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Chronique

[chronique] Saint Guillaume

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[chronique] Saint Guillaume

« J’appelle grands hommes,
tous ceux qui ont excellé
dans l’utile et dans l’agréable.
Les saccageurs de province
ne sont que des héros »
VOLTAIRE

Il faut le courage d’un homme pour changer le destin d’un peuple. Quelle que soit l’issue de la confrontation entre Alassane Ouattara et Laurent Gbagbo, qui en est à ses dernières heures, ce conflit long de bientôt dix ans a révélé un homme, Guillaume Soro. Il n’est pas l’inventeur du concept d’ivoirité. Il n’est pas l’auteur de cette partition née dans certains esprits, entre un Sud chrétien qui serait ivoirien et un Nord musulman qui ne le serait pas. Il n’est pas non plus à la base de la Constitution de juillet 2000, rédigé dans le seul but d’écarter Alassane Ouattara de la course au pouvoir. Point besoin donc de dire qu’il ne peut être tenu pour responsable de la partition de ce beau pays qu’est la Côte d’Ivoire et la mort de milliers d’innocents. Mais le dénouement qui s’annonce porte son empreinte. Le peuple ivoirien en est le seul vainqueur, mais il le doit à Guillaume Soro. Il est impressionnant de voir comment un jeune étudiant, qui avait à peine 30 ans, a pu, à un moment aussi déterminant de l’histoire de son pays, se révéler un chef militaire sans avoir jamais fait l’armée et un fin négociateur sans avoir jamais fait la diplomatie. Après l’échec de la prise d’Abidjan, le 19 septembre 2002, l’ancien dirigeant de la Fesci pensait qu’à sa survie et c’est en se faisant passer pour un médecin sénégalais qu’il appelle Cheikh Tidiane Gadio cette nuit-là, pour demander au président Wade de le sortir d’Abidjan. Cinq and plus tard, il est devenu le Premier ministre de la Côte d’Ivoire, après être passé par de nombreuses crises et siégé deux fois dans le gouvernement de Gbagbo. Quand les discussions concernant le fichier électoral se sont trouvées dans l’impasse, il a brillamment mené les négociations qui ont abouti l’organisation d’un scrutin salué par tous. Il l’a fait à ses risques et périls. Plusieurs fois il a échappé à la mort, menacé à la fois par les partisans de Gbagbo et les radicaux de son propre camp. Mais c’est en cela que l’on reconnaît la grandeur d’un homme. Il lui a fallu faire ce pays, pour arracher à Gbagbo les accords qui ont conduit à l’élection présidentielle qui a consacré la victoire d’Alassane Ouattara. Gbagbo en a accepté les termes et il a fallu parfois céder à ses exigences, comme pour ce qui concerne le stock de 400 000 électeurs dits « étrangers ». Il doit maintenant en accepter les résultats.
Les néo pacifistes africanistes ont retrouvé de la voix depuis quelques jours. Ils oublient que si la communauté internationale en est arrivée à faire usage de la force, c’est au bout de quatre mois de vaines sommations et de tentatives de raisonner Laurent Gbagbo. En se radicalisant, en laissant faire les radicaux de son camp, impliqués dans la disparition de journalistes, la mort de plusieurs nordistes à Yopougon, surtout en commanditant l’assassinat de Robert Guei, selon un rapport d’enquête de l’Onu, il a forcé une partie de son pays à la rébellion. Peut s’ajouter à cette liste, Balla Keita, ancien ministre d’Ouphouet Boigny, assassiné au Bourkina Faso où il s’était réfugié. Il avait pris le pouvoir en écartant ses adversaires, en terrorisant les populations, à l’issue d’un scrutin dénoncé par l’Onu. Koffi Annan avait exigé sa reprise, mais Lionel Jospin s’était rangé du côté de Gbagbo, au nom de l’Internationale socialiste, en fermant les yeux sur ses exactions. J’ai dit aux partisans fanatisés de Laurent Gbagbo que je ne saurais apporter ma caution à un homme qui décide de se maintenir au pouvoir en perpétrant le massacre de pauvres innocents.
Il faut maintenant, pour les Ivoiriens, réussir le plus difficile, conjurer les vieux démons et réunifier un pays divisé en différents clivages, ethniques et religieux. L’unité de la Nation ivoirienne passe par celle de son Armée. Des sergents sont devenus généraux en l’espace que quelques années. Des chasseurs sans instruction sont devenus chefs de section et attendent d’être confirmés ou récompensés.
Pour réussir un tel pari, il fallait, bien entendu, un chrétien du Sud qui soit né parmi les musulmans du Nord. Comme pour réunifier une Amérique divisée et la réconcilier avec le monde arabo musulman, il a fallu penser à un enfant métis qui ait des racines musulmanes par son père. Guillaume Kigfabori Soro est né le 8 mai 1972 à Diawala, dans le département de Ferkessédougou. Enfant catholique du Sud, c’est en voyant ses frères musulmans du Nord se faire massacrer au nom de leur religion qu’il est entré en rébellion.
Il faut pourtant tourner la page de la guerre. Pour paraphraser Hugo, qu’aime bien citer Soro, la dictature ouvre droit à l’insurrection, la démocratie la referme. J’avais déclaré à des amis communs, qui m’avaient joint pour recueillir mon avis, que Gbagbo confisquerait le pouvoir, qu’il comptait sur un pays divisé; qu’il espérait le soutien d’un quatuor de chefs d’Etat africains à l’extérieur et à l’intérieur, sur Blé Goudé et ses hommes, qui lui vouent un culte intéressé. Toutes choses qui se sont avérées par la suite. Grande fut ma surprise, de constater que l’entourage de Soro n’était pas désenchanté par une telle éventualité et qu’il se préparait à poursuivre cette cohabitation Gbagbo. Ce que je viens de dire me permet de mieux apprécier le courage qu’il lui a fallu, pour se ranger du côté de la démocratie. Le destin exige parfois que l’on soit traître à son propre camp. Mais il en faut du courage. Guillaume Soro en a eu, en prenant le risque d’être assassiné. Il est sans aucun doute le héros de cette guerre qui arrive à sa fin. Il lui faut maintenant devenir un grand homme.
Les guerres et les conflits favorisent l’émergence d’hommes exceptionnels, comme de Gaulle en fut un pour la France. Mais la domination charismatique ne peut être que provisoire. Il faut vite la supplanter par une domination légale, c'est-à-dire un ensemble d’institutions dépersonnalisées et à des lois doublement universelles, émanant de tous et s’appliquant à tous. Le « TOUS » a ici tous son sens, puisqu’il faudra au régime qui va se mettre en place, cohabiter avec des forces qui lui ont été jusqu’ici hostiles et qui souhaitent sa fin imminente. Le nouveau chef de l’Etat ne doit pas être à la hauteur, il doit être au-dessus. Pour sauver la Côte-d’Ivoire, il faut donner sa prérogative à l’Assemblée nationale qui sera issue des prochaines législatives, sans céder au clanisme déstabilisateur. Le président de la République doit, dans cette perspective, ramener son rôle à celui d’un sage qui donne les orientations en matière politique, et laisser les fonctions managériales à son Premier ministre, qui se révèle un grand meneur d’hommes. En somme, il faut, pour que les nouvelles institutions soient représentatives de la Côte-d’Ivoire, que le pouvoir s’incarne en une Assemblée  d’hommes et non en un seul homme. De toutes les manières, s’il voulait incarner le pouvoir, Alassane Ouattara ne le pourrait pas. Il a certes la légalité que lui offre le suffrage, mais la légitimité est indéniablement du côté de Guillaume Soro. Le président de la République élu de Côte d’Ivoire ne pourra rien réussir, rien faire admettre s’il n’adjoint pas à sa décision, la caution morale du Premier ministre que les circonstances lui ont imposé. Si Gbagbo avait immédiatement accepté les résultats, le rôle de Guillaume Soro eût été de moindre effet. Mais il a fallu, pour imposer la légalité, faire usage de la force. Le chef de guerre a pris le dessus.
Quand on réussit d’aussi belles choses, à l’âge qu’il a, l’humilité devient chose difficile. C’est pourtant ce qu’il lui faut. Les circonstances historiques ont révélé un grand leader, mais il lui faut se ramener au niveau des hommes, s’il veut les gouverner et qui sait, un jour, accéder à la fonction suprême.
Chez nous, pour parler du cas qui nous occupe, un homme a pensé que son charisme et son ombre tutélaire sur ses hommes suffisaient pour décider de tout et s’imposer à tous. Mais un homme qui a contre lui toute sa population et qui gouverne au moyen de la force ne peut pas être appelé un démocrate, c’est un despote. L’arbitraire présidentiel, longtemps accepté sans broncher, débouche maintenant sur une résistance et une rébellion jamais imaginées. Ce ne sont pas les responsables du Pds qui se rebellent, c’est Abdoulaye Wade qui les rebelle. Ceux qui étaient les plus engagés dans le soutien aveugle à ses actions sont aujourd’hui les plus radicalisés. Il s’agit de Pape Samba Mboup et Awa Diop. C’est ce qui arrive à un chef d’Etat, quand il veut la gloire héroïque sans la dignité républicaine qui doit l’accompagner. Les contingents armés et les gilets de protection ne pourront prévenir sa chute.

SJD




8 Commentaires

  1. Auteur

    Visiteur

    En Avril, 2011 (20:45 PM)
    Soro est senoufou nordiste chretien
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  2. Auteur

    Ah

    En Avril, 2011 (18:17 PM)
    Soyons tolèrent

    Sdj est un patriote

    En outre sorro est entre dans lhistoire
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    Auteur

    Hello

    En Avril, 2011 (21:29 PM)
    mais jules tu as deconné grave!

    comment tu peux faire ca?
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    Auteur

    Fitaw_makonen

    En Avril, 2011 (23:39 PM)
    Maintenant que la détention véritable du pouvoir tente de se faire par les obus, Maintenant que le parti politique ivoirien est devenu une milice armée, Maintenant que des ruptures profondes ont été causées par des milliers de morts, maintenant que les actions d’Onuci et de Licorne ajoutent au mécontentement, l'heure est plus à se poser la question de savoir ce que la démocratie a gagné dans l’emploi de la violence pour faire quitter Gbagbo qu'à envisager un dénouement heureux ou pas à attribuer à qui que ce soit!
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    Auteur

    Me

    En Avril, 2011 (15:53 PM)
    Je suis toujours là!
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    Auteur

    Teuf

    En Avril, 2011 (21:51 PM)
    pathétique!!!!
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    Auteur

    Undefined

    En Avril, 2011 (22:04 PM)
    ils faut reagir pour aider la popullation de keur massar quartier medina ganna sarr ou quartier amadou dia apres la case des tout petit pres du mbeubeuss ses popullations qui souffres de l eau polluer du mbeubeuss des enfants qui meurts des femmes qui avortes a cause de cette eau de mauvaise qualite toutes les familles qui sont la bas ont la diarre aider cette popullation c est comme si keur massar ne fait partie de dakar aider encor cette popullation qui souffre sans eau potable et sans ellectricite et surtout l eau qui est la vie
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    Auteur

    Idyiste

    En Avril, 2011 (21:02 PM)
    Idy est toujours dans le coeur des senegalais!
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