’il s’agissait d’un drame national, alors que Karim Wade passe le plus clair de son temps dans les pubs de Londres.
J’ai entendu le président de la République dire, avec l’insouciance qu’on lui connaît, que l’Afrique ne sera pas affectée par la crise qui secoue le monde entier. Il a été repris, j’avoue, par plus expert que lui, Mansour Kama. Mais l’argument qu’ils mettent en avant est affligeant. Ils disent, grosso modo, que la crise ne va pas nous appauvrir, parce que nous sommes déjà pauvres. Imaginez un monde où ceux qui sont riches sont devenus si pauvres eux-mêmes qu’ils ne peuvent pas aider ceux qui sont plus pauvres !
Nos petits entrepreneurs en font déjà les frais. Quand ils vont emprunter dans les banques locales pour payer les salaires, ils se voient opposer un niet catégorique. C’est très simple, les petites banques empruntent à de grandes banques qui, elles, ne prêtent plus du fait de la crise mondiale. Ce n’est pas seulement valable pour les entreprises de presse. La plupart ne paient plus les salaires parce que l’Etat n’est pas capable de verser les 300 millions d’aide à la presse. C’est encore pire pour les moyennes entreprises qui dépendent des grandes qui elles, ont toutes été forcés à la cessation de paiement.
Nous sommes arrivés à un tel degré d’insolvabilité que plus personne, même le réservé Baidy Agne, ne veut plus se taire. Mais nous avons été soumis pendant 5 ans à la démagogie d’Abdoulaye Wade et aux mensonges d’Abdoulaye Diop. Pendant ce temps, la machine à sous de l’Anoci ne connaît pas de répit. Dans tous les pays du monde, les murets de séparation entre deux voies sont faits en béton. A la Corniche Ouest, Karim Wade est en train d’y ajouter une couche de coquillage, « pour embellir ». C’est pour lui un moyen comme un autre de dépenser. Pendant que des secteurs vitaux de l’économie sont privés de ressources, l’Anoci trouve tous les prétextes pour faire du « gré-à-gré ». Wade père et fils prétextent que les caisses de l’Etat sont vides pour les vider.
Nous ne pouvons malheureusement plus éviter une catastrophe économique. Pour faire face à l’apocalypse, le ministre des Finances n’a d’autre idée que de lancer avant la fin de l’année un emprunt obligataire exceptionnel de 150 milliards de francs Cfa. Officiellement, ce sera pour payer les dettes des entreprises. Nous faisons porter aux générations futures le fardeau de la dette contractée par une caste de profiteurs irresponsables. J’ai entendu des libéraux, comme des zombis réveillés d’un coma, répéter huit années après avoir pris le pouvoir, que « c’est la faute au Parti socialiste ». Le Parti socialiste est en partie responsable de nos malheurs. C’est lui qui nous a fait abandonner le mal pour tenter le pire. Mais nous ne pouvons pas continuer à nous en prendre un jour aux jambes d’El Hadj Diouf, un autre à la main du Parti socialiste. C’est encore plus injuste pour ce qui concerne ces footballeurs talentueux. Si nous n’avons pas le courage de demander des comptes à Karim Wade, nous devons laisser ces jeunes tranquilles. Pour moi, il n’y a qu’une leçon à tirer de la défaite des Lions et des manifestations qui ont suivi. C’est qu’un jour, à force d’être confinés dans le noir chez eux, les jeunes iront dehors jouer avec les allumettes.
SJD



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