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Vendredi 01 Juin, 2018 +33
Chronique

Par là la sortie, Président

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Par là la sortie, Président
« Tout captif porte dans sa main gauche
 le pouvoir d’anéantir sa servitude »
SHAKESPEARE


Vous savez quoi ? Je pense qu’il faut aller prendre Abdoulaye Wade par le collet, le conduire dans les sites enfouis de Bel Air pour lui mettre le nez dans ce que ses concitoyens mangent depuis maintenant plusieurs mois. Quand on passe par la Corniche, la voie de « détournement » qui borde la cité « alternance », on peut, je le confesse, qualifier les journalistes qui traitent l’actualité sordide de ces dernières années de menteurs. Les beaux pavillons s’enchevêtrent, et chaque parcelle de terre est achetée puis revendue à prix d’or. La maison de Pape Diop y côtoie celle d’un autre, puis d’un autre. Et depuis que l’espace est devenu une denrée rare, la foire de Dakar et le cimetière chrétien sont devenus la grande convoitise des spéculateurs de tout poil. Dire à ces gens qui mangent du beurre le matin et du chou gratiné à la béchamel le soir que le pays va mal, c’est leur planter un steak de plus dans l’assiette. Vous êtes en wadoland où les nombreux alliés se trémoussent tous les matins en attendant le caviar. Ceux qui ne sont pas du gouvernement sont de la Cap 21. Ils se partagent tous les mois une tonne de riz « Caroline » et chacun reçoit 400 000 francs Cfa, moitié Présidence de la République, moitié Assemblée nationale.
Le nouveau régime a réussi la plus grande fumisterie de l’histoire de l’urbanisme. Il a pavé le chemin qui va de l’aéroport au centre-ville de belles routes et de belles maisons habitées par de nouveaux riches. Au point où tous ceux qui reviennent de Dakar vous répètent la même chose : « eh ben dis-donc, l’alternance, ils ont vraiment fait des efforts ! » Oui, ils ont fait beaucoup d’efforts pour les riches. Mais rendez-vous à Medina Gounass ou à Bagdad dans la banlieue de Guediawaye où vit le quart de la population du pays. Les cours des maisons sont enfuies dans des immondices, et les enfants font leurs toilettes dans l’eau stagnante qui inonde leurs maisons. Vous reviendrez écœurés et dégoûtés. Figurez-vous que pendant que les nouveaux humanitaires décavent du riz pourri pour le revendre à 150 francs dans ces zones insalubres, les plus nantis mangent leur Tiebu-Jën avec du basmati à 2500 francs le kilogramme. Pour eux, la révolution agropastorale qu’Abdoulaye Wade veut enclencher dans les rizières de l’Anambé et les fermes de Niacoulrab peut attendre au-delà de 2015. C’est ce que j’ai trouvé de plus blême dans l’adresse du président de la République à la Nation. Abdoulaye Wade possède depuis 1958 un verger dans l’une des zones les plus fertiles du pays. Il l’a toujours laissé à l’abandon avant de le vendre. Il n’y a jamais cultivé la moindre patate. Il n’a jamais investi ses milliards qu’il proclamait partout dans la moindre unité agro-industrielle. Depuis que cet homme est au pouvoir, il n’y a pas eu la moindre ébauche d’une tentative de mécanisation de notre agriculture. Les rares matériels agricoles offerts par les indiens destinés à nos paysans ont été détournés par ses proches. Depuis deux ans, il a signé avec les espagnols une entente qui envoie les forces vives de ce pays dans les champs agricoles d’Espagne. Les paysans sont laissés à leur propre logique de survie, livrés à des spéculateurs qui les dépouillent en leur laissant des bons souvent impayables. En quatre ans, il nous a mis dans des programmes de production de maïs, de manioc et de bissap. Ce n’est que quand une crise alimentaire de grande ampleur menace à nos portes qu’il découvre finalement que nous avons une vocation pour le riz.
Quand il marchandait la reprise des relations diplomatiques avec la Chine, il a oublié tous les programmes d’encadrement engagés par Taïwan dans les rizières de Casamance et de la Vallée. Il ne voyait que les cadeaux qu’il allait recevoir des mains des chinois. Mais ce que Wade a trouvé de plus fort à faire, c’est de nous envoyer son nouvel idéologue Bara Diouf répéter aux oreilles de nos pauvres paysans les insultes inacceptables de Nicolas Sarkozy. Le même Abdoulaye Wade qui nous disait en juillet 2003 qu’il avait révolutionné l’histoire de la pluviométrie de ce pays avec les bassins de rétention et les pluies provoquées, reproche à nos paysans leur soumission aveugle aux saisons qui se répètent inlassablement. C’est un peu reprocher à des victimes d’être des victimes : « tenez-vous bien, si la famine vous frappe, vous en serez les seuls responsables, parce que vous êtes soumis aux saisons ». Mais quelle mauvaise foi ! On ne peut pas tenir tout un peuple comptable des mensonges d’un seul homme.  
Ce qu’Abdoulaye Wade envisage encore comme un avenir reluisant risque d’être plus qu’une catastrophe humanitaire. Au fond, pas pour les raisons souvent invoquées. Il est vrai que la rareté des céréales aura un impact dramatique dans une cinquantaine de pays dans le monde, parmi lesquels le Sénégal. Mais le plus grave, c’est l’état de délabrement du trésor public. Pendant que la Banque mondiale alertait la plupart des Etats sur la crise à venir, Abdoulaye Wade utilisait les milliards de l’Etat pour s’acheter son nouvel Airbus. Les ressources de l’Etat ont été systématiquement pillées pour assurer sa vie de cour. Ces problèmes n’ont évidemment rien à voir avec le marché mondial ou le cours du pétrole que tous ses ventriloques agacés accusent injustement. Ce sont des problèmes d’éthique de gestion. Ce qui vient d’arriver aux enseignants est un problème plus profond. Depuis trois ans, les caisses de l’Etat sont vidées pour remplir des comptes ouverts dans des banques de la place au nom des « agences ». Tous les fournisseurs de l’Etat et les grandes entreprises le savent depuis longtemps, l’Etat du Sénégal n’est plus solvable. Les fournisseurs l’avaient si bien compris qu’ils ne fournissaient plus que l’Anoci qui payait rubis sur ongle, alors que tout manquait dans les ministères, même un petit stylo. La question est d’autant plus grave que depuis le début de l’année, l’Etat réclame aux privés des paiements d’impôt par anticipation en procédant par « estimation » à partir des années précédentes.
Mais ce qui est injuste, c’est que l’Anoci dépense 16 milliards en trois années pour son fonctionnement, et que tout de suite après on se retrouve avec des enseignants impayés. Il n’y a pas meilleur moyen de saboter le climat social déjà tendu et de compromettre définitivement l’année scolaire.
Le Sénégal ne va pas mal, il va mort. Et nous ne pouvons pas nous laisser entraîner en enfer, en espérant être accueillis par Dieu à bras ouverts. C’est pourquoi je partage le sentiment de révolte qui anime « l’homme public » Moustapha Niasse. Pour quelqu’un qui pensait il y a seulement deux ans que Wade « cherche à ratisser large pour que la conjonction des idées, des efforts et des initiatives permettent de faire avancer le Sénégal », quelle désillusion ! Abdoulaye Wade, c’est devenu une certitude biblique, ne va rien faire pour ce pays. Ce n’est pas seulement qu’il ne le peut pas, il ne le veut pas. C’est la posture morale dans laquelle il se tient qui le fait penser. Pendant toutes ces années, on nous a menti sur l’état du pays. Le train de promesses ne s’est jamais arrêté. Il faut donc retrouver Moustapha Niasse sur le regard lucide et courageux qu’il pose sur les réalités du pays. Mais quand on arrive au constat selon lequel « Il ne le peut pas. Il ne le peut plus », la seule conclusion qui découle de ces prémisses est « donc il doit partir ». L’homme public lui-même arrive au constat selon lequel « face aux défis immenses qui interpellent notre pays et ses populations, il n’y a nul lieu de vouloir gloser, dans des débats stériles ou dans des empoignades sans lendemain, sur ce qu’il faut faire pour sauver le Sénégal ». Son titre, « Et maintenant », définit l’urgence de l’action dans l’instant présent, compris entre un passé difficile et un futur déjà compromis. Pourquoi donc subordonner son action à des « assises » dans un avenir déjà hypothéqué, quand on énumère soi-même 7 mesures à prendre ? Le premier problème de ce pays, c’est Abdoulaye Wade. C’est pourquoi, la première solution aux problèmes de ce pays, c’est le départ d’Abdoulaye Wade. Cette exigence n’a rien à voir avec le fait qu’il ait été élu pour 5 ans ou pas. Ce n’est pas antidémocratique  demander à quelqu’un qui vient d’être élu de partir. Ce n’est pas pour lui arracher le pouvoir, c’est pour lui éviter l’humiliation.
SJD



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